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Le motif du retour au pays natal dans le roman de l'immigration: l'exemple de ces à¢mes chagrines de Leonora Miano et voici venir les rêveurs d'Imbolo Mbue


par Fabrice Lyonel NJIOTOUO NJAKOU
Université de Douala - Master 2 2019
  

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II.1. Un sentiment d'exaspération

S'il y a une volonté affirmée de la part des immigrés de rompre le lien avec la terre d'accueil, c'est parce que ceux-ci en ont marre de pratiques dont ils sont victimes au quotidien.

II.1.1. La volonté des immigrés de défaire le noeud des abus

Dans Ces âmes chagrines, Valentine et Staff manifestent leur ras-le-bol vis-à-vis de la situation de ce dernier. En effet, Antoine prêtait sa carte à Staff et en tirait d'énormes profits. Fatigué de vivre dans ces conditions, Staff et sa fiancée sont décidés à y mettre un terme. Et la rupture passe par le retour chez soi pour Staff.

Analysant le parcours de l'immigré, Flora Amabiamina nous renseigne que « l'avant dernière étape du parcours des immigrés qui choisissent le retour chez soi, est la prise de conscience d'un autre manque, le pays perdu, la fierté de s'en réclamer » (2017 :210). La situation de Staff confirme cette affirmation. Ce personnage réalise qu'il ne peut plus continuer à vivre dans un espace où il est pratiquement réduit à l'esclavage, condamné à être utilisé par les autres. Plusieurs immigrés se retrouvent régulièrement dans la situation de Moustapha, c'est-à-dire faire appel à des personnes en règle pour pouvoir travailler. S'il est vrai que l'apport de ces personnes peut être perçu comme une aide, la nature de celle-ci reste tout de même à interroger ; car ces personnes les utilisent, se font de l'argent sur leur dos sans le moindre effort. Valentine connait très bien ces pratiques. Le narrateur nous fait savoir que :

Autrefois, elle avait connu un homme vivant uniquement de ce que lui rapportait la location de son titre de séjour à des sans-papiers. C'était facile, puisqu'on prétendait encore que les Noirs se ressemblaient, qu'on ne prenait pas la peine de les regarder, de les connaître en tant que personnes (CAC : 107-108)

Les immigrés victimes de ces pratiques repensent à leur pays d'origine et se demandent s'il n'y a pas mieux pour eux. Le désir du retour qui survient à cet instant résulte d'un véritable sentiment d'exaspération que les coups-bas au quotidien suscitent chez les immigrés.

Si la manifestation de ce sentiment a des allures de rupture avec les personnages de Ces âmes chagrines, l'on observe plutôt une forme de désespoir chez ceux de Voici venir les rêveurs, désespoir quant à la possibilité des lendemains meilleurs. Tout semble s'écrouler. L'avenir est de plus en plus incertain pour Jende. D'abord, « il se trouvait que M. Jones, patron de la société de taxi, n'avait pas de travail pour lui » (VVR: 283) ; sans travail, Jende est conscient de ce que les jours à venir seront très difficiles. Il commence à réaliser que « le

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rêve appartient au monde chimérique et que la réalité est bien plus âpre et moins légère » (Amabiamina, Op.cit. : 207) Cela se confirme à travers la conversation qu'il a avec son épouse un soir :

- Il nous reste encore des économies, dit-elle en posant une main sur ses cuisses

- Et quoi ? [rétorqua-t-il]

- Et quoi ? il ne faut pas trop nous inquiéter, eh ?

- Oui, dit-il en se levant. On s'inquiétera quand tout l'argent sera parti. (VVR : 283)

La réaction de Jende, qui se lève, combinée à ses propos, traduit son désespoir. Il sait que sans travail, sans sources de revenus, leurs économies ne tiendront pas assez longtemps. Leur avenir dans ce pays est plus qu'incertain, les jours à venir n'augurant rien de positif. Toutefois, sa résignation n'est pas immédiate. Il entreprend plusieurs activités dans le but de retrouver leur niveau de vie d'antan. Cela faisait en sorte qu' « il partait avant que Liomi ne soit réveillé et rentrait lorsqu'il était couché » (Ibid.). Le moins que l'on puisse dire c'est que « la chute était dégradante » (Ibid.). Tout cela suscite son courroux et le pousse à envisager le retour dans son pays natal.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway