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Le motif du retour au pays natal dans le roman de l'immigration: l'exemple de ces à¢mes chagrines de Leonora Miano et voici venir les rêveurs d'Imbolo Mbue


par Fabrice Lyonel NJIOTOUO NJAKOU
Université de Douala - Master 2 2019
  

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1.2.2 L'immigré : un être déterminé

Demeurer à tout prix, tel est le leitmotiv de Jende Jonga. Il doit tout faire pour devenir citoyen américain, en dépit de ce que cette Amérique lui montre qu'elle n'a pas besoin de lui. Avoir les papiers, c'est-à-dire être en règle du point de vue politico administratif, est le rêve de tout immigré clandestin. Jende ne déroge pas à cette règle. S'il peut compter sur le soutien de son cousin Winston, il peut aussi se vanter de pouvoir compter sur l'appui technique de l'avocat Boubacar qui semble très sûr de lui. D'ailleurs Boubacar n'hésite pas à rassurer Winston sur sa capacité à régulariser la situation de son cousin Jende : « Je vais monter un bon dossier, répondit Boubacar, ses papiers, ton cousin, les aura, Inch'Allah ». (VVR : 34)

Winston également est un immigré. Il est arrivé grâce à la loterie à la green card13. Il n'a donc aucun souci sur le plan administratif. Cela montre entre autres la différence entre deux immigrés lorsqu'ils ont usé des moyens différents pour émigrer, et tend à culpabiliser l'immigré clandestin. L'immigré clandestin est de plus en plus perçu comme un personnage

13 Il n'a pas de souci administratif, ce qui est déjà un atout pour une insertion sociale réussie.

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condamné à la souffrance, à l'errance, à la misère. Ces situations sont toutes perçues chez Thamar, une fois qu'elle se retrouve dans la rue après le décès de son amant. Maxime et Jende, quant à eux, vivent le bonheur pendant un peu plus longtemps. Cependant, le bonheur de l'immigré étant bien souvent éphémère, la réalité a tôt fait de les rattraper. Maxime, faute de pouvoir trouver un emploi digne de ce nom en raison de son inexistence officielle, sera contraint d'user des contours qui ne l'honorent et ne l'avantagent pas. En effet,

Lorsque Maxime avait dû trouver un emploi après ses études, Antoine avait tout de suite accepté de lui venir en aide. Cependant, il avait exigé, étant donné le risque encouru, que la moitié du salaire lui revienne. Maxime avait dû s'y résoudre [...] ce dernier [Antoine] percevait une somme très substantielle tous les mois, sans avoir à lever le petit doigt, persuadé que Maxime souffrait de voir ainsi s'envoler le fruit de son labeur. (CAC : 60)

De nombreux immigrés sont dans une position de faiblesse, et certaines personnes sans état-d `âme n'hésitent à en profiter.

1.2.3 L'immigré : un « objet » d'exploitation

Plusieurs risques d'exploitation planent sur les immigrés clandestins. N'étant pas en règle, ils sont exposés à toutes sortes d'abus et de spoliation. La vérité est que ces actes prospèrent, puisque les victimes que sont les immigrés clandestins ne sauraient demander justice, n'ayant pas d'existence officielle. Fatou Diome dans Le Ventre de l'Atlantique décrivait déjà ce phénomène. Elle y met en scène un personnage, parti du Sénégal pour la terre promise, la France, mais qui se retrouve à travailler au noir et sans salaire.

Les immigrés clandestins vivent le martyre dans leur chair. Ils n'ont pas d'existence officielle dans le pays pour lequel ils sont prêts à tout afin d'être intégrés. Cette situation d'inconfort du point de vue politico-administratif des migrants se répercute sur leur progéniture, leurs conditions de vies, leur épanouissement. Si Jende et son épouse ne baissent pas les bras, gardant à l'esprit qu'un jour « ils réaliseraient leur rêve de devenir américain » (VVR : 291), leur fils Liomi, lui, est à l'abri. Il n'a aucune inquiétude, convaincu qu'il est que l'Amérique lui appartient dans son entièreté. Les propos suivants en témoignent: (VVR : 55)

Liomi avait si bien adopté l'Amérique, presque rien ni personne ne lui manquait de Limbé. Il était heureux d'être à New-York, excité de marcher sur ses trottoirs bonds et bombardés par un vacarme incessant. Il parlait comme un bon Américain et connaissait si bien le base-ball et la capitale de chaque État que quiconque le croisait n'aurait pas pu penser qu'il était l'enfant de migrants [...] clandestins.

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Ces propos montrent combien le petit Liomi à l'inverse de ses parents, se sent chez lui en Amérique. Pourtant la réalité elle, est toute autre. Si la volonté de s'installer définitivement et légalement sur leur terre d'accueil reste l'une des préoccupations majeures de certains immigrés clandestins, cela n'est pas le cas pour ceux qui se sont installés depuis longtemps et qui ont plus ou moins un statut conforme. Ceux-là sont plutôt nourris, lorsqu'ils n'ont pas perdu leur sens de la fratrie, par la volonté de faire venir leurs proches auprès d'eux. Ce cas de figure est perceptible dans VVR à travers le personnage Winston. Quoi qu'il en soit, les préoccupations administratives hantent les immigrés clandestins et débouchent sur l'éveil de conscience chez ces derniers. Passer sa vie à fuir les contrôles de police, à limiter ses déplacements, à travailler au noir parce qu'on ne peut avoir un emploi décent, ou alors prendre conscience de ce que le pays rêvé n'est pas tel qu'on l'a construit et s'assumer ... telles sont les questions qui hantent tout immigré clandestin qui finit par comprendre que son épanouissement total ne réside pas dans ce climat où tout lui est hostile.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery