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Le motif du retour au pays natal dans le roman de l'immigration: l'exemple de ces à¢mes chagrines de Leonora Miano et voici venir les rêveurs d'Imbolo Mbue


par Fabrice Lyonel NJIOTOUO NJAKOU
Université de Douala - Master 2 2019
  

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I.2. La volonté de s'affranchir

Avant son départ pour le pays rêvé, l'immigré voit en celui-ci le lieu de tous les bonheurs. Une fois sur place, par expérience, il devient de plus en plus convaincu qu'il s'était fait une représentation erronée de ce lieu. Il naît donc à ce moment une volonté de revenir sur ses pas. Ce retour qui « n'est pas obligatoirement perçu comme unique solution d'autant qu'il est teinté d'appréhension » (Thioye, 2005 : 49), se perçoit dès lors telle une tentative de s'affranchir sur plusieurs plans, notamment social, personnel et administratif.

I.2.1 Du point de vue social

D'un personnage immigré à un autre, la volonté de retourner au pays natal n'est pas motivée par les mêmes facteurs. Cela renforce l'idée selon laquelle la construction du retour est une quête individuelle. Étant donné que les personnages, même s'ils émigrent parfois en clan, ont des personnalités différentes, il va de soi que leurs réactions face aux épreuves endurées ne sont pas semblables. De ce fait, la perception du retour, elle aussi, ne saurait être identique. Nous l'avons vu plus haut avec Jende et Neni qui sont pourtant mariés et vivent sous le même toit, mais ont des appréhensions antagonistes du retour. Pour certains, ce dernier s'inscrit dans une démarche d'affranchissement. Ils veulent s'affranchir de cette société qui leur a longtemps fait comprendre qu'ils sont des étrangers et qu'ils ne sont pas les bienvenus. Étant donné que la terre natale est un acquis, ces immigrés estiment qu'il serait préférable de renouer avec elle. Par cette occasion, ils s'affranchissent de cette société aux codes rigides. Maxime a compris cela et, une fois que le contrat qu'il s'est fixé en France est rempli, il entreprend de repartir au Mboasu. Il est convaincu que cet espace lui offrira ce que d'aucuns

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tiennent pour un paradis n'a jamais su lui offrir. Le narrateur nous confie que « Sa vie allait radicalement changer et, tout à coup, il se demandait comment il avait tenu [...] il avait travaillé au noir pour s'acquitter de son loyer, Colette, sa logeuse, n'avait voulu voir que sa carte d'étudiant, au moment de l'accueillir chez elle » (CAC : 88). Maxime est ainsi surpris de savoir qu'il a pu s'en sortir dans cette société. Il a été obligé de « travailler au noir », à la merci de ses employeurs. En rentrant au Mboasu, il met un terme à cette vie compliquée. Comment peut-on être heureux si l'on ne peut même pas travailler en bénéficiant de conditions idoines (être reconnu par l'administration pour pouvoir jouir de sa retraite, être affilié pour avoir une sécurité sociale). Il sait qu'il ne sera jamais à l'aise dans cette société. Il y a donc clairement une volonté de s'affranchir qui se dégage de ses propos.

Jende va plus loin en traitant ce pays de « pays de mensonges » (VVR : 369), un véritable cimetière de vérités duquel il faut se libérer. Une conversation entre Jende et son épouse au sujet du retour est très édifiante de ce point de vue :

- On rentre au pays, lui disait-il, et c'est tout.

- « Comment tu peux nous faire ça ? », répondait-elle d'une voix haut perchée.

- « comment tu peux être égoïste à ce point ?», parlait-elle pendant qu'il mangeait. Il repoussait son assiette et éclatait de colère, la blâmant d'avoir cru que l'Amérique était le meilleur pays du monde. Je t'explique, lui disait-il en la prenant de haut, l'Amérique, ce n'est pas ça du tout. C'est un pays pleins de mensonges et des gens qui aiment entendre des mensonges [...] ce pays n'a plus de place pour des gens comme nous. Moi je ne vais pas passer ma vie à espérer devenir soudain heureux par l'opération du Saint-Esprit. Je refuse ça. (Ibid.)

On voit là que Jende oppose deux réalités : la vérité et le mensonge. Il se situe du côté de la vérité, c'est-à-dire de la réalité palpable. Il associe l'Amérique à la tromperie et au marchand d'illusions. Or, les deux réalités sont inconciliables. De ce fait, vouloir y rester en tant qu'homme de vérité est une entreprise risquée. Il faut donc s'affranchir, et cela passe inéluctablement par le retour aux sources.

On remarque tant chez Jende et Maxime que la réalité sociale est dure. Si les deux ne la décrivent pas de la même façon, il reste que tous deux nourrissent une volonté réelle et affirmée de se libérer de cette société, de retourner au pays natal où, selon eux, tout est encore vrai et ils pourront être heureux à tous les niveaux ; car ce n'est pas uniquement sur le plan social qu'ils veulent s'affranchir.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein