L aprotection des droits fondamentaux des personnes privées de liberté au Burkina Fasopar Marou KABORE Université Thomas Sankara - Master 2 2021 |
Titre 2 : Une protection insuffisante des garanties procéduralesPar garanties procédurales, on entend les voies de recours et les procédures utilisées pour assurer la protection des droits fondamentaux356(*). Les garanties procédurales sont un ensemble de principes à respecter pour assurer le respect des règles de procédure et les droits fondamentaux dans un État de droit.Les garanties procédurales regroupent les normes applicables pour assurer l'équité du processus judiciaire357(*). .Cependant, plus d'un demi-siècle après la charte internationale des droits de l'homme, notre société se trouve toujours confrontée au défi d'une protection adéquate des droits de l'homme358(*) plus particulièrement des droits des détenus. Au Burkina Faso, les droits fondamentaux des P.P.L. même si quelques-uns sont reconnu dans les textes nationaux, ces droits peinent à trouver une application concrète à l'égard des personnes privées détenues notamment en ce qui concerne les garanties de procédure. En dépits des efforts réalisés dans la production législative sur la protection des droits des fondamentaux des PPL, force est de constater un déphasage important entre existence des textes et leur exercice effectif. La plupart des conventions et lois telles que ratifiées et énoncées, ne reçoivent cependant pas de matérialisation ou d'application concrète. Or, en matière de privation de liberté, le délinquant doit posséder non seulement tous les droits de l'homme libre, hormis ceux dont il doit être privé « pour la protection de la société »359(*) et acquiert même de nouveaux droits à l'encontre de l'État qui l'emprisonne360(*). Chapitre 1 : L'inobservation des garanties procédurales avant jugementUn système de protection des droits de l'homme n'est crédible que s'il offre aux individus des garanties efficaces pour la défense de leurs droits361(*). L'accès à la justice est un droit fondamental consacré par divers instruments juridiques nationaux et internationaux. Il faut donc assurer aux détenus une aide juridique adéquate362(*). Ainsi, la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948 qui se présente dans son domaine comme l'idéal à atteindre par les Peuples et les Nations, prévoit à son article 8 que : « toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi ». Plus loin, son article 10 souligne que : « toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ». Section 1 : Une protection inadéquate des garanties procéduralesL'analyse du cadre juridique national laisse entrevoir une faible application des textes due entre autres à la non internalisation de certains engagements internationaux, l'inadéquation du contenu de certains textes due à une insuffisance de coordination et de collaboration dans l'élaboration et la relecture des textes, la multiplication de textes législatifs et réglementaires sans textes d'application, la méconnaissance des textes due à l'absence de publication de ceux-ci et à l'analphabétisme de la population, le faible recours aux services de la justice dû aux pesanteurs socio-culturelles, l'incivisme, l'obsolescence de certains textes et accords collectifs de travail363(*). Le secteur de la justice et plus particulièrement le ministère des droits humains fait face à de sérieuses difficultés. Il s'agit entre autres des dysfonctionnements en moyen humain364(*), matériels365(*) et l'inadaptation des textes. L'inadéquation des textes juridiques (paragraphe 1) n'est pas le seul fondement qui explique le défaut de protection des droits fondamentaux des P.P.L. La surpopulation carcérale (paragraphe 2) est en une autre cause logique qui justifie l'inadaptation de la protection des droits fondamentaux des P.P.L. * 356Yakouba OUEDRAOGO, « Les paradoxes de la protection des droits de l'homme dans les organisations africaines d'interprétation régionale. », R.B.D. 2018, n °55-spécial 2018, pp. 143-165, spéc. p. 159. * 357NATIONS UNIES, RDC, Rapport du projet Mapping concernant les violations graves des droits de l'homme et de droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la RDC, Août 2010, p. 403. * 358 Gilles LEBRETON (dir.), L'évolution des droits fondamentaux de la personne humaine en 1997 et 1998, éd. harmattan, Paris, 2000, p.183. * 359 P. Cornil, « Les problèmes de droit pénal appliqué et les nouvelles tendances en la matière », Revue de droit pénal et de criminologie, 1951 , p. 494. Il s'agit précisément de la liberté d'aller et venir. * 360Jean-Manuel LARRALDE, « Les droits des personnes incarcérées : entre punition et réhabilitation », Université de Caen Basse-Normandie, CRDF, n°2, 2003, p.63-76, spéc. p. 65. * 361 Fréderic. SUDRE, op. cit. p. 15. * 362 Pierre LANDREVILLE, op.cit. p.111. * 363MJDHPC, Décret n°2018-0408/PRES/MJDHPC/MSECU/MFPTPS/MINEFID du 16 mai 2018 portant adoption de la Politique sectorielle « justice et droits humains » 2018-2027, Burkina Faso, p.24. * 364 Pour certains auteurs, les droits fondamentaux de la personne privée de liberté peuvent être gravement compromis dans les intérêts purement politiques de l'exécutif. En effet, en pratique, nommés aux postes qu'ils occupent en dernière analyse par l'exécutif, cette indépendance vis-à-vis de l'Exécutif est bien souvent controversée. Ainsi, les magistrats du parquet sont subordonnés au contrôle disciplinaire du ministère de la justice et reçoivent des instructions de leur hiérarchie. * 365Zakalia KOTE, Plan National de la justice 2010-2019, Journal Officiel 2010, p. 6327. |
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