B. La responsabilité individuelle en
matière de violations du droit international des
DHO et du DIH
Nombre de violations des droits de l'homme et du droit
international humanitaire peuvent être considérées comme
des crimes par la législation nationale. Lorsque certaines conditions
sont réunies, quelques-unes de ces violations peuvent également
être qualifiées de crimes en droit international, avec des
conséquences juridiques supplémentaires pour les États et
les personnes. À la différence des «simples» violations
des droits de l'homme et du droit international humanitaire, les crimes
internationaux peuvent en particulier donner lieu à des poursuites
à l'échelon non seulement interne mais aussi
international.117
Le génocide, les crimes contre l'humanité et
les crimes de guerre, par exemple, peuvent être jugés par un
Tribunal pénal international ou même le tribunal interne
compétent.
1. Les violations du droit international des DHO et du
DIH considérées comme des crimes internationaux en vertu du droit
pénal international
A ce niveau nous donnerons les définitions des crimes
internationaux (a), et l'étendue de la responsabilité
pénale individuelle (b).
a) Définitions des crimes
internationaux
Certaines violations flagrantes ou inexcusables du droit
international des droits de l'homme et du droit international humanitaire sont
considérées par la communauté internationale comme
présentant une gravité telle qu'elles relèvent du droit
pénal international,118 lequel
113Application de la Convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide
(Bosnie-Herzégovine c.
Serbie-et-Monténégro), Arrêt, C.I.J. Recueil, p.
43.
114 La Cour interaméricaine des droits de l'homme,
c'est un principe du droit international que toute violation d'une obligation
internationale qui crée un préjudice donne naissance à une
obligation d'offrir des réparations adéquates, laquelle est
régi à tous égards par le droit international. Case of
the Rochema Massacre v. Colombia, Judgement of 11 May 2007, Series C, No
163, par. 226
115 Lire à ce sujet le paragraphe 4 de l'article 25 du
Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui dispose
qu'«aucune disposition du présent Statut relative à la
responsabilité pénale des individus n'affecte la
responsabilité des États en droit international».
116 Nations Unies, Op. Cit., pp. 77-78.
117 Ibidem, p. 78
118 Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme
: Le droit pénal international est un ensemble de règles
internationales destinées à proscrire Certains types de conduites
et à mettre en cause la responsabilité pénale des
personnes qui adoptent ces conduites. A. CASSESE, International Criminal
Law, 2nd ed., Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 3.
43
définit une responsabilité pénale
individuelle pour leur perpétration. Cette responsabilité
individuelle est fondamentale pour que les auteurs de violations des droits de
l'homme et du droit international humanitaire aient à en
répondre. Dans une phrase devenue célèbre, le Tribunal
militaire international de Nuremberg a souligné que «ce sont des
hommes, et non des entités abstraites, qui commettent les crimes dont la
répression s'impose, comme sanction du droit international». Depuis
les années 1990, la communauté internationale a redoublé
d'efforts afin de créer des mécanismes appropriés pour
traduire en justice les personnes ayant commis des violations graves du droit
international des droits de l'homme et du droit international
humanitaire.119
La définition la plus complète et la plus
actuelle des crimes internationaux nous est offerte par le Statut de Rome de la
CPI, dont les composantes sont essentiellement des violations du droit
international des DHO et du DIH.120
· Génocide: ce crime s'entend, aux
termes de l'article 6 du Statut de Rome, l'un quelconque des actes
ci-après commis dans l'intention de détruire, en tout ou en
partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:
a) Meurtre de membres du groupe ;
b) Atteinte grave à l'intégrité physique
ou mentale de membres du groupe ;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des
conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique total ou
partielle ;
d) mesures visant à entraver les naissances au sein du
groupe ;
e) transfert forcé d'enfants du groupe à un
autre groupe ;
· Crimes de guerre : on entend par ces crimes
(article 8 du Statut) :
a) les infractions graves aux Conventions de Genève du
12 août 1949 ;
b) les autres violations graves des lois et coutumes
applicables aux conflits armés internationaux ;
c) en cas de conflit armé non international, les
violations graves de l'article 3 commun et les autres violations graves des
lois et coutumes applicables à ce type de conflits. Le Statut de Rome
énumère des actes entrant dans chacune de ces catégories ;
ce sont par exemple l'homicide intentionnel, la torture ou les traitements
inhumains, le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de
porter gravement atteinte à l'intégrité physique ou
à la santé, la déportation ou le transfert illégal
ou la détention illégale ; la prise d'otages ; le fait de
déclarer qu'il ne sera pas fait de quartier ; l'utilisation de civils
comme boucliers humains ;
· Crimes contre l'humanité : aux termes
de l'article 7 du Statut, ce crime s'entend par l'un quelconque des actes
ci-après lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque
119 Nations Unies, Op. Cit., p. 79
120 Idem
44
généralisée ou systématique
lancée contre toute population civile et en connaissance de cette
attaque :
a) meurtre ;
b) extermination ;
c) réduction en esclavage ;
d) déportation ou transfert forcé de population
;
e) emprisonnement ou autre forme de privation grave de
liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit
international ;
f) torture ;
g) viol, esclavage sexuel, prostitution forcée,
grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre
forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
h) persécution de tout groupe ou de toute
collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial,
national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste [...], ou en fonction
d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit
international, en corrélation avec tout acte visé dans le
présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la
Cour; disparitions forcées de personnes;
i) crime d'apartheid ;
j) autres actes inhumains de caractère analogue
causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves
à l'intégrité physique ou à la santé
physique ou mentale. Il y a lieu de noter qu'en droit international coutumier,
il n'est pas nécessaire qu'il y ait un lien entre les crimes contre
l'humanité et un conflit armé.121
Restriction faite de la Convention contre la
torture,122 de la Convention internationale pour la protection de
toutes les personnes contre les disparitions forcées,123 et
des Protocoles
121Lire à ce sujet : Haut-commissariat des
Nations Unies aux droits de l'homme : Le Procureur c. Duko
Tadic', par. 141.
122 L'article 4 dispose que «Tout État partie
veille à ce que tous les actes de torture constitue en des infractions
au regard de son droit pénal. Il en est de même de la tentative de
pratiquer la torture ou de tout acte commis par n'importe quelle personne qui
constitue une complicité ou une participation à l'acte de
torture» et que «Tout État partie rend ces infractions
passibles de peines appropriées qui prennent en considération
leur gravité».
L'article 5 exige que tout État partie prenne les
mesures nécessaires pour établir s compétence afin de
connaître de ces infractions quand elles ont été commises
sur tout territoire sous la juridiction dudit État ou à bord
d'aéronefs ou de navires immatriculé dans cet État.
123 Aux termes de l'article 4: «Tout État partie
prend les mesures nécessaires pour que la disparition forcée
constitue une infraction au regard de son droit pénal». Et le
paragraphe 2 de l'article 9 indique ce qui suit : «Tout État partie
prend également les mesures nécessaires pour établir sa
compétence aux fins de connaître d'un crime de disparition
forcée quand l'auteur présumé de l'infraction se trouve
sur tout territoire sous sa juridiction, sauf si
45
facultatifs à la Convention relative aux droits de
l'enfant, concernant, l'un, l'implication d'enfants dans les conflits
armés.124Et l'autre, la vente d'enfants, la prostitution des
enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, rares sont les
instruments internationaux relatifs aux DHO qui contiennent des dispositions
concernant la pénalisation des violations des DHO et les poursuites
correspondantes. Mais même si certaines de ces violations ne sont pas
visées dans des traités spécifiques, les auteurs, lorsque
ces infractions constituent un génocide, des crimes contre
l'humanité ou des crimes ou crimes de guerre peuvent être traduits
en justice chaque fois que la CPI est compétente, ou en vertu du droit
national, qui autorise parfois son application extraterritoriale à
certaines violations graves du droit international des droits de
l'homme.125
b) L'étendue de la responsabilité
pénale individuelle
Au sujet de la responsabilité individuelle en
matière de crimes internationaux, le Statut de Rome prévoit
à article 25 §3 qu'«une personne est pénalement
responsable et peut être punie pour un crime relevant de la
compétence de la Cour», et énumère ensuite une
série de comportements criminels, comme le fait de commettre le crime,
de l'ordonner ou de s'en faire l'instigateur.
Il est particulièrement important que les
spécialistes des DHO qui interviennent dans un conflit en cours aient
à l'esprit qu'aux termes de l'article 25 §3(f) du Statut de Rome
«la personne qui abandonne l'effort tendant à commettre le crime ou
en empêche de quelque autre façon l'achèvement ne peut
être punie en vertu du présent Statut pour sa tentative si elle a
complètement et volontairement renoncé au dessein criminel».
Cette disposition clef pourrait faciliter les initiatives des défenseurs
des DHO qui tentent d'exploiter la menace d'éventuelles poursuites
internationales pour influer sur le cours des événements.
Certains des principes fondamentaux de la responsabilité pénale
individuelle sont les suivants :
· Chacun à le devoir de désobéir
à un ordre manifestement illicite ; l'ordre de commettre un
génocide ou un crime contre l'humanité est manifestement illicite
;
· Les personnes sont pénalement responsables des
crimes internationaux qu'elles commettent ;
· Les commandants et autres supérieurs
hiérarchiques sont pénalement responsables des crimes
internationaux commis en exécution de leur ordre et, de surcroît,
en vertu du
ledit État l'extrade, ou le remet à un autre
État conformément à ses obligations internationales ou
à une juridiction pénale internationale dont il a reconnu la
compétence.».
124 Le paragraphe 2 de l'article 4 se lit ainsi : «Les
États parties prennent toutes les mesures possibles pour empêcher
l'enrôlement et l'utilisation de ces personnes, notamment les mesures
d'ordre juridique nécessaires pour interdire et sanctionner
pénalement ces pratiques».
125Nations Unies, Op. Cit., p.82.
46
principe de la responsabilité du commandement qui sera
analysé dans la sous-section suivante ;
· Les personnes sont pénalement responsables et
passibles des peine qui sanctionnent les crimes internationaux si les
éléments matériels du crime sont commis intentionnellement
et sciemment.126
Ces principes s'appliquent à différentes sortes
de crimes allant des infractions graves aux Conventions de Genève et des
violations des lois et coutumes de la guerre ainsi que de l'article 3 commun,
aux crimes contre l'humanité et au génocide qui engagent la
responsabilité personnelle de quiconque a projeté,
encouragé, ordonné ou commis le crime, ou en a facilité ou
soutenu de quelque manière que ce soit le projet, la préparation
ou l'exécution. Cette règle a été confirmée
par les Statuts du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et
du Tribunal pénal international pour le Rwanda et,
ultérieurement, par le Statut de Rome.
On peut se demander également si les personnes doivent
appartenir à un organisme étatique pour être
pénalement responsables de violations graves du droit international des
DHO et du DIH. La responsabilité individuelle à l'égard
des violations de ces deux corpus juridiques qui constituent des crimes
internationaux peut être déterminée sur la base du droit
pénal international. Ainsi, la Convention pour la prévention et
la répression du crime de génocide dispose que «les
personnes ayant commis le génocide ou l'un quelconque des autres actes
énumérés à l'article III seront punies, qu'elles
soient des gouvernants, des fonctionnaires ou des particuliers» (art. IV).
C'est ce que réaffirment aussi les statuts des tribunaux pénaux
internationaux susmentionnés et le Statut de Rome.
La Chambre de première instance du Tribunal
pénal international pour l'ex-Yougoslavie a affirmé que les
rédacteurs de la Convention n'avaient pas tenu l'existence d'une
organisation ou d'un système au service d'un objectif génocidaire
pour un ingrédient juridique de l'infraction et que, ce faisant, ils
n'avaient pas écarté la possibilité qu'une personne
agissant seule cherche à détruire un groupe. Toutefois, la
Chambre a relevé qu'il serait très difficile, dans la pratique,
de prouver l'intention génocidaire d'une personne si les crimes commis
n'étaient pas d'une grande ampleur et si l'infraction reprochée
n'était pas soutenue par une organisation ou un
système.127
Même en cas de génocide, cette appartenance
à une organisation concerne non seulement les acteurs étatiques,
mais aussi les protagonistes non étatiques d'un conflit armé. Les
crimes contre l'humanité peuvent également être commis par
des personnes appartenant à des groupes armés non
étatiques. En ce qui concerne les crimes de guerre, dans la mesure
où des entités non étatiques ont d'importantes obligations
en matière de DIH, les violations qu'elles commettent s'inscrivent dans
le même cadre juridique que celui applicable aux États. Ainsi, le
Conseil de sécurité, dans sa résolution 1214 (1998), a
rappelé à toutes les parties au conflit interne afghan que
«tous ceux qui commettent ou ordonnent de commettre des violations des
Conventions [de Genève] en portent individuellement la
responsabilité», ce qui montre que le DIH moderne applique les
mêmes règles aux acteurs étatiques et non
étatiques.128
c) La responsabilité du commandement
Si le principe général est qu'il faut une
participation directe à une violation du DIH pour que la
responsabilité pénale individuelle puisse être mise en
cause, le droit pénal international reconnaît l'importance du
rôle que les chefs et les commandements peuvent jouer en veillant
à ce que les personnes placées sous leurs ordres n'adoptent aucun
comportement criminel qui se
126 Nations Unies, Op. Cit., pp. 82-83.
127Prosecutor v. GoranJelisic', case N°
IT-95-10-T, Judgement of 14 December 1999, par. 100 et 101. 128 Nations
Unies, Op. Cit., pp. 83-84
47
traduise par des violations flagrantes du droit international
des DHO ou du DIH. A cet égard, le paragraphe 2 de l'article 86 du
Protocole I indique que le fait qu'une infraction aux Conventions ait
été commise par un subordonné n'exonère pas ses
supérieurs de leur responsabilité en matière de
supervision et de contrôle. Cependant, pour que la responsabilité
du commandement soit engagée, il faut que le supérieur
hiérarchique ait su ou ait eu des raisons de savoir que des violations
étaient commises ou sur le point de l'être. En pareil cas, le
supérieur est tenu d'adopter toute les mesures nécessaires pour
prévenir ces violations, ou pour sanctionner leurs auteurs si elles ont
lieu malgré tout.
La Chambre d'appel du Tribunal pénal international pour
l'ex-Yougoslavie a analysé les diverses composantes de la notion de
responsabilité du commandement. Elle a rappelé que
l'autorité de droit dont le commandant est investi crée une
présomption de contrôle effectif. Elle a également
étudié la portée de l'expression «ait eu des raisons
de savoir», et a indiqué que la responsabilité du commandant
serait engagée s'il avait omis d'intervenir alors qu'il avait
suffisamment de renseignements alarmants concernant d'éventuelles
violations. Elle a précisé que, si le fait que le
supérieur ait eu connaissance des infractions passées de ses
subordonnés et ait omis de les sanctionner ne permet pas, en
lui-même, de conclure qu'il savait que des infractions analogues seraient
commises par le même groupe de subordonnés, cela constituait
cependant un renseignement suffisamment alarmant pour justifier une
enquête plus poussée.129 Ainsi, elle a
interprété la formule «ait eu des raisons de savoir»
comme appelant à détermine si le supérieur disposait de
suffisamment de renseignements alarmants de nature à l'alerter du risque
que des infractions graves soient commises par ses subordonnés.
Dans une autre affaire,130 la Chambre de
première instance du Tribunal a indiqué clairement qu'il n'est
pas indispensable qu'un lien de cause à effet entre l'inaction du
commandant et les infractions commises par son subordonné soit
établi pour que la responsabilité du supérieur soit
engagée. Elle a rappelé que, si un lien de cause à effet
était requis, cela modifierait les fondements de la
responsabilité du commandement qui a omis d'empêcher ou de
sanctionner au point qu'il faudrait pratiquement qu'il ait participé
à l'infraction commise par ses subordonnés.131
En effet, l'article 87§2 du Protocole I impose au
supérieur une obligation d'empêcher les infractions. A ce sujet,
la Chambre d'appel132 a indiqué que l'obligation
générale du commandant de prendre les mesures nécessaires
et raisonnables est bien ancrée dans le droit international coutumier et
découle de l'autorité dont il est investi. Cette Chambre a
souligné que «sont considérées comme
«nécessaires» les mesures appropriées pour que le
supérieur hiérarchique s'acquitte de son obligation (et montrant
qu'il s'est véritablement efforcé de prévenir ou de
punir), et comme «raisonnables celles qui sont raisonnablement en son
pouvoir». Le critère est donc le point de savoir si le
supérieur a omis ou non de prendre les mesures nécessaires et
raisonnables pour prévenir et sanctionner l'acte
criminel.133
129 Idem
130 Voir Prosecutor v. Hadúihasanovic' &
Kubura, case No IT-01-47-A, Judgement of 22 April 2008, et en particulier
le paragraphe 30.
131 Nations Unies, Op. Cit., pp. 84-85
132 Le Procureur c.SeferHalilovic', affaire no
IT-01-48-A, arrêt du 16 octobre 2007, par. 63 et 64.
133 Nations Unies, Op. Cit., p. 86
48
2. Les obligations des États relatives aux crimes
internationaux
Les États ont une série d'obligations et de
responsabilités juridiques qui découlent du droit pénal
international d'autant plus que les violations du droit international des DHO
et du DIH constituent des crimes internationaux. Les Etats ont l'obligation
d'enquêter et, si les éléments sont suffisants, de
poursuivre la personne présumée responsable et de sanctionner
l'auteur conformément à la loi, d'écarter la
possibilité d'une amnistie dans certains cas, et d'offrir aux victimes
ou à leur famille un recours et des réparations. Leur obligation
d'étendre la compétence en matière de poursuites
au-delà de leur territoire sera analysée dans la sous-section
suivante. Dans le cadre de leur obligation de déterminer les
responsabilités, ils doivent, en vertu du droit international,
coopérer entre eux et aider les instances judiciaires internationales
compétentes à enquête sur ces violations et à en
poursuivre les auteurs.134
L'obligation de rechercher les responsabilités est
expressément évoquée dans certains instruments des DHO et
du DIH, et a été renforcée par les interprétations
du droit. Le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques,135 imposent à tous les États parties
l'obligation générale d'offrir un recours utile contre la
violation des droits et libertés consacrés par ces instruments,
et notamment celle d'enquêter et de punir les responsables.
L'Ensemble de principes actualisé pour la protection et
la promotion des DHO par la lutte contre l'impunité évoque
l'obligation des États de « mener rapidement des enquêtes
approfondies, indépendantes et impartiales sur les violations des DHO et
du DIH et [de] prendre des mesures adéquates à l'égard de
leurs auteurs, notamment dans le domaine de la justice pénale, pour que
les responsables de crimes graves selon le droit international soient
poursuivis, jugés et condamnés à des peines
appropriées ».136
De plus, les résolutions adoptées par
l'Assemblée générale et la Commission des droits de
l'homme, les rapports établis dans le cadre des procédures
spéciales de l'ONU et la jurisprudence des organes conventionnels des
DHO ont tous systématiquement affirmé que les États ont
l'obligation d'enquêter sur les violations du droit international des DHO
et du DIH et de poursuivre leurs auteurs.
Le DIH établit une distinction entre les conflits
armés internationaux et non internationaux. S'agissant des premiers, les
États sont tenus de réagir aux manquements graves et autres
aux
134Idem., p. 86
135Lire à ce sujet : Haut-commissariat des
Nations Unies aux droits de l'homme: le paragraphe 3 de l'article 2 dispose
que: «Les États parties au présent Pacte s'engagent
à: a) garantir que toute personne dont les droits et
libertés reconnus dans le présent Pacte auront été
violés disposera d'un recours utile, alors même que la violation
aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de
leurs fonctions officielles; b) garantir que l'autorité
compétente, judiciaire, administrative ou législative, ou toute
autre autorité compétente selon la législation de
l'État, statuera sur les droits de la personne qui forme le recours, et
développer les possibilités de recours juridictionnel;
c) garantir la bonne suite donnée par les autorités
compétentes à tout recours qui aura été reconnu
justifié.».
136 Lire à ce sujet : Haut-commissariat des Nations
Unies aux droits de l'homme: E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 19. Aux termes de
l'Ensemble de principes, «l'expression «crimes graves selon le droit
international» s'entend des infractions graves aux Conventions de
Genève du 12 août 1949 et à leur Protocole additionnel de
1977 et d'autres violations du droit international humanitaire qui constituent
des crimes selon le droit international, des génocides, des crimes
contre l'humanité et d'autres violations des droits de l'homme
protégés internationalement qui constituent des crimes selon le
droit international et/ou dont le droit international exige des États
qu'ils les sanctionnent pénalement, comme la torture, les disparitions
forcées, les exécutions extrajudiciaires et l'esclavage».
49
Conventions de Genève et au Protocole I137.
En vertu des Conventions de Genève, les États s'engagent à
respecter et faire respecter ces instruments en toutes circonstances. Plus
précisément, ils s'engagent à promulguer une
législation qui édicte des sanctions pénales
appropriées à l'encontre des auteurs de violations graves du
DIH.
En revanche, ni l'article 3 commun ni le Protocole II ne
contiennent de dispositions spécifiques concernant les poursuites pour
infractions ou manquements graves à leurs règles. Cependant, la
jurisprudence du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et
du Tribunal pénal international pour le Rwanda a établi que des
crimes de guerre peuvent également être commis dans des conflits
armés non internationaux.138
La Cour internationale de Justice s'est prononcée sur
l'obligation de prévenir et de punir le génocide. Elle n'a
considéré que «l'une des manières Les plus efficaces
de prévenir la commission d'actes criminels, en général,
est de prévoir des sanctions pénales à l'encontre des
personnes qui viendraient à commettre de tels actes, et d'appliquer
effectivement ces sanctions à ceux qui auraient commis les actes dont on
cherche à éviter le renouvellement». De plus, la Cour a
rappelé qu'en vertu de la Convention sur la prévention et la
sanction du crime de génocide,139 les États parties
ont l'obligation de procéder «à l'arrestation des personnes
accusées de génocide se trouvant sur leur territoire même
si le crime dont elles sont accusées a été commis hors de
celui-ci et que, à défaut de les traduire devant leurs propres
juridictions, ils les défèrent devant la cour internationale
compétente pour les juger».140
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