L aprotection des droits fondamentaux des personnes privées de liberté au Burkina Fasopar Marou KABORE Université Thomas Sankara - Master 2 2021 |
B. La protection des détenus en situation de vulnérabilité subjectiveL'ensemble des règles minima pour le traitement des détenus énonce à la Règle 5.2 que « les administrations pénitentiaires doivent apporter tous les aménagements et les ajustements raisonnables pour faire en sorte que les détenus souffrant d'une incapacité physique, mentale ou autre aient un accès entier et effectif à la vie carcérale de façon équitable. »
Dans l'affaire D.G. c. Pologne181(*)la Cour E.D.H. a conclu à la violation de l'article 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention en ce qui concerne les conditions matérielles de détention du requérant, eu égard à ses besoins particuliers. En effet, paraplégique en fauteuil et souffrant d'un certain nombre de problèmes de santé, le requérant se plaignait que, pendant sa détention, les soins qui lui furent apportés et ses conditions de détention avaient été incompatibles avec ses besoins médicaux. En particulier, il alléguait que les établissements pénitentiaires n'avaient pas été adaptés à l'utilisation d'un fauteuil roulant, ce qui lui aurait posé des problèmes pour accéder aux toilettes, et qu'on ne lui avait pas fourni suffisamment de couches pour incontinence. Aussi, Les détenus souffrant de graves handicaps physiques et ceux d'âge avancé devraient être hébergés de manière à permettre une vie aussi normale que possible et ne devraient pas être séparés de la population carcérale générale. Des modifications structurelles doivent être effectuées pour aider les personnes en fauteuil roulant et handicapées sur des lignes similaires à celles de l'environnement extérieur. ... »182(*). En outre, lorsque les autorités décident de placer et de maintenir une personne handicapée en détention, elles devraient faire preuve d'une attention particulière pour garantir des conditions correspondant aux besoins particuliers résultant de son handicap183(*). Plusieurs fois la Cour E.D.H. a condamné les États de n'avoir pas pris suffisamment de moyens pour une protection particulière des personnes vivant avec un handicap184(*). Cependant il convient de noter qu'un détenu même amputé de ses deux avant-bras, certes plus vulnérable face aux difficultés de la détention, ne peut invoquer un traitement inhumain et dégradant à son encontre, si l'administration pénitentiaire a mis en place les moyens nécessaires permettant au détenu de jouir de leurs droits185(*). Ainsi, la détention d'une personne malade dans des conditions matérielles et médicales inappropriées peut en principe constituer une violation à ce principe186(*). Nations Unies, Principes pour la protection des personnes atteintes de maladie mentale et pour l'amélioration des soins de santé, 1991 * 181 Cour E.D.H., 12 février 2013, D.G. c. Pologne, req.n° 45705/07. * 182 Cour E.D.H., 4e Section, Grimailovs c. Lettonie req. 6087/03 25 septembre 2013, §81. * 183Ibid. §151. * 184 V. aussi Èuprakovs c. Lettonie, req. 8543/04, 18 décembre 2012 ; Turzynski c. Pologne, req. 61254/09, 17 avril 2012 et Todorov c. Bulgarie, req. 8321/11, 12 février 2013. * 185 Cour E.D.H., 6 mars 2013, Zarzycki c. Pologne. La Cour a conclu à la non-violation de l'article 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention. Elle a noté en particulier l'attitude proactive de l'administration pénitentiaire à l'égard du requérant (celui-ci pouvait notamment disposer gratuitement de prothèses mécaniques basiques, et avait également droit au remboursement d'une petite partie du coût des prothèses biomécaniques). Les autorités avaient donc fourni au requérant l'assistance courante et adéquate qu'exigeaient ses besoins spécifiques et rien n'indiquait l'existence d'une véritable intention d'humilier ou de rabaisser l'intéressé. Par conséquent, même si un détenu amputé des deux avant-bras est bien plus vulnérable face aux difficultés de la détention, le traitement dont le requérant avait fait l'objet en l'espèce n'avait pas atteint le seuil de gravité requis pour constituer un traitement dégradant contraire à l'article 3 de la Convention. * 186Cour EDH, GülayÇetin c. Turquie, req. n° 44084/10, 5 mars 2013, § 101. |
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