L aprotection des droits fondamentaux des personnes privées de liberté au Burkina Fasopar Marou KABORE Université Thomas Sankara - Master 2 2021 |
B. Le droit à la réinsertion négligé, une cause de récidiveL'omission de la réinsertion sociale est une cause de la récidive259(*) et donc du surpeuplement carcéral. Lorsque le droit à la réinsertion est négligé, s'en suit la récidive et la population carcérale ne cesse d'augmenter considérablement. Pour Jean PRADEL, la prison est une « école de la récidive »260(*) donc une cause de la surpopulation carcérale, où on apprend à voler, cambrioler, rejoindre les filières de trafic de drogue, au contact d'individus plus pervertis. La réinsertion est le meilleur moyen pour éviter la récidive et de façon globale l'inflation carcérale261(*). Ainsi pour Olivier MONGIN, « à trop croire que la prison est la réponse aux problèmes de sécurité ou qu'elle incarne à elle seule la capacité de punir, on renonce à mettre en relation volonté de punition et soucis de réintégration sociale »262(*). Pour Michel FOUCAULT, l'humanisation de la prison risque d'être un leurre quand la volonté de l'emprisonnement prime263(*). L'objectif recherché par l'emprisonnement ne serait pas atteint si l'individu pendant toute la durée de la détention n'est pas préparé pour sa réadaptation sociale. C'est pourquoi un auteur a affirmé que « la mission première de l'institution carcérale est, pour la population, avant tout la maîtrise des personnes détenues »264(*). Ainsi, la prison doit tout faire pour rendre dans les meilleures conditions possibles le détenu à la société, et non le désocialiser en ne lui infligeant qu'une peine dure et afflictive265(*). Pour ce faire, lorsqu'une personne est incarcérée, l'on devrait prendre des méthodes éprouvées pour favoriser sa réinsertion sociale, non seulement pendant la durée de la peine, mais aussi à plus long terme afin d'éviter la récidive. Ainsi, deux principes fondamentaux nécessaires à la réinsertion ont été cependant délaissés qui, pourtant sont des vecteurs clés d'une réinsertion réussie et une barrière à l'inflation carcérale. Il s'agit de la promotion du travail ou de l'emploi et le de suivi. Il est communément admis le travail en prison est moyen de réinsertion sociale et une source de réduction de la récidive266(*). En effet, lorsque le risque d'une nouvelle incarcération est évité, le risque de surpopulation carcérale diminue parce que la récidive est une cause de la surpopulation carcérale. Ainsi, la plupart des détenus réitèrent le discours qui tend à établir un lien inexorable de causalité entre non-emploi et récidive267(*). L'emploi est la seule possibilité d'obtenir des ressources sans prendre le risque d'une nouvelle incarcération car les problèmes financiers à la sortie de prison sont souvent présentés comme une cause principale de récidive268(*). Or dans la plupart des établissements pénitentiaires, la promotion des activités professionnelles n'est pas au coeur de la préoccupation de l'État. Les établissements pénitentiaires canalisent plus la recherche de la sécurité que la réinsertion « parce que l'administration pénitentiaire a pour première mission l'exécution des décisions d'emprisonnement prises par les juridictions, et donc la sécurité de ses établissements ne saurait souffrir d'aucune défaillance...»269(*). Le manque de suivi en est également une autre car préparer la sortie de prison signifie « être bien suivi »270(*). * 259 Jean PRADEL, Principes de droit criminel, I-Droit pénal Général, éd. Cujas, 1999, Paris, p.237. * 260 Jean PRADEL, Droit pénal général, op. cit. p.618. * 261Pierre LALANDE, La réinsertion sociale des personnes contrevenante : une sécurité durable, Ministère de la sécurité publique, Québec, 2010, p. 5. * 262 MONGIN Olivier, « Prisons à la dérive », Revue Esprit, n°215, oct. 1995, p.103. * 263Michel FOUCAULT * 264 Martine HERZOG-EVANS, La gestion du comportement du détenu, Essai de droit pénitentiaire, éd. L'Harmattan, coll. Logiques juridiques, 1998, p.19. * 265Jean-Manuel LARRALDE, op. cit. p. 64 et ss. * 266Walid NAKARA et Maryline BOURDIL, « Entrepreneuriat et prison : une étude exploratoire sur la création d'entreprise par des anciens détenus », in Revue de l'entreprenariat, n°2, vol. 15, 2016, pp. 109-139. Spéc. p. 110. Cf. https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat1-2016-2-page-109.htm, consulté le 27 mars 2021 à 12h: 23. * 267Sara LIWERANT, « La sortie de prison des jeunes majeurs : quel lien dedans/dehors ? », éd. A. Pédone, Archives de politique criminelle, n° 23, 2001, p.93-105, spéc. p. 95. cf https://www.cairn.info/revue-archives-de-politique-criminelle-2001-1-page-93.htm, consulté le 25 mars 2021, à 15h : 57. * 268Ibid. * 269Jean-Manuel LARRALDE, « Les droits des personnes incarcérées : entre punition et réhabilitation », Université de Caen Basse-Normandie, CRDF, n°2, 2003, p.63-76, spéc. p. 70. * 270Sara LIWERANT, op.cit. p. 97. |
|