Conclusion
La Francophonie déclare viser la promotion et la
défense de valeurs fondamentales inhérentes aux êtres
humains et à leurs droits, sans considération de leur origine ou
leur première langue tant que les échanges entre
représentants de cultures diverses peuvent s'effectuer à travers
la pratique de la langue française. Les initiatives de l'OIF ne furent
pas toujours observées et commentées de la même
manière par chacun, la francophones ne se rejoignant pas toujours sur un
consensus identitaire ou définitoire, ce qui nous permettrait de nous
questionner à savoir : est-il possible d'avoir une identité
à la fois fondamentalement plurielle et constituée d'un noyau
commun pour être reconnue et partagée par tous ?
Le débat est compliqué par le fait que la
francophonie a la France pour capitale (quand ce n'est pas réduit
à la seule ville de Paris), alors que l'histoire montre à elle
toute seule qu'il n'y a plus un seul français, mais plusieurs
variétés de langues françaises, que ces
variétés ne sont seulement parlées en France, qu'elles
disposent elles aussi de statuts de norme, et que les Français
eux-mêmes ne valorisent pas tous la pluriculturalité, le
plurilinguisme. On revient toujours à la question de la langue de la
France comme langue de suprématie telle qu'elle est décrite par
Leperlier (2010) et nous préférerons son point de vue analytique
sur ce qui motive les Français à considérer la
Francophonie comme ayant un effet centripète plutôt que sur des
analyses déconstruisant ce que l'OIF se force à élaborer
de manière honorable pour ce qu'on en voit de l'extérieur.
Quoiqu'il en soit, les débats tentant de déterminer une
identité francophone ne sont pas prêts de prendre fin pour la
raison que le fantôme de la colonisation plane encore au-dessus des
consciences, qu'elle est loin d'être affaire close et que dans ce
contexte précis, il est difficile d'admettre la francophonie de peuples
qui n'auront pas vus les Français d'aussi près ou pas aussi
majoritairement. Si l'on considère les objectifs que se fixe l'OIF
à savoir la cohésion entre les peuples, on admettra qu'elle peut
desservir l'Albanie dans son accès à la démocratie et
à l'élaboration d'un partage et d'un dialogue entre cultures.
L'Albanie pays uniculturel ? Cette question a
été abordée en deuxième partie et il a
été remarqué que le grand attachement des Albanais
à leurs valeurs et à leurs traditions rend ce peuple très
volontaire quant à la défense et la valorisation de son
patrimoine maternel (combien de peuples d'Europe peuvent encore se targuer
d'avoir réussi à transmettre les chants, les danses et les textes
propres à la culture ancienne du pays concerné aux
générations plus jeunes) ; cependant les différentes
vagues de colonisation du territoire auront modelé ce peuple et sa
capacité à regarder vers l'extérieur.
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Quelle forme la diffusion du français doit-elle prendre
? Chaudenson nous propose que la mondialisation des images est dangereuse, ce
qui explique d'après lui cette fuite vers l'anglais, car la lecture de
la culture anglophone et majoritairement américaine à travers les
médias et la musique semble offrir une image unie et identifiable.
L'Albanie dans sa volonté de reconnaissance peut légitimement se
lancer dans une voie qui pourrait lui permettre d'infiltrer cet amalgame
d'individus internationaux qui parviennent à circuler et à
communiquer aux quatre coins du monde, en particulier lorsque l'on observe une
diaspora aussi étendue. Mon avis m'amènerait à me dire que
le français langue internationale, au même titre que l'anglais,
n'est pas engagé sur cette voie, et Porcher le souligne pareillement
(2012 : 10) en même temps qu'il avance un élément : «
qui suarait priver ses enfants, c'est à dire finalement, à les
amputer d'une compétence linguistique aujourd'hui banale ? » C'est
précisément à cet endroit que la francophonie peut
opérer et avancer les valeurs qu'elle dit protéger. Cela dit, ce
n'est pas envisageable sans l'aide des politiques nationales, plus proches des
sociétés concernées, des institutions et à cette
instance charnière, celle des enseignants.
De la même manière que la citation de Porcher
introduisait l'idée d'une transmission des capitaux sociaux et culturels
entre deux générations, nous nous attarder dans la
dernière partie à ce qui permettrait de comprendre l'action des
enseignants et des apprenants albanais vis-à-vis de leur apprentissage
du français. Où les enseignants se situent-ils dans ce
schéma, malgré le fait que l'on déplore que certaines
pratiques n'ayant rien à faire avec l'apprentissage d'une langue soient
aussi facilement observables en contexte scolaire et universitaire ? C'est
l'idée de la prochaine partie qui s'apprête à être
traitée avant de pouvoir réfléchir à une
modélisation des politiques linguistiques et éducatives à
profiler en Albanie, favorisant une réduction de la fracture sociale en
action depuis de nombreuses années.
Chapitre 4 - Pratiques et
représentations didactiques, le français et son
enseignement-apprentissage en Albanie
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« Deviens qui tu es. »
Goethe
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