A - Le contrôleur salarié
Les salariés participent au déroulement des
procédures de traitement des crises économiques (redressement
judiciaire et liquidation des biens) de l'entreprise à travers leurs
représentants que sont les contrôleurs. Ces contrôleurs sont
des organes non judiciaires à part entière de la
procédure. D'après l'article 48 de l'AUPCAP, « À
toute époque de la procédure de redressement judiciaire ou de
liquidation des biens, un (01) à cinq (05) contrôleurs peuvent
être désignés par le juge commissaire parmi les
créanciers non-salariés. (...). Lorsque le nombre de
salariés est supérieur à dix (10) au cours des six (06)
mois précédent la saisine de la juridiction compétente, le
syndic invite le comité d'entreprise ou, à défaut, les
délégués du personnel, à désigner un
salarié en qualité de contrôleur, dans un délai de
vingt (20) jours à compter de la décision d'ouverture
». La participation des salariés est donc actée par le
contrôleur-salarié. Il s'agit là d'une innovation par
rapport à l'AUPCAP de 1999 qui ne prévoyait pas la place d'un
salarié lambda comme contrôleur, et ceci dans le même esprit
que le code de commerce français157. Ce dernier n'excluait
pas qu'un salarié soit contrôleur mais à la condition qu'il
soit un créancier. « À la faveur de la réforme,
les salariés ont bénéficié de l'autonomisation de
leur statut de contrôleur. Ils ne sont plus
désignés contrôleurs en raison de leurs créances
mais en raison de leur qualité de salariés
»158.
Le contrôleur-salarié est un salarié
désigné au sein de l'entreprise atteignant le seuil
susmentionné par les institutions de représentation du personnel
s'il y'en a, ou élu par les collègues dans le cas contraire. La
personne ainsi désignée ou élue, est nommée en
cette qualité par le juge-commissaire. Quand l'entreprise n'atteint pas
le seuil exigé, le juge-commissaire est appelé à
désigner un de façon discrétionnaire. Aucune
précision n'est faite
157 Article L. 621-10 du C.ce. Français.
158 KOUAMO (D. R.), op. cit., p. 240.
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sur les conditions de ce salarié si ce n'est qu'il ne
doit avoir aucun lien de parenté ou d'alliance avec les dirigeants de la
société jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni
détenir directement ou indirectement tout ou partie du capital ou des
droits de vote de la société commerciale. Il ne peut en avoir
qu'un seul dans l'entreprise.
Le contrôleur salarié permet de faire entendre la
voix des salariés dans le déroulement des procédures. Il a
une double mission159. D'une part, il a une mission de
défense des intérêts des créanciers. Le fait que les
syndics représentent presque tous les intérêts en jeu,
justifie que l'on crée des contrôleurs chargés
spécialement de la défense des intérêts des
personnes qu'ils représentent ; le contrôleur salarié
veille donc à la protection des intérêts des
salariés160. Dans ce sens, il peut dans
l'intérêt des salariés, demander la conclusion d'un contrat
de location gérance en vue de la continuation des activités ou
plutôt sa résiliation161.
D'autre part, le contrôleur salarié a une mission
d'assistance du syndic dans ses fonctions et le juge commissaire dans sa
surveillance du déroulement de la procédure. En fait, le
contrôleur salarié facilite la tâche du juge commissaire en
exerçant un contrôle sur l'activité du ou des syndics.
À cette fin, il exerce plusieurs prérogatives qui varient selon
le type de procédure. C'est ainsi que dans le redressement judiciaire,
il a le droit de demander au syndic des comptes sur l'état de la
procédure, des actes accomplis par ce dernier ainsi que des recettes et
versements faits162. Si le syndic refuse son assistance pour
accomplir des actes d'administration ou de disposition, le contrôleur
peut l'y contraindre par une décision du juge commissaire163.
Il peut même demander sa révocation auprès du juge
commissaire164 : de telles prérogatives peuvent-être
« de nature à obliger le syndic à effectuer une gestion
saine de l'entreprise en difficulté »165.
Dans la liquidation des biens, ce contrôleur a comme
tous les contrôleurs, un véritable droit d'information qui lui
permet d'être obligatoirement consulté à l'occasion de la
réalisation des biens du débiteur. Il assiste également
à la vérification des créances produites dans la
masse166. Il est obligatoirement informé chaque trimestre de
la part du syndic de l'état de la liquidation des
biens167.
159 Article 49 de l'AUPCAP.
160 KALIEU ELONGO (Y. R.), « Les organes des
procédures collectives », in Encyclopédie du droit
OHADA, Paris, Lamy, 2011, p. 1312.
161 Article 115 et 116 de l'AUPCAP.
162 Article 49 al.2 de l'AUPCAP.
163 Article 52 de l'AUPCAP.
164 Article 42 de l'AUPCAP.
165 YANPELDA (V.), précité, p. 39.
166 Article 84 de l'AUPCAP.
167 Article 169 de l'AUPCAP.
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À travers toutes les prérogatives qui
précèdent, il apparait que le contrôleur salarié
concoure au bon déroulement des procédures de traitement des
difficultés de la société et à la
préservation de l'intérêt des salariés qu'il
représente168. Cette participation est accompagnée des
concessions qu'accordent les salariés en vue de la résolution de
la crise.
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