Paragraphe II : La procédure de sanction.
70 Depuis la réforme juridictionnelle
intervenue en 2008, le Conseil d'Etat sénégalais a laissé
place à la Cour Suprême créée par la Loi Organique
du 08 août 2008, et elle comporte quatre (04) chambres dont une dite
administrative. C'est celle-ci qui reçoit les recours contre les mises
en gardes prononcées par la CDP depuis août 2008. Cette loi a
ensuite été abrogée et remplacée par la loi n°
2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour Suprême.
71 Les manquements constatés au regard de la
loi n°2008-12 du 25 janvier 2008 portant protection des données
à caractère personnel étaient : le manquement pour
non-déclaration de la base de données relative à la
prospection directe dans le jeu «Les folies d'Orange», le
manquement relatif à la prospection directe et le manquement relatif
à la diffusion de numéros de téléphone dans la
presse.
41
Octobre 2018
C'est d'abord une phase de mise en action de la sanction (A),
puis le prononcé des peines applicables (B).
A. La mise en action de la sanction de la prospection
directe interdite.
La procédure de sanction fait suite à une mise
en demeure restée infructueuse72. Elle obéit toujours
à la procédure appliquant les principes de la présomption
d'innocence, du contradictoire, des droits de la défense (avocat) et du
procès équitable.
Au Sénégal, par délibération, la
CDP désigne parmi les membres de la Session plénière trois
(03) commissaires qui forment le Comité de sanction dont le mandat est
d'un (01) an non renouvelable. Parmi ces membres, est désigné un
commissaire rapporteur pour chaque dossier à étudier. En France
pour prendre des sanctions, la CNIL siège dans une formation
spécifique appelée « formation restreinte ».
Elle est composée de cinq (05) membres et d'un Président
distinct du Président de la CNIL.
L'audience est publique sauf si l'organisme justifie d'une
demande de huit-clos et par ordre de parole : le rapporteur fait son
réquisitoire, l'organisme mis en cause ou son conseiller formule ses
arguments, éventuellement toute personne dont l'autorité estime
utile à l'audience, enfin c'est le mis en cause qui a toujours la parole
en dernier.
Généralement, le mobile d'une procédure
de sanctions, c'est de prononcer des peines à l'encontre des
annonceurs.
B. Les peines applicables en matière de
prospection directe.
Des sanctions administratives, pécuniaires et
pénales peuvent être prononcées, soit par l'autorité
de contrôle ou les juridictions compétentes, à l'encontre
des auteurs de prospection directe n'ayant pas respecté leurs
obligations.
Au Sénégal, c'est l'article 30 de la loi
n°2008-12 relative à la PDCP qui confère à la CDP les
prérogatives de prononcer des sanctions : « Si le responsable
de traitement ne se conforme pas à la mise en demeure qui lui a
été adressée La Commission des Données Personnelles
peut prononcer à son encontre, après procédure
contradictoire, les sanctions suivantes :
72 Il faut préciser qu'en France la loi pour
une République numérique modifie la procédure de sanction
devant la formation restreinte de la CNIL. En effet cette loi du 7 octobre 2016
opère une refonte de la procédure de sanction devant la formation
restreinte de la CNIL.
Avant cette loi, en cas de manquement à la LIFL par le
responsable de traitement, la CNIL ne pouvait pas prononcer de sanction
financière sans mise en demeure préalable. Une sanction ne
pouvait être prononcée que pour sanctionner le non-respect d'une
mise en demeure. Désormais, cette formation peut effectivement prononcer
une sanction financière directement, sans mise en demeure
préalable lorsque le manquement ne peut pas faire l'objet de mise en
conformité.
Lorsque, néanmoins, le manquement peut faire l'objet
d'une mise en conformité, alors la formation restreinte de la CNIL
devra, si elle veut sanctionner financièrement le responsable de
traitement, constater qu'il n'a pas respecté la mise en demeure
initiale.
42
1)
Octobre 2018
un retrait provisoire de l'autorisation accordée
pour une durée de trois (03) mois à l'expiration de laquelle, le
retrait devient définitif ;
2) une amende pécuniaire d'un (1) million à
cent (100) de Franc CFA ;(...) ».
En ce qui concerne les sanctions pénales, elles font
des articles 431-14 à 431-29 du code pénal
sénégalais issu de la loi n°2016-29 du 08 novembre 2016 sur
la cybercriminalité. En matière de prospection directe, plus
précisément, l'article 431-20 sanctionne d'un (1) an à
sept (07) le non-respect du droit d'opposition de la personne
concerné73.
En France, à l'issue contrôle ou plainte, en cas
de méconnaissance des dispositions du RGPD ou de la loi de la part des
responsables de traitement et des sous-traitants, la formation restreinte de la
CNIL peut prononcer des sanctions à l'égard des responsables de
traitements qui ne respecteraient pas ces textes. Ainsi, lorsque des
manquements à la législation sur la prospection directe sont
portés à la connaissance de la CNIL, en vertu de l'article 83
parag.5 du RGPD, cette autorité a le pouvoir de sanctionner ces
violations par des «amendes administratives pouvant s'élever
jusqu'à 20.000.000 £ ou, dans le cas d'une entreprise,
jusqu'à 4 % du chiffre annuel mondial total de l'exercice
précédent (...)». Jadis, la CNIL a eu a prononcé
des sanctions pécuniaires en matière de prospection directe. En
effet, dans une délibération de juin 201574, elle
avait prononcé une sanction pécuniaire de 15.000£ à
l'encontre de la société Prisma Média.
Par ailleurs, l'article 226-18-1 du Code pénal
français réprime le fait de procéder à un
traitement de données personnelles à des fins de marketing direct
concernant une personne physique malgré l'opposition de cette
dernière. Les peines sont de cinq (05) de réclusion et de
300.000£ d'amende.
Ces sanctions peuvent faire l'objet d'un recours75
devant la Chambre administrative de la Cour Suprême
(Sénégal) ou le Conseil d'Etat (France).
Tout compte fait, au-delà des questions relatives
à la réglementation de la pratique de la prospection directe, des
solutions devaient être apportées aux problèmes
suscités par le traitement des données à caractère
personnel des consommateurs, destinataires de cette publicité en ligne.
Le législateur, sur la base de l'engagement de la responsabilité
des annonceurs de marketing, propose de privilégier dans la
procédure contentieuse, la voie de
73 Article 431-21 du Code pénal
sénégalais de 2016 : « Celui qui procède ou fait
procéder à un traitement de données à
caractère personnel concernant une personne physique malgré
l'opposition de cette personne (...), lorsque ce traitement répond
à des fins de prospection, notamment commerciale, (...), est puni d'un
emprisonnement d'un an à sept ans et d'une amende de 500.000 francs
à 10.000.000 francs ou de l'une de ces peines. »
74 Délibération de la formation
restreinte n°2015-155 du 01 juin 2015 prononçant une sanction
pécuniaire à l'encontre de la société Prisma
Média.
75 Les voies de recours sont : le recours au fond et
le recours en référé de suspension.
43
la mise en conformité. Il s'ensuit forcément, au
cas où le mis en demeure n'aurait pas respecté les injonctions de
l'organe de contrôle, le prononcé de sanctions parfois lourdes.
Octobre 2018
44
Octobre 2018
|