L aprotection des droits fondamentaux des personnes privées de liberté au Burkina Fasopar Marou KABORE Université Thomas Sankara - Master 2 2021 |
Paragraphe 2 : Le recours aux instruments nationauxA. Le recours constitutionnelB. Le recours à la loi contre la tortureLa seule réparation prévue au plan interne est celle instituée par la loi n°022-2014/AN portant prévention et répression de la torture et des pratiques assimilées le 27 mai 2014495(*). Son article 17 dispose que « la victime a droit à une réparation et à une indemnisation équitable et adéquate, y compris des moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible. En cas de décès de la victime résultant d'un acte de torture ou de pratiques assimilées, les ayants droit de celle-ci ont droit à indemnisation. Nonobstant toutes poursuites pénales, l'État a l'obligation d'accorder réparation aux victimes.»496(*). Cette disposition qui est une mise en oeuvre de l'article 14 de la convention contre la torture497(*) et consacrée dans le code pénal498(*) et le code de procédure pénale499(*). La réparation prévue par ce texte n'est en principe applicable qu'en cas de torture ou de pratiques assimilées. Mais en matière de réparation en cas de détention illégale proprement dite, aucune loi nationale ne prévoit l'indemnisation de la victime. Pourtant ce droit fondamental peut être revendiqué par le mécanisme de l'interprétation. En effet, la revendication du droit à la réparation en cas de détention illégale ou arbitraire sur le fondement de loi contre la torture, pour être reçue suppose de démontrer au préalable que la détention illégale constitue en elle-même un acte de pratique assimilé à la torture. Or, les pratiques assimilées à la torture ont pu être défini comme les actes ou omissions constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas des actes de torture mais qui sont commis par un agent de l'État ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite notamment l'arrestation et la détention arbitraire.500(*). C'est pourquoi la détention arbitraire ou injustifiée a été qualifiée comme étant une pratique assimilée à la torture. Selon la jurisprudence, les détentions illégales constituent des traitements inhumains et dégradants donc relavant certainement des pratiques assimilées à la torture. Par ailleurs, selon PenalReform International, les irrégularités liées à la détention sont assimilables à la torture ou des mauvais traitements501(*). Il ne serait donc pas illégal de recourir à la loi portant prévention et répression de la torture et des pratiques assimilées pour répondre à la question de la réparation des victimes de détention illégale. Au Malawi, ce droit a déjà trouvé application sur le fondement de torture, traitement cruel et inhumain502(*). Par ailleurs, nous estimons que le droit à la réparation pourrait être considéré comme un droit en filigrane comme le droit à l'alimentation et trouver à être revendiqué sur le fondement de l'interdiction de la torture ou traitements assimilés. * 495 V. Décret n°2014-563/PRES du 03 juillet 2014 promulguant la loi n° 022-2014/AN du 27 mai 2014 portant prévention et répression de la torture et des pratiques assimilées. J.O. BF n°36 du 04 septembre 2014. * 496 L'Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement prévoit également une indemnisation à la victime en cas d'omission ou de préjudice subi par un agent de la fonction publique. V. Principe 35. * 497 Art. 14 de la convention CAT du 10 décembre 1984 dispose que «tout État partie garantit, dans son système juridique, à la victime d'un acte de torture, le droit d'obtenir réparation et d'être indemnisée équitablement et de manière adéquate, y compris les moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible. En cas de mort de la victime résultant d'un acte de torture, les ayants cause de celle-ci ont droit à indemnisation. * 498 V. art. 512-7. * 499 V. art. 518-6. * 500 V. art. 2 de la loi n°022-2014/AN du 27 mai 2014 portant prévention et répression de la torture et des pratiques assimilées. * 501 Rapport PenalReform International, Détention provisoire ; lutter contre les facteurs de risque afin de prévenir la torture et les mauvais traitements, 2013, p. 4. * 502 Warren BUFORD « Les réparations en Afrique australe », in Cahiers d'études africaines, 2004/1-2 , n° 173-174, pp.264-322, spéc. p.283. Dans un jugement de 1993, une personne s'est vu accorder par la Cour suprême 4,5 millions de kwachas de dédommagements pour avoir été détenu illégalement pendant 27 ans. |
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