Section II : Les droits d'enregistrement
Régime fiscal de fusion des sociétés
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ISCAE 2004-2005
Le régime des fusions des sociétés au
regard des droits d'enregistrement s'est
considérablement simplifié avec le temps et
en particulier avec la promulgation de
code des droits d'enregistrement et
de timbre par la loi n°93-53 du 17 mai
1993.
Vu l'importance de droits d'enregistrement à
liquider en matière de fusion, le
législateur tunisien a instauré depuis le 31
décembre 1962 un régime de faveur dont
bénéficient les sociétés
fusionnantes, assorti de certaines conditions (sous section
II). A défaut de conformité aux conditions
liées au bénéfice de ce régime de faveur,
les sociétés participantes à la fusion
se trouvent obliger à l'enregistrement de
l'opération de fusion selon le régime de droit
commun (sous section I)
Sous section I : Régime de droit commun
L'opération de fusion se traduit par la rédaction
de différents actes de nature à
rendre cette opération opposable aux tiers et à
tout intéressé.
En effet, l'opération de fusion se traduit par la
dissolution de la société absorbée, en
plus, il y a lieu de constater l'augmentation du capital
en cas de fusion par voie
d'absorption ou la constitution d'une société
nouvelle dans le cadre d'une fusion par
création d'une société nouvelle.
Toute fois, la fusion doit être constatée par
un acte de fusion proprement dit
constatant la réalisation définitive de
l'opération de fusion.
Toutes ces résultantes de l'opération de
fusion sont soumises à la formalité
d'enregistrement.
Le régime de droit commun ne fait que
traduire au niveau des droits
d'enregistrement la dissolution de la
société absorbée, ou apporteuse, puis
l'augmentation du capital de la société
absorbante ou la constitution de la société
nouvelle.
La dissolution de la société
absorbée :
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Du fait de la fusion, la société absorbée ou
apporteuse est dissoute et les droits
sociaux qui ont été crées par la
société absorbante (ou société nouvelle issue
de
fusion) en rémunération des apports de
l'absorbée sont partagés entre les membres
de cette dernière.
On est ainsi en présence de deux opérations
différentes, dissolution puis partage. Au
plan des droits d'enregistrement, il convient de
distinguer selon que ces deux
opérations font l'objet d'un acte unique ou non.
Si la dissolution et le partage sont constatés par un acte
identique, seule est taxée la
disposition qui donne ouverture au tarif le plus
élevé. Il s'agit là d'un principe général
en matière d'enregistrement, consigné
à l'article 18 du code des droits
d'enregistrement et de
timbre aux termes duquel « lorsqu'un acte renferme
plusieurs dispositions tarifiées différemment
mais en raison de leur corrélation ne
sont pas de nature à donne ouverture
à la pluralité des droits, le droit
d'enregistrement est liquidé sur la base de la
disposition soumise au tarif le plus
élevé. »
En revanche, si la dissolution et le partage sont
constatés par des actes distincts, le
droit fixe de 100 dt (article 23 du
code des droits d'enregistrement et de
timbre) au titre de la dissolution puis le droit
proportionnel de partage de 0.5% sera
exigible (article 23 du code des droits
d'enregistrement et de timbre)
L'application de droit proportionnel de partage appelle
deux précisions. En premier
lieu, il ne trouve à s'appliquer que si le
partage réalisé est pur et simple ; si en
revanche le partage prévoit le paiement par
certains bénéficiaires d'une soulte,
d'autres droits trouvent à s'appliquer. Il s'agira en
espèce des droits dus en cas de
cession des droits sociaux qui peut être assimilée
à une vente des immeubles donc
cette cession est soumise au droit proportionnel de vente des
immeubles de 5%. En
second lieu, le droit de partage de 0.5% se calcule en fonction
de la valeur des titres
partagés appréciés à la date de
partage. S'agissant des titres cotés, le droit de
partage est calculé d'après le cours boursier
à la date de partage.
L'augmentation du capital de la société
absorbante :
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Les apports réalisés par la (ou les)
société(s) absorbée(s) vont concourir à la
formation du capital de la société nouvelle
crée à l'occasion de la fusion, soit à
l'augmentation du capital de la société
absorbante. Il en résulte que les droits dus
correspondent en fait aux droits applicables en matière
d'apports en société.
On ne reprendra ici que les grandes lignes de ce
régime à partir de la distinction
traditionnelle en matière d'apports en
société : apports à titre pur et simple, apports
à titre onéreux.
Régime des apports à titre pur et simple :
Il importe de déterminer d'une part le tarif des
droits applicables et d'autre part
l'assiette des droits à retenir.
o Tarif des droits : en matière d'apport
en société, les apports à titre pur et simple
peuvent être passibles :
- du droit fixe de 100 dt sur l'enregistrement des apports.
- Si l'apport porte sur des biens immeubles
immatriculés à la conservation de
propriété foncière, le droit de 1% est
perçu.
- Pour un bien immeuble non immatriculé, le droit de 1% de
mutation et de partage
des biens non immatriculés sera perçu aussi.
- Si l'apport porte sur des biens immeubles dont
l'origine de propriété n'est pas
indiquée, le droit de 3% pour défaut d'origine sera
exigible.
o Base de calcul des droits : lors d'un
apport réalisé dans le cadre d'une
opération de fusion, la société
absorbée transmet généralement à la
société
absorbante l'ensemble de son patrimoine tant dans ses
éléments actifs et passifs. Or,
la prise en charge du passif par la société
absorbante constitue un apport à titre
onéreux soustrait aux aléas sociaux et passible de
droit de mutation (voir régime des
apports à titre onéreux). Il en résulte que
le droit ordinaire se calcule sur la valeur de
l'actif net apporté c'est-à-dire l'actif brut
diminué du passif.
L'actif net équivaut ainsi à la valeur
réelle des droits sociaux crés en rémunération
des apports.
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Pour la détermination proprement dite de l'actif
net, différence en l'actif brut et le
passif pris en charge, plusieurs observations doivent être
formulées :
- Sur l'actif brut : l'actif brut doit
comprendre l'ensemble des biens corporels et
incorporels dont l'apport est stipulé au profit de
la société absorbante ou de la
société nouvelle constituée à
l'occasion de la fusion.
Pour déterminer l'ensemble des éléments
à comprendre dans l'actif brut, le critère
déterminant est celui de l'apport à la
société absorbante. Il importe peu que les biens
en question soient inscrits ou non à l'actif du bilan ou
que la société absorbée soit
propriétaire ou non des biens.
L'actif brut doit faire l'objet d'une déclaration
estimative détaillée, la valeur des biens
apportés devant correspondre à la valeur
vénale des éléments à la date de
réalisation définitive de l'opération de
fusion 1. Il s'agit là d'un principe
général en
matière d'enregistrement et l'administration a
naturellement la possibilité de
contester ultérieurement les évaluations
retenues en invoquant, et en mettant en
évidence, les insuffisantes. Il n'y a pas lieu
enfin de pratiquer une réfaction
quelconque sur le montant de l'actif brut ainsi
évalué au motif que la société
absorbée détiendrait des actions ou parts sociales
de la société absorbante.
- Sur le passif déductible : le passif qui peut
venir en déduction de l'actif brut pour la
détermination de l'actif net est celui qui existe
au jour de la fusion. Le passif
déductible comprend aussi bien les dettes envers les tiers
que les dettes envers les
associés ou actionnaires. Il comprend
également les provisions pour dépréciation
ainsi que les provisions pour risque et charges.
Comme pour les éléments de l'actif brut,
l'administration peut le cas échéant
contester l'valuation des éléments qui
composent le passif, voire arguer de sa
fictivité.
1 En matière de créances c'est, selon
l'administration, la valeur nominale de la créance qui doit être
retenue et
cela quand bien même le recouvrement de la créance
serait incertain ou litigieux. La seule exception concerne
les créances dont le débiteur est en
règlement judiciaire et pour lesquels il est admis de retenir la valeur
vénale.
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Régime des apports à titre onéreux :
Le régime des apports à titre onéreux est
susceptible de s'appliquer dés lors l'apport
réalisé par la société
absorbée à la société absorbante comporte des
éléments qui
seront soustraits aux aléas sociaux ou ce qui est
pratique courante en matière de
fusion, lorsque la société absorbante prend en
charge tout ou une partie du passif de
la société absorbée.
Si un apport réalisé par une
société comporte à la fois des apports à
titre pur et
simple et des apports à titre onéreux, l'apport est
dit mixte et les droits sont perçus à
la fois sur les apports à titre pur et simple et sur les
apports à titre onéreux.
Le calcul des droits dus sur les apports à titre
onéreux ne soulève aucune difficulté.
En effet, les taux applicables sont ceux qui correspondent aux
droits de mutation sur
la vente des éléments qui font l'objet de
l'apport à titre onéreux. Le seul aspect
délicat réside dans la détermination des
éléments qui doivent être réputés
apportés à
titre onéreux. Sur ce point, l'administration
reconnaît aux sociétés qui participent à
l'opération de fusion la même faculté
qu'en matière de constitution de sociétés, à
savoir la possibilité de pratiquer l'imputation des
apports à titre onéreux de la
manière qui soit la plus favorable possible et ce, de
façon à minimiser le montant des
droits dus. Toute fois, si la fusion est faite entre des
sociétés passibles à l'impôt sur
les sociétés, la prise en charge de passif
grevant les apports par la société
absorbante ou nouvelle est soumise au droit fixe de 100 dt
(article 23--21 du code
de droits d'enregistrement et de
timbre).
D'après le principe de la transmission universelle
du patrimoine de la société
absorbée à la société absorbante ou
à la société nouvelle issue de fusion, au regard
des droits d'enregistrement, la fusion représente un
coût énorme au titre des droits
dus que ce soit sur les actes soumis au droit fixe que sur les
éléments soumis aux
taux proportionnels.
Tout en adoptant ce régime de droit commun en
matière d'enregistrement, les
sociétés fusionnées vont supporter
des coûts excessifs issus de la formalité
d'enregistrement. Et pour remédier à cette
contrainte en matière d'enregistrement,
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Le législateur tunisien a instauré un
régime spécial dit de faveur. Ce régime est
appelé à alléger la charge des
formalités d'enregistrement dans le cadre de
l'encouragement des opérations de fusion et tout en
essayant de porter la réussite
de cette opération le plus loin possible.
Sous section II : Régime de faveur
Afin de ne pas dissuader les entreprises de
procéder à des opérations de
regroupement par voie de fusion, l'adoption des mesures fiscales
dite de faveur a été
étendue au domaine des droits d'enregistrement. Le
législateur a prévu le régime de
faveur depuis 31décembre1962 en application de
la loi n°62-81. Il intéressant de
distinguer entre :
Régime applicable avant 17 mai 1993:
Le régime de faveur s'applique à toute
opération de fusion qui préconise les trois
conditions cumulatives suivantes :
- la société absorbante doit être de
nationalité tunisienne au sens de l'article 3 du
décret-loi n°61-14 du 31 août
1961 ;
- la société absorbante doit revêtir la forme
d'une société anonyme, d'une société en
commandite par action ou d'une société
coopérative ;
- la fusion doit être préalablement agrée par
le secrétaire de l'Etat au plan et aux
finances après avis de la commission de l'agence de
promotion industrielle.
Ainsi, ces trois conditions d'admission au
régime de faveur en matière
d'enregistrement incombent à la société
bénéficiaire des apports, la société
absorbée
n'encourt aucune condition.
L'article 3 prévoit que pour être
de nationalité tunisienne, la société doit remplir les
deux conditions suivantes :
- avoir son siége social en Tunisie ;
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- être contrôlée par des personnes physiques
ou morales tunisiennes. Donc elle doit
être constituée sous statut juridique tunisien.
Une fois ces trois conditions sont remplies,
l'opération de fusion est admise au
bénéfice de deux séries d'avantages en
matière des droits d'enregistrements :
-1- dans les actes de fusion, la prise en charge du passif
grevant les apports de la ou
les sociétés absorbées par la
société absorbante ne donne lieu qu'au droit fixe prévu
au tarif n°110 bis du tarif annexé au décret
du 19 avril 1912 que la fusion par voie
d'absorption ou par création d'une société
nouvelle (article 46 de la loi n°88-145
modifiant l'article 8 de la loi
n°62-81) ;
-2- les droits de mutation ne sont pas applicables sur les
apports à titre onéreux.
Régime applicable après 17 mai 1993:
D'après l'article 23 de la loi
n°93-53 du 17 mai 1993 qui stipule que : « la prise
en charge du passif grevant les apports mentionnés
dans les actes qui constatent
des opérations de fusion entre personnes morales
passibles de l'impôt sur les
sociétés est soumis au droit fixe de 100 dt. »
Il découle de cet article que les conditions du
bénéfice du régime de faveur
énumérées par les articles
7 et 8 de la loi n°62-81 ne
sont plus exigées du fait de
l'abrogation de ces dits articles par la nouvelle loi. En
d'autres termes, l'article 23
de la loi précitée a instauré, en cas de
fusion, un droit fixe de 100 dt par acte et ce
quelque soit la catégorie et la valeur de l'apport
sous condition que la fusion soit
entre des personnes morales passibles de l'impôt sur les
sociétés. Toute fois, le droit
de 1% au profit de la conservation de
propriété foncière portant sur les biens
immeubles immatriculés reste percevoir.
Par l'instauration de régime de faveur par le
législateur et surtout avec la
promulgation du code des droits d'enregistrement
et de timbre par la loi n° 93-
53 du 17 mai 1993, la
réglementation de l'opération de fusion est devenue plus
souple et plus profitable aux sociétés
y participantes. Ce régime permet le
déroulement de l'enregistrement des actes y
afférents à la fusion au moindre coût.
La politique d'encouragement des opérations de
restructuration notamment par
voie de fusion, suivie par la législation tunisienne et ce
en matière fiscale, n'a pour
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objectif que la motivation des sociétés
à se fusionner et à se regrouper pour faire
face au courant de développement économique
à l'chelle internationale et pour que
ses sociétés soient plus
compétitives à celles les étrangères.
Cette politique
d'encouragement a été traduite par
l'instauration de régime de faveur couvrant
l'opération de fusion. Ce régime a pour but
de minimiser le coût fiscal d'une
opération de fusion notamment en matière de
TVA et droits d'enregistrement.
Néanmoins, le régime de faveur n'est pas
limité aux seuls ces droits mais en plus, il a
touché les impôts directs dont le plus
important est l'impôt sur les sociétés
(chapitre II)
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