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Evaluation de la stratégie multicanal d'une banque de détail: le cas de la SCB Cameroun


par Didier TIOMELA
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2014
  

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Première partie : LA BANQUE DE DETAIL ET LA DISTRIBUTION DES PRODUITS ET SERVICES FINANCIERS

L'objectif de cette partie est de préciser le cadre de la recherche en définissant avec plus de précision les concepts de multicanal, de distribution bancaire, de réseau de distribution multicanal et de performance bancaire.

Le premier chapitre participe d'une démarche explicative basée tant sur la description que sur l'analyse de la littérature. Nous cherchons à définir ce qu'est un canal de distribution, le multicanal, et plus précisément, un réseau de distribution multicanal. La première section nous permet de constater l'abondance relative des travaux sur la distribution multicanal des banques de détail sur des marchés matures (Europe, Amérique du Nord). La seconde section est tournée vers l'analyse de leurs conditions de développement. Notre but est de comprendre les raisons de leur utilisation croissante, et de mettre en évidence leurs avantages et de leurs limites, tant pour les entreprises bancaires que pour leurs clientèles.

Le second chapitre permet de mieux cerner notre problématique. Tandis que la première section dresse une revue de la littérature sur le concept de performance bancaire, la deuxième section fait état des principaux indicateurs de mesure de performance des canaux dans un contexte de distribution multicanal.

CHAPITRE I : LA DISTRIBUTION MULTICANAL DANS UNE BANQUE DE DETAIL

Selon Frantz Rowe25(*) (1994), l'activité de distribution occupe une place stratégique pour la banque de détail. Des quatre leviers d'action que constituent les variantes du marketing-mix (place, prix, produit, promotion), seule la politique de distribution semble être la plus opérationnelle, la différenciation par les prix ou par les produits étant délicate. Cette place est encore plus importante pour ce type de banque dans la mesure où elle représente moyenne 65% des coûts bancaires26(*).

Pour Badoc27(*) (2013), « l'élaboration d'une politique de distribution constitue probablement la décision la plus lourde pour la banque ». En effet, cette stratégie est déterminée par des facteurs aussi divers et inter reliés que le coût financier, les conséquences sociales des décisions qui s'y rapportent, la réglementation, l'adéquation du système d'information, la politique de sécurisation des transactions, la cohérence avec la politique commerciale etc. L'importance stratégique de ces décisions transparaît également dans les travaux de Lamarque28(*) (1999). Les résultats de son étude empirique montrent qu'avec la gestion des risques, l'architecture du réseau de distribution est une compétence distinctive, qui permet la construction durable d'un avantage concurrentiel.

L'accroissement de la concurrence a incité les banques à s'investir dans de nouveaux canaux de distribution. La politique de distribution consiste à choisir un (ou plusieurs) canal (canaux) de distribution et à constituer un réseau compte tenu des stratégies suivies. La fonction de distribution dans le secteur bancaire a connu une évolution qui rivalise avec l'évolution des services proposés par les banques, qui ont multiplié les canaux et dont la gestion est de plus en plus délicate. La banque de détail moderne doit adapter sa stratégie de distribution et faire face aux nouveaux défis dont Badoc (Op. Cit.) a identifié les quatre composantes :

- Undéfi économique qui fait naître des préoccupations liées au coût des différents canaux de distribution et des réseaux qui impacte considérablement la rentabilité globale de l'institution ;

- Undéfi commercial qui place l'établissement financier dans une situation délicate face aux attentes d'une clientèle hétérogène (particuliers, PME, professionnels etc.) et plus exigeante (besoins de disponibilité, de tarification adaptée et du sur-mesure) ;

- Undéfi concurrentiel impulsé principalement par les mécanismes de concentrations, les effets de la mondialisation, le développement des fintech etc. ;

- Undéfi lié à la technologie qui demeure un vecteur incontournable dans la nouvelle distribution et dont l'évolution pourrait fortement influencer le poids des réseaux dans les charges d'exploitation des banques.

Une stratégie de distribution multicanal est devenue une nécessité pour les entreprises de service à l'instar des banques car, « au-delà de la dimension transactionnelle (productivité), elle introduit une dimension relationnelle qui raffermit la relation entre l'entreprise et ses clients ». Qu'entend-t-on par canal de distribution ? Qu'est-ce qu'un réseau de distribution multicanal ? Avant d'apprécier la pertinence de l'évaluation du système de distribution multicanal dans une banque de détail (Section II), nous donnerons en premier lieu un aperçu de la littérature sur le concept de multicanal (Section I).

SECTION I : GENERALITES SUR LA DISTRUBUTION MULTICANAL EN MILIEU BANCAIRE

La multiplication des formats de vente comme modèle de distribution des produits et services bancaires a été impulsée principalement par deux principaux facteurs : la diversité des attentes du consommateur et l'évolution des NTIC. Nous définirons quelques notions autour du multicanal (I) avant de présenter les différents canaux bancaires (II).

I. Du canal au réseau de distribution multicanal

Les définitions de canal distribution (marketing Channel29(*)) sont autant diverses que la littérature sur le sujet. Pour J'allais30(*) (1997), un canal de distribution représente « le chemin parcouru par un produit, lorsqu'il quitte le secteur de production pour atteindre le consommateur final, ce chemin étant jalonné d'intermédiaires remplissant diverses fonctions ». Filer31(*)(2000) considère le canal de distribution comme « l'ensemble des institutions qui supportent les flux physiques et les flux d'informations permettant l'achat des produits par l'acheteur final ». Pour Lendrevie32(*) et Lindon (2013), « un canal de distribution est l'ensemble d'intermédiaires de même type qui contribuent à la distribution des produits de l'entreprise ». Un canal de distribution33(*) peut être considéré comme étant un sous-ensemble d'un circuit de distribution, le circuit correspondant à la totalité des canaux utilisés pour distribuer soit une catégorie, soit un ensemble de biens et services donnés. On considère le canal ici au sens de structure d'exploitation commerciale, c'est-à-dire comme un sous-ensemble d'activités de gestion de la relation client d'une entité, dotée de sa propre organisation, de ses moyens et offrant des possibilités d'échanges avec une clientèle ciblée ou non. C'est un élément de la structure qui peut mettre en oeuvre plusieurs médias. Un canal est « un ensemble d'organisations interdépendantes participant au processus de mise à disposition des biens et services pour usage et/ou consommation ».

L'analyse des définitions ci-dessus laisse une certaine confusion entre les concepts de canal et media d'une part, et on note une interprétation duale du terme canal de distribution.

1. Le canal de distribution : deux approches complémentaires

La notion de média et celle de canal s'utilisent confusément (Benavent34(*) et Gardes, 2009). En effet si un canal de distribution, en servant un ensemble de produits à un groupe bien déterminé de clientèle, peut être considéré comme unité cohérente d'un point de vue organisationnel, la notion de média s'attache, quant à elle au moyen technologique qui permet de transmettre un message ou une information. Les configurations peuvent dès lors être multiples et si pour une entreprise un média peut correspondre à un canal, pour une autre, il peut en participer (Benavent et Gardes ; Op. Cit.). Ce phénomène est fréquent dans le milieu bancaire. Par exemple, la messagerie électronique peut être un substitut au courrier traditionnel dans l'envoi des relevés de comptes. Le courrier et le message électronique sont d'un point de vue technique des médias différents, ils le sont aussi du point de vue de l'usage, leur conservation ou leur valeur juridique n'étant pas identiques. Cependant ils participent à un même canal, le canal à distance, dans lesquels ils peuvent être utilisés de manière complémentaire au canal principal qui serait l'agence bancaire. Un canal peut donc être considéré une combinaison de média. Cette définition a néanmoins une limite en ce sens que cette combinaison de média doit correspondre à une unité organisationnelle et décisionnelle qui associe les finalités commerciales de la banque à un groupe de consommateur et une fonction pour le client, définissant ainsi une certaine modalité de la relation bancaire. La littérature fait ressortir deux approches du canal de distribution.

i. Perspective verticale du canal de distribution

Un canal de distribution s'organise autour de plusieurs membres qui la composent (Plé, Op. Cit). Par membre, on entend toutes les organisations ou entreprises, incluses dans la chaîne partant du producteur jusqu'au client final, utilisateur du bien ou service. Le canal est ainsi composé non seulement du producteur, mais aussi et surtout de tous les intermédiaires qui le séparent du consommateur final. On conçoit dans cette configuration le canal de distribution comme un système, un ensemble d'entités autour desquelles il est organisé. On se situe ici dans une perspective verticale du canal de distribution ; le niveau d'analyse étant, dans cette perspective, presque exclusivement inter organisationnel (sauf dans le cas où l'entreprise est verticalement intégrée).

Figure 1.1 : La conception verticale du canal de distribution

PRODUCTEUR

GROUPE DE GROSSISTE

GROSSISTE

DETAILLANT

CONSOMMATEUR

D'après la figure de Loïc PLE (2006, page 19).

* 25ROWE F. (1994), « Des banques et des réseaux : Productivité et avantages concurrentiels », Economica, Paris.

* 26ACCENTURE (2016), « La banque en 2016 : accélérer la croissance et optimiser les coûts de distribution et de marketing ».

* 27BADOC M. et E. TROUILLAUD (2013), Le marketing bancaire et de l'assurance, Revue banque, les essentiels de la banque et de la finance, 1ère édition, Paris.

* 28 LAMARQUE, E. (1999), « Les activités clés des métiers bancaires : une analyse par la chaîne de valeur ». Finance Contrôle Stratégie, Vol 2, N° 2, Pp. 135-160.

* 29Expression utilisée par plusieurs auteurs anglo saxons notamment Coelho (2003), Anderson (2001), Nicholson et al. (2002). Plé L. (2006, P. 22) fait une présentation chronologique des définitions du multicanal dans sa thèse de Doctorat.

* 30 JALLAIS J, (1997), « Canaux de distribution », in Simon, Y., Joffre P., Encyclopédie de Gestion, Economica, 2ème Edition, Paris.

* 31 FILSER M. (2000), « Les théories du canal de distribution : le dualisme des paradigmes », in Paché, G., Colin, J., Fabbe-Costes, N., Faire de la recherche en logistique et distribution ? Paris, Vuibert, Pp. 55-89.

* 32 LENDREVIE J. et J. LEVY (2013), « Mercator », Dalloz, 7e édition, Paris.

* 33NOVEO Conseil (2009), « L'approche multicanal des banques françaises : Evolutions et perspectives ».

* 34BENAVENT C. et N. GARDES (2009), « Stratégies de canal de distribution bancaire : La logique des affaires », ASAC.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote