Evaluation de la stratégie multicanal d'une banque de détail: le cas de la SCB Camerounpar Didier TIOMELA Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2014 |
2. PROBLEMATIQUELe métier de banquier a fortement évolué ces dernières années. L'agence bancaire, auparavant élément central de la relation bancaire et de la distribution des produits, est devenue un maillon d'une organisation plus complexe intégrant d'autres canaux de communication et de distribution (Internet, centre d'appel, serveurs vocaux, etc.). Pour le client avisé, il est devenu impensable que la banque ne mette pas à sa disposition ces outils qui lui sont devenus familiers et quotidiens (Villates, Op. Cit.). La question stratégique est désormais de savoir quel canal offrir à quel profil de client, potentiellement « multicanal ». La réponse serait de parvenir à orchestrer et à harmoniser entre eux ces canaux, afin que chaque client puisse choisir celui qui convient le mieux à sa situation du moment, selon l'heure, le lieu, la circonstance, le besoin. Face au nouveau paradigme de « banque à accès multiple », les banques camerounaises se sont pour la plupart, positionnées sur un métier de distributeur multicanal. Les réseaux d'agence qui constituent des actifs compétitifs majeurs des banques ont été réorganisés avec un élargissement de la gamme des services distribués et un effort substantiel d'investissement dans le nouveau canal de la banque à distance a été réalisé. Cette stratégie multicanal implique un système de pilotage bancaire global. La stratégie multicanal a permis le renforcement des bases de données clients ainsi qu'une meilleure connaissance des segments de clientèle grâce à l'ensemble des informations collectées à travers les différents canaux. Si ces éléments sont des préalables nécessaires à la mise en place d'une relation client, ils ne sont pas suffisants car l'utilisation de cette information reste à optimiser. L'analyse du marché bancaire camerounais montre que les banques commerciales se sont alignées pour la quasi-totalité sur une offre proche d'un multicanal indifférencié. Celles-ci proposent plusieurs canaux de distribution à leur clientèle sans définir de préférences à priori. En dépit des efforts mis en place pour singulariser leurs offres respectives, cette stratégie semble peu performante. En effet, selon Stern et al19(*). (1996), les canaux de distribution sont performants lorsqu'ils sont efficaces, efficients et équitables. En d'autres termes, s'ils permettent à la banque de stabiliser voire d'accroitre sa clientèle en répondant à ses attentes, de réduire les coûts tout en donnant à chaque acteur les mêmes chances d'accéder à chaque canal. Cependant, les différents canaux ne respectent pas toujours simultanément ces trois dimensions (Lecat20(*), 2006). En effet, une stratégie multicanal n'est pas dénuée de risques, dont la nature et l'intensité varient selon les entreprises : « les problématiques liées à la distribution multicanal sont de plusieurs ordres et se posent différemment selon que l'entreprise existe ou qu'elle se crée. Il s'agit en effet soit d'un canal de distribution complémentaire, soit d'un canal nouveau. Pour les entreprises existantes, la question de la substitution ou de la complémentarité par rapport aux circuits existants se pose » (Kalika21(*),2000). Ainsi, le risque de « cannibalisation » est grand en ce sens que les nouveaux canaux peuvent détruire la valeur des ressources financières précédemment investies dans les canaux existants et réduire de ce fait la rentabilité de l'entreprise, dans l'hypothèse où les clients se détourneraient massivement des canaux existants au profit des nouveaux canaux (Vanheems22(*),1995). De plus, la qualité de service de chaque canal (virtuel ou physique) doit être homogène de façon à rendre l'expérience multicanal du client satisfaisante. L'émergence de conflits ou l'absence de coordination entre les canaux, constituent autant d'obstacles supplémentaires à la réussite d'une stratégie multicanal (Plé23(*), 2006). Ainsi, il faut éviter la compétition entre les différents canaux mais penser à optimiser leurs complémentarités. Cette optimisation doit tenir compte des causes à l'origine de la contre-performance de ceux-ci dans notre contexte. D'où notre question de recherche : quels sont les facteurs qui expliquent la mauvaise performance de la stratégie multicanal de la SCB Cameroun ? * 19STERN, L. et al. (1996), Marketing Channels, Prentice-Hall, 5th edition, New-Jersey. * 20LECAT, B. (2006), « La performance des canaux de distribution bancaires », Thèse de Doctorat. * 21KALIKA, M. (2000), « L'émergence du e-management », Cahier de recherche CREPA, N° 57, Université Paris Dauphine. * 22VANHEEMS, R. (1995), « Analyse dynamique des transferts de clientèle dans les systèmes de distribution duale ». Thèse de doctorat, Université des Sciences et Technologies de Lille. * 23PLÉ, L. (2006), « La coordination d'un réseau de distribution multicanal : Le cas de la banque de détail », Thèse de Doctorat en Sciences de Gestion, Université Paris Dauphine. |
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