Conclusion
L'objectif de cette partie était d'apporter un
éclairage macrocontextuel alternant regards diachronique / synchronique
par volonté de concision et d'éclairages particuliers sur un
certain nombre d'événements forts dans l'Histoire de l'Albanie
et
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des Albanais qui ont potentiellement un effet sur la formation
des représentations en cours à propos de l'apprentissage de la
langue maternelle et des langues étrangères. J'ai tenté
dans une première partie de présenter la situation
sociolinguistique des Albanais au regard de leur accès à leur
langue et de la place de celle-ci au sein même de leurs frontières
autant qu'à l'extérieur. Nous retiendrons que le statut de
l'albanais n'est donc pas toujours officiel, très souvent restreint au
domaine de la famille quand l'alphabétisation dans cette langue n'est
pas politiquement admise et que les efforts de reconnaissance de l'Autre
doivent dépasser le seul cercle de la politique et des lois pour
être conclus, quand on prend en compte les vagues de protestation pour
une reconnaissance des minorités albanaises dans les pays voisins.
Dans un second temps, j'aurais amorcé la façon
dont ce peuple a eu accès à son patrimoine de manière
institutionnalisée, mais que cela ne s'est pas produit de manière
à permettre à chacun de se construire individuellement du point
de vue identitaire et culturel. Les travaux de fonds et de forme des dirigeants
de l'époque communiste auront permis de jeter les bases de l'Ecole en
tant qu'institution jusque lors inexistante, mais qui n'a pas su être
réformée jusqu'aujourd'hui où le domaine de
l'éducation et de l'enseignement est clairement pointé du doigt
pour son incapacité à former les jeunes à la
société de demain. La question est encore en plus épineuse
si on considère que l'Albanie se construit simultanément du point
de vue social et institutionnel en même temps qu'elle se prépare
à offrir une image d'elle-même du point de vue international et
européen, au sens de l'institution. L'Albanie a donc une situation
intérieure tendue autant qu'une situation extérieure très
contraignante, en particulier quand les doutes émis à
l'égard de sa stabilité et de son niveau de développement
sont à l'origine du refus de son intégration dans l'UE.
Très sensible à l'image qu'elle donne, cela produit un certain
nombre de failles du point de vue identitaire et culturel dans lesquelles
n'importe quelle réprimande s'engouffre, jusqu'à élever
l'approbation étrangère au rang de « réussite sociale
», dans le conscient collectif (Syziu, 2013, §6). L'Albanie se
développe en même temps qu'elle s'adapte rendant la question de
son évolution plus sensible que la simple notion de progrès,
nécessaire à sa population, étant l'une des plus pauvres
d'Europe.
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Dans la mesure où l'Ecole est une institution qui forme
les citoyens d'une société, on peut se dire que le rôle de
l'Ecole est important et que les valeurs qui doivent y être transmises
soient réfléchies et adaptées aux moyens humains et
matériels mis à disposition des enseignants et des
établissements scolaires et universitaires. C'est d'ailleurs
précisément ici que l'Etat a un rôle à jouer et que
l'on ne peut dépolitiser le rôle de l'Ecole, encore moins de la
langue et de la culture si l'on considère que ces deux objets permettant
la vie en société sont teintés d'idéologie, formant
irrémédiablement la relation d'un individu à son contexte
(Spaëth, 2014).
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