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La participation des salariés en droit des sociétés commerciales


par Dilane Gildas DJIOKENG FEUJIO
Université de Dschang - Master 2 2019
  

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B - Les comités d'entreprises justifiés par leur pertinence

Institués en France par l'ordonnance du 22 février 1945 et la loi N°46-1065 du 16 mai 1946, les comités d'entreprises sont des institutions collectives de représentation des salariés au sein de l'entreprise. Leur consécration en droit OHADA serait judicieuse car ils permettent mieux que les mécanismes existants à savoir le cumul d'emploi et le délégué du personnel, une meilleure implication des salariés dans la gestion ordinaire de l'entreprise. Certainement que la réticence des législateurs de l'OHADA et de quelques pays qui ne l'ont pas encore consacré tel que le Cameroun peut s'expliquer par le contexte de pauvreté, le désir de développement économique, d'attractivité des investisseurs dont on craint la réaction s'ils voient leur patronat affaiblit par celui des salariés. Cependant, cette justification peut s'avérer inexacte ou mal fondée car, la France du général de Gaulle après la libération, a imaginé ce mécanisme dans ses réformes structurelles afin de booster les performances et le rendement des entreprises et remédier de ce fait à la situation économique catastrophique de cette époque123. Au regard du succès que ce fût, on peut dire qu'ils ne sont pas des moyens d'affaiblissement du patronat. En outre, le choix des délégués du personnel au détriment des comités d'entreprises s'explique difficilement compte tenu du fait que les deux institutions sont consacrées à la même époque124. Il aurait été judicieux de tenter les deux expériences.

Loin de vouloir pousser le législateur à un mimétisme qu'on lui a souvent reproché, l'objectif de cette proposition est d'affirmer l'importance d'un modèle de représentation très pertinent au regard de sa composition mixte, qui fait intervenir différents acteurs sociaux (chef d'entreprise, représentants élus des salariés, représentants syndicaux : ce qui favorise les concertations entre le dirigeant et les salariés), mais plus particulièrement au regard de son rôle.

122 Ibid, p. 173.

123 LE CROM (J. P.), « La naissance des comités d'entreprise : une révolution par la loi ? », Travail et Emploi, n°63, p. 59.

124 Le délégué du personnel est consacré en France d'abord sous l'appellation de délégué d'ouvriers par la loi du 24 juin 1936 puis sous la forme actuelle par la loi du 16 avril 1946.

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Le comité d'entreprise a une composition mixte qui regroupe à la fois des membres du directoire, des représentants du personnel, des représentants syndicaux et parfois bien d'autres. C'est le cas en France, où il est présidé par le chef d'entreprise. Au Gabon, il inclut aussi des représentants des actionnaires désignés par l'assemblée générale. Cette diversité de membres, permet de faciliter le dialogue social et donne au comité une meilleure efficacité.

Le rôle du comité d'entreprise découle de ses attributs économiques125 et socio-culturels126. D'une part, il est un organe de concertation et de contrôle de la gestion car il est chargé de suivre l'évolution de l'entreprise grâce aux informations qui lui sont fournies127 et d'agir sur les décisions du directoire en émettant des avis. En France, la loi du 1er mars 1984 sur la prévention des difficultés des entreprises a considérablement renforcé ses pouvoirs et en a fait un organe de contrôle de la gestion en lui octroyant un droit d'alerte128 aussi important que celui des associés, le droit de demander la récusation du commissaire aux comptes129, le recours à l'expertise de gestion130. La loi de 2001 sur les nouvelles régulations économiques est venue par la suite ainsi que plusieurs autres renforcer davantage ce pouvoir des comités d'entreprises en lui octroyant de prérogatives de plus en plus importantes131. Ces comités participent d'ailleurs obligatoirement aux conseils d'administrations des sociétés anonymes avec voies consultatives132.

Cependant, il ne s'agit par d'un organe de contrôle ordinaire car il n'a pas un pouvoir de contrainte si ce n'est qu'une simple influence sur la décision avant qu'elle ne soit prise. Par mesure de prudence, et afin qu'il ne constitue une menace pour l'autorité du chef d'entreprise, l'on ne lui a confié qu'un droit de consultation dont l'avis issu ne lie pas l'employeur puisqu'il ne s'agit pas là d'une cogestion133. Dans le domaine économique, le comité d'entreprise n'est pas un organe de décision, car le dirigeant ayant aux yeux du monde la responsabilité de l'affaire qu'il dirige, il est important de lui laisser une autorité

125 Article L. 2323-1 et suivants du Code de travail français, annoté par TEYSSIÉ (B.), 32ème édition, LexisNexis, 2017 ; URBAN (Q.), « Comité d'entreprises (Rôle et attributions en matière économique) », Répertoire du droit du travail, janvier 2014 ; infra, Chapitre 2, Section 2, §1, A : La consécration nécessaire d'un véritable droit à l'information des salariés.

126 Article L. 2323-83 et suivants, du code du travail précité ; ORTSCHEIDT (P.), « Comité d'entreprise (Activités sociales et culturelles) », Répertoire du droit du travail, Janvier 2013.

127 Articles L. 2323-2 à L. 2323-45 ; art. L. 2323-55 du C.trav. Français

128 Article L. 2323-78 à 82 du C.trav., français.

129 Article L. 225-230 du C.ce., français.

130 Article L. 225-231 du C.ce., français.

131 MERLE (P.), op.cit., pp. 666-667.

132 Article L. 2323-62 à L. 2323-66 du C.trav. Français.

133 « Il faut (...) se garder d'utiliser le qualificatif de cogestion, qui impliquerait une participation active aux décisions de l'employeur. Le comité d'entreprise ne dispose pas non plus d'un pouvoir de négociation (...) », URBAN (Q.), précité, p. 5.

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correspondante à cette responsabilité134. C'est d'ailleurs pourquoi il est consacré en Mauritanie comme un organe consultatif d'entreprise et au Gabon comme un organe de concertation.

D'autre part, le comité d'entreprise a pour rôle de représenter les salariés et d'exprimer leur intérêt dans la gestion en ce sens que son objet est « d'assurer une expression collective des salariés, permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière, à l'organisation du travail et aux techniques de production »135. Il devient ainsi un instrument incontournable de la démocratie d'entreprise, un acteur important du droit des sociétés commerciales136

134 LE CROM (J. P.), op. cit., p. 47.

135 Ancien article L. 2323-1 du Code de travail français, cité par FRANCONI (V.), L'actualité des attributions du comité d'entreprises en matière économique, thèse, université Lumière Lyon 2, 15 novembre 2010, p. 14.

136 TAQUET (F.), L'amélioration des conditions d'informations des comités d'entreprises, JCP E, 2001, p. 1205, cité par MERLE (P.), op. cit., p. 667.

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