Interventions éducatives visant la réduction de la violence dans le cadre de projets d'insertion professionnelle destinés aux anciens détenus( Télécharger le fichier original )par Régis Verhaegen CPFB (UCL) - Baccalauréat en éducation spécialisée 2003 |
Institut Provincial de promotion sociale et de Formation Continuée Enseignement et Formation "Interventions éducatives Épreuve intégrée présentée par Régis Verhaegen en vue de l'obtention d'un baccalauréat en éducation spécialisée. Promoteur : Année académique 2013-2014 Avant-propos « Ce que tu gagneras par la violence, Mohandas Karamchand Gandhi Remerciements : Je remercie sincèrement Vincent Vanaubel, Xavier Willems, Sylvie Dony, tous les professeurs de l'IPFC et du CPFB qui ont participé à la formation, l'ASBLBravvo, Laurence Mirkes, Mohamed El Barouzi, Fatima Achemoune et Anabela Roque Reinata pour l'aide qu'ils m'ont apportée dans la réalisation de ce travail. Table des matières 1.4.2 Public cible du Projet 8 1.6 Choix de l'action étudiée et questions éthiques 13 2.1 Types, niveaux et degrés de l'acte 15 2.2 Direction et dérivation 18 3.1 Introduction : conceptualisation et prévention 19 3.3 Facteurs psychobiologiques 23 3.4 Facteurs intrapsychiques 27 3.7 Facteurs situationnels et environnementaux 48 4.1 Résultante évènementielle 55 4.2 Résultante intrapsychique 62 4.3 Résultante sur la reproductivité 67 5 Piste généraliste : la communication 74 IntroductionIntroduction généraleDepuis le départ de ma formation en tant qu'éducateur, un phénomène particulier me trouble : la violence. Cela m'a d'abord inquiété car je ne pensais pas être capable d'y faire face. Avec l'expérience offerte par les stages, j'ai vécu des situations compliquées qui m'ont rassuré sur mes capacités. J'ai d'abord été dans un centre d'accueil et d'échange de matériel stérile pour toxicomanes. Je me suis plusieurs fois retrouvé à devoir gérer des conflits physiques entre des hommessouvent armés. J'ai su gérer habilement ces situations. La fonction d'éducateur dans des écoles primaires de quartiers défavorisés de Bruxelles (deuxième et troisième stages) m'a initié au rôle de gérant de conflits interpersonnels. J'ai particulièrement apprécié ce rôle. Dans mon troisième stage (enseignement spécialisé type 1 et type 81(*)), j'ai accompagné des enfants pour qui la violence était un mode de communication quotidien. Rassuré sur mon aptitude à faire face au phénomène, il me restait une difficulté. Je me sentais particulièrement mal outillé pour traiter ce problème en profondeur. J'arrivais à réagir professionnellement sur le moment, mais j'ignorais comment traiter ces comportements de manière durable. C'est pour cette raison que j'ai choisi le thème de la violence pour cette étude. En Belgique, le nombre de condamnations au tribunal de première instance pour coups et blessures volontaire est passé de 4390 en 1997 à 6922 en 2011 (augmentation de 57,7%), le nombre de meurtres est passé de 138 à 210 (augmentation de 52,1%), le nombre de condamnations pour torture, de 0 à 55, de prises d'otage de 10 à 25 (augmentation de 150%), de vols avec violence, de 2197 à 2764 (augmentation de 25,8%) et de menaces, de 1192 à 1800 (augmentation de 51%)2(*). Ce ne sont que quelques exemples pris parmi les crimes violents qui permettent de constater une aggravation du phénomène sur 14 ans.Je travaille dans un programme d'insertion professionnelle pour de jeunes adultes qui, pour la plupart, ont déjà passé quelques années en prison. Entre 2003 et 2011, on constate que 48.2% des personnes qui ont été libérées ont fini par être réincarcérées (Maes & Robert, 2012). Le taux de récidive en Belgique est donc assez élevé. Même si la violence n'est qu'un des aspects qui peuvent amener à une incarcération, il est essentiel de travailler sur la réinsertion des prisonniers. Comme le projet dans lequel je travaille est nouveau et l'équipe réduite (4 personnes), j'ai une certaine latitude pour apporter des idées et modifier les activités. Cela fait de ce projet un terrain idéal pour réaliser cette étude et pour tester des interventions pratiques sur le phénomène de la violence. J'ai cherché le moyen de pouvoir intégrer efficacement les apports théoriques, les pistes pratiques et l'expérience de terrain tout en gardant la rigueur nécessaire à un travail d'étude dans le domaine des sciences humaines. J'ai pris le parti pris de séparer clairement les trois aspects tout en les gardant proches les uns des autres. Chaque aspect du phénomène sera donc divisé en trois parties : théorie, pistes d'intervention et expérience de terrain. Je vais essayer par différents moyens de comprendre ce phénomène et surtout de trouver des moyens pour agir dessus. Le questionnement principal de ce travail est donc : Comment aborder et traiter la violence ? 1.1 Hypothèse de départLors des recherches effectuées et dans ma vie professionnelle, j'ai pris connaissance de différents types d'interventions destinées aux anciens détenus. Différents objectifs coexistent : réinsertion, prévention de la récidive, surveillance... Le point commun est qu'elles étaient presque toutes pensées par des intervenants du milieu judiciaire : juristes, criminologues et/ou personnel carcéral. Elles pouvaient aussi être développées par des psychologues. Paul Mbanzoulou (2000), l'un des auteurs dont nous allons étudier les écrits, a l'avantage d'avoir les deux casquettes : docteur en droit, il dispose également d'une maitrise de psychologie. Il est plus rare de trouver des programmes d'intervention pour ce public réalisés par des éducateurs. De nombreux travaux sur la violence, écrits par du personnel éducatif, existent, mais ilssont souvent dirigés aux plus jeunes (public scolaire ou délinquants mineurs). L'intérêt de ce travail va résider dans le lien entre les deux mondes : le milieu éducatif et le milieu carcéral. L'hypothèse de travail est la suivante : « Une approche intégrale permet de traiter efficacement la violence chez les anciens détenus. » Cette hypothèse nous permettra d'aborder ce sujet avec un angle d'attaque assez large. En effet, le terme "intégral" est largement utilisé dans le domaine de la prévention de la criminalité. Ainsi, comme le présente la note du gouvernement fédéral belge destinée en 2009 à tous les bourgmestres du pays : « De manière générale, la Note-cadre de Sécurité intégrale définit la sécurité intégrale comme le concept visant à aborder la criminalité et l'insécurité3(*) sous tous leurs aspects, dans le contexte le plus large possible. »4(*) Une approche intégrale revient donc à étudier un phénomène en observant et en intervenant sur tous les aspects possibles. Traube (2002) définit le phénomène violent comme une mécanique complexe mêlant, rien qu'à l'intérieur du sujet, sentiments, émotions, fantasmes, préjugés, croyances, souvenirs, éducation...Sans compter tous les paramètres extérieurs. Il insiste sur l'idée qu'un changement sur un seul paramètre du phénomène est inefficace : cela nécessite une intervention multi-ciblée.C'est ce que nous allons aborder dans ce travail. * 1 Handicap mental léger et troubles de l'apprentissage * 2Service de la politique criminelle, statistiques * 3 « Manque de sécurité ; situation où l'on se sent menacé, exposé aux dangers. [...] Conditions exposant à un danger, à des risques. » (Le Petit Robert de la langue française 2014) * 4 Block S., Kerkab R. et Ceupens G. (2009) Vers une politique locale de sécurité intégrale. Direction générale de sécurité et de prévention, Jérôme Glorie. Belgique. |
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