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B. Vers un devenir medium ultra-concurrentiel1. Des capacités et des règles déséquilibréesSi Orange suscite tant d'inquiétudes et de questionnements, ce que l'on pourrait considérer comme une forme d'acception de la part de la corporation, c'est qu'elle a les capacités financières de se lancer sur un marché très spécifique qui nécessite des investissements élevés. À titre de comparaison, l'opérateur fixe et mobile produit un chiffre d'affaires de 53 milliards d'euros en 2007 quand le groupe CanalPlus n'en produit que 4,3. Il faut ajouter à ce déséquilibre capitalistique, dû à une typologie de marché particulière ainsi qu'à un passé d'opérateur public, une différence dans les obligations réglementaires entre l'éditeur qui rend des comptes au CSA, et l'opérateur à l'ARCEP. C'est un élément majeur de friction entre un éditeur historique et un opérateur glissant vers l'édition puisque les obligations en matière d'investissement dans la production européenne et française sont conséquentes. Les règles anti-concentration, que le gouvernement Fillon envisage en 2008 de remettre en question, empêche un groupe média de s'étendre de trop sur le marché. Ce point est essentiel dans la compréhension de l'opposition systémique entre les éditeurs historiques et les opérateurs télécoms. L'éditeur type, qui a construit son image de medium sur les réseaux hertziens appartient à des groupes privés dont les objectifs sont mercantiles, parfois politiques. Il demeure que ce type d'entité est un des dépositaires du jeu médiatique, au centre de la société. Les média concernent l'ensemble de la population et sont soumis à un ensemble de réglementations qui permettent de maintenir une forme d'équité entre les différents acteurs, d'empêcher la mainmise d'une entité sur la diffusion de l'information. Les opérateurs télécoms, en cela, n'ont pas encore le statut juridique d'un éditeur historique. Qu'Orange rassemble 50% du chiffre d'affaires d'un marché est impensable dans le secteur des médias. Le combat est semble-t-il déséquilibré sur des questions juridiques et financières. Le marché du contenu est à l'évidence beaucoup moins rentable que celui du mobile. C'est la raison pour laquelle le groupe CanalPlus demande aux autorités concernées de réguler le principe selon lequel Orange finance les fortes pertes de sa division contenu grâce aux profits de la distribution fixe et mobile. Ce type de bundle113(*) `accès plus contenu' est en l'occurrence refusé par les autorités au groupe Vivendi avec SFR et CanalPlus. Une partie de ces éléments sont aujourd'hui sujets à discussion politique sans pour autant qu'Orange ne ralentisse le rythme de son introduction dans le secteur des contenus. * 113 Bundle : Signifie littéralement paquet. Désigne souvent un lot d'articles destiné à la vente dans le cadre d'une offre. |