Proposition d'une méthode d'évaluation du capital humain : cas de la filière riz pour le district de Mandoto et de Betafo( Télécharger le fichier original )par Ndriakita SOLONIONJANIRINA Université d'Antananarivo, Madagascar - DEA 2008 |
5.3.3 InterprétationsA partir de dix neuf questions demandant une mobilisation de l'intelligence, des connaissances et du savoir faire en matière de riziculture, nous pensons avoir démontré notre hypothèse de départ - c'est-à-dire que la mesure du capital humain doit incorporer en plus des mesures relatives aux années d'instructions, des mesures prenant en compte des autres moyens d'acquisition en capital humain. En effet, selon la théorie du capital humain, les principaux moyens d'acquisition du capital humain sont l'éducation et l'expérience. Comme l'expérience est difficile à mesurer, nous pouvons constater par cette théorie qu'elle a été mesurée par l'âge. Tout en restant dans ce cadre théorique mais en tenant compte d'autres moyens d'investissements en capital humain et en le mesurant en stock par des évaluations basées sur un fiche technique du MAEP, nous avons pu démontrer que pour la filière riz et pour les individus de notre échantillon, l'éducation n'est pas le principal moyen d'acquisition du capital humain, ce qui privilégie une mesure multidimensionnelle du capital humain. L'analyse des données issues de notre enquête sur terrain nous a permis de désagréger le concept de capital humain en trois grandes dimensions pour la filière riz. Classifiées dans un ordre décroissant de leur importance dans notre étude, ces grandes dimensions sont : - la culture scientifique, - les connaissances sur le niveau optimal de l'eau et - les connaissances pratiques sur les tâches. Concernant la première dimension, comme dans le capital physique, il y a des forces qui s'opposent : les facteurs d'accumulation et les facteurs de dépréciation. Les moyens d'acquisition sont principalement la formation et l'éducation mais d'autres facteurs tels que la participation à des discussions sur les meilleures pratiques ou l'adhésion à une association paysanne sont aussi à considérer. Les facteurs de dépréciation de cette première dimension du capital humain sont l'expérience et l'âge. Dans cette dimension, l'expérience est assimilée à un facteur de dépréciation mais non à un facteur d'accumulation du capital humain. En effet, la dimension culture scientifique du capital humain représente la mobilisation de l'intelligence et des acquis par l'éducation ou par d'autres moyens dans la vie pratique, dans la riziculture. Par conséquent, sans les investissements, il n'y a pas ou que très peu de culture scientifique mobilisée dans la pratique de la riziculture, ce qui est un élément d'explication de la stationnarité du rendement du paddy à Madagascar depuis les années 70 (figure 784(*)). En effet, depuis toujours, l'expérience des riziculteurs malgaches en riziculture ne semble pas avoir d'influence sur le rendement du paddy. Avec un faible niveau de culture scientifique et du niveau d'investissement en capital humain, le savoir faire des Malgaches en matière de riziculture se transmet de génération en génération. Ces techniques de culture se transmettent alors aux générations suivantes sans éclaircissement scientifique sur leur fond. Par conséquent, le rendement du paddy à Madagascar est celui que permettent les techniques traditionnelles. Si l'expérience croît avec l'âge, nos observations témoignent bien ce phénomène car la plupart des chefs d'exploitation enquêtés ont un âge de 50 ans. Le quart de nos observations seulement ont moins de 33 ans. La moitié de ces enquêtés ont plus de 45 ans et le plus âgé est de 65 ans. Tableau 31. Age des individus questionnés Par exemple, 67,24%85(*) des enquêtés pensent qu'il faut extraire le bout de terre accroché à la racine. Cette question est importante car chaque racine abîmée pèsera sur le rendement du paddy. Ce taux est au maximum (72,22%) pour les individus entre 30 à 45 ans. L'âge est une variable intéressante ici car se référant à celui-ci, le système de l'éducation analysé à travers nos observations renvoie à la performance du système éducatif d'il y a une quarantaine d'années. Par exemple, par rapport aux modes de repiquage demandés, seuls 57,89% ont su bien répondre à la question et le quart des individus qui ont entre douze et treize années de scolarité croient encore qu'il faut repiquer le riz trois par trois. Globalement, 31,58% des chefs d'exploitation pensent qu'il faut repiquer le riz deux par deux et ce taux est à son maximum pour le niveau [10 à 11] années d'instructions. En matière de conversion d'unité pour la surface (Application numérique 186(*)), 20% de l'échantillon seulement ont su répondre à l'équivalence de 10m² en Are et 28,75% admettent n'avoir aucune idée sur cette équivalence. 30% de l'échantillon pensent que 10m² équivaut à 1 Are tandis que l'Are est équivalent à 100m². Figure 16. Conversion d'unités de mesure Comme nous avons posé treize questions englobées par la culture scientifique, nous pourrons analyser chaque réponse mais les analyser une par une serait fastidieux. Bref par ces questions et puis par les scores obtenus, nous pouvons estimer l'équation suivante : Équation 3. Indice culture scientifique87(*) LOG(ICS )=1,398+0,036*édu+0,066*forma - 0,014 expce - 0,009*âge + 0,237 discut+0,206 assoc Concernant la connaissance du niveau optimal de l'eau, malgré nos efforts pour expliquer cette dimension par une combinaison de facteurs explicatifs représentant les éventuels moyens d'investissement en capital humain, il a été totalement impossible de l'expliquer. Nous avons pensé que le fait de suivre des formations en agriculture ou encore les facteurs comme l'éducation, l'expérience et le fait d'être membre d'une association paysanne influenceraient sur cette dimension, comme le suggère l'examen graphique préliminaire, mais les résultats furent les mêmes. Comme nous n'avons pas spécifié de quel type de formation il s'agit, nous en concluons que cette dimension doit être propre à la filière. Il se pourrait aussi s'agir du fait que nos données ne contiennent pas assez d'observations des riziculteurs qui ont suivi des formations ou ceux qui sont membres d'associations paysannes (tableau 21). Toutefois, une autre possibilité reste inconsidérée, celle que les formations et les activités dans le cadre des associations ne permettent pas de connaître le niveau optimal de l'eau. Il se pourrait même que les riziculteurs ignorent l'existence d'un niveau optimal de l'eau. Tableau 32. Formation - association paysanne - discussions sur les meilleures pratiques Enfin pour expliquer la dernière dimension, nous avons pu trouver qu'elle est influencée positivement par le niveau d'éducation, l'âge et l'adhésion à des associations paysannes88(*). Nous pouvons formuler ainsi un modèle dont la représentation est la suivante : Équation 4. Indice connaissances pratiques Log(IC P )= 1.024+0,028*édu+0,157*assoc+0,007*âge Comme le montre cette équation, l'accumulation de connaissances pratiques en matière de riziculture est surtout fonction de l'éducation reçue. Pour cette dimension, l'âge est assimilé à un facteur d'accumulation mais non plus à un facteur de dépréciation du capital humain. Il découle de cette équation qu'un individu qui a reçu plus d'éducation acquiert plus vite des connaissances pratiques. * 84 Voir Figure 7. Le rendement à l'hectare du paddy au niveau international, P. 11 * 85 Voir Figure 14. Repiquage 1, P. 67 * 86 Voir Annexe2 * 87 Voir Tableau 25. Les coefficients des modèles pour la culture scientifique, modèle 4, P. 59 * 88 Issue du sous-modèle 2, tableau 19 |
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