2.1.5. La place de la théorie de l'esprit dans la
compréhension du fonctionnement autistique.
La théorie de l'esprit en anglais Theory of Mind (ToM)
a été développé par Baron-Cohen (1999) qui
décrit le mécanisme d'acquisition de la ToM selon deux
composantes : les états épistémiques
(faire semblant, penser, savoir, croire, imaginer, rêver,
deviner, tromper) d'une part et les états mentaux (le
volitionnel, le perceptif, l'épistémique) d'autre part afin de
faire une explication cohérente des rapports entre états mentaux
et actions. Même si Baron-Cohen se positionne comme étant le
père de la théorie de l'esprit, il est à noter que les
premières hypothèses ont été formulées par
les éthologues à partir de l'observation des chimpanzés.
Dennett (1978) ; Premack et Woodruff (1978) ont formulé une
première définition de la théorie de l'esprit en postulant
l'existence de deux habiletés déterminant dans le comportement
empathique chez les chimpanzés: l'attribution d'états mentaux aux
congénères et la compréhension des liens entre les
états mentaux attribués et le comportement des
congénères. Notons que, dès cette première
définition de la ToM, le lien avec l'adaptation sociale est
incontournable.
Ainsi, certains auteurs envisagent plus spécifiquement
le lien entre la ToM et l'adaptation de l'individu au sein de la
société (Mitchell, 1996). Deneault et Morin (2007)
considèrent pour leur part que la compréhension de
différents états mentaux ou la compréhension des
différentes facettes d'un même état mental permet une
meilleure adaptation aux situations sociales rencontrées. Selon
Tourrette, et al. (2000), la ToM est une étape fondamentale et
nécessaire pour un développement normal des habiletés
sociales.
Les études sur les enfants mettant en relation un
certain nombre de variables avec l'acquisition de ToM ont permis de
répertorier certaines prédispositions qui sont souvent
considérées par certains chercheurs comme les précurseurs
au ToM (Magerotte, 2016). Ces compétences sont entre autres la
qualité de l'attachement (un attachement Secure serait
déterminant pour le ToM chez l'enfant ultérieurement), l'empathie
(qui est la capacité à s'identifier à quelqu'un, ressentir
ses émotions ou partager son expérience). De même, on
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note l'attention conjointe préverbale et conduite de
référenciassions sociales (l'attention conjointe concerne la
capacité à partager avec autrui un événement,
à attirer et à maintenir son attention vers un objet, une
personne, dans le but d'obtenir un regard conjoint, avec conscience du partage
de l'attention ; l'attention conjointe est considérée comme un
prérequis à l'émergence du langage). Enfin, nous avons
l'imitation et l'habileté à faire semblant (c'est le fait de se
référer à l'autre pour prendre connaissance des situations
par exemple, lorsqu'un jeune enfant recourt à l'adulte comme source
d'information avant de s'approcher ou non d'un objet insolite. Elle est
également considérée comme une habileté sociale et
cognitive préalable à l'acquisition d'une ToM).
Figure 1 : Source : Baron Cohen, (1997)
La théorie de l'esprit chez les personnes
autistes
Cohen (1997) reprend les quatre étapes de la
représentation des états mentaux (Mindreading) et voit en quoi
leur fonctionnement diffère chez les personnes autistes.
? Le détecteur d'intention n'est pas mis en cause
dans l'autisme. Cela signifie que les personnes autistes sont capables
d'identifier que les personnes agissent selon des buts et des désirs
simples.
? Le détecteur de direction des yeux n'est pas non
plus mis en cause dans l'autisme, les personnes autistes sont capables
d'identifier sur une photographie si une personne les regarde ou si elle
regarde dans une autre direction.
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? Le mécanisme d'attention partagée semble
par contre être déficient ou moins efficient chez les personnes
autistes : elles ne portent pas attention ou moins attention au regard
d'autrui, elles n'essayent pas ou peu de diriger le regard d'autrui en pointant
un objet, une direction ou une personne.
Ainsi présentés les facteurs étiologiques
explicatifs du TSA, il sera question dans la suite de présenter les
travaux menés sur la prise en charge de l'autisme et les
différentes approches de prise en charge.
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