Dans un ouvrage paru en mars 2012, l'HAS promue clairement
cette idée d'amélioration des pratiques collectives pour la
sécurité des soins. Elle y met en avant une méthodologie
pour comprendre l'importance de la gestion des risques11. L'objectif
étant de réduire le risque de survenue d'évènements
indésirables graves et évitables. Il part d'un constat: «
Diverses études montrent le caractère
fréquent, parfois grave, souvent évitable, des
évènements indésirables associés aux soins
survenant en établissements de santé. La cause de ces
évènements est rarement liée au manque de
compétence technique des professionnels. Ils ont le plus souvent
secondaires à des défauts d'organisation, de coordination, de
vérification ou de communication, en résumé le fait d'une
insuffisance ou d'un manque de culture commune de
sécurité12 », relève
l'HAS.
Mais qu'est-ce qu'un risque?
« Un risque est une situation non
souhaitée ayant des conséquences négatives
résultant de la survenue d'un ou plusieurs évènements dont
l'occurrence est incertaine » (Définition
HAS)13.
11 La sécurité des patients, mettre
en oeuvre la gestion des risques associés aux soins en
établissement de santé: Des concepts à, la pratique. Haute
Autorité de Santé, Mars 2012
12 Kohn LT, Corrigan JM, Donaldson MS (institute
of medicine). To err is human: building a safer health system. Washington DC:
National Academy Press; 2000.
13 TURPIN Murielle, cadre de santé IADE, cours
sur la cartographie des risques au bloc opératoire. IRIADE - promotion
2017/2019.
13
Et la gestion du risque?
Toujours d'après l'HAS: « Une
démarche de gestion des risques a pour but d'assurer la
sécurité des patients, et en particulier de diminuer le risque de
survenue d'évènements indésirables associés aux
soins ».
Entre autres, il s'agit de mettre en place un processus de
guidage qui aiderait le professionnel ou tout autre acteur de santé
à se familiariser avec sa pratique et son environnement pour lui
permettre de mieux appréhender les risques, les reconnaître, les
comprendre, les traiter, les éviter et/ou les corriger.
Les enjeux sont humains, stratégiques, techniques,
organisationnels, juridiques et économiques. C'est dire de l'importance
de soutenir cette démarche dans nos établissements et de
sensibiliser les professionnels en général.
L'HAS fait la distinction de 3 grandes catégories de
risques:
§ La première directement
associée aux soins (organisation et coordination de soins, actes
médicaux, hygiène, utilisation d'un produit de santé,
gestion de l'information, etc.).
§ La seconde liée aux
activités dites de soutien (effectif de personnel et gestion des
compétences, équipements et leur maintenance, achats et
logistique, système d'information, etc.).
§ La troisième liée
à la vie hospitalière et à l'environnement
(sécurité des personnes et des biens, etc.).
Cette approche de la gestion des risques doit aussi prendre
en compte la diversité des établissements de santé et des
différentes structures qu'elles y regroupent. Chaque
spécialité se retrouve dans ce schéma avec sa propre
grille d'évaluation. La gestion et le management des équipes ne
sont pas les mêmes suivant l'activité qui y est faite. Le
rôle et les compétences se croisent mais n'aboutissent pas au
même type de prise en charge. Il faut donc cartographier ces risques en
fonction de la spécificité du service.
L'analyse de la gestion des risques repose sur des principes
incontournables.
La distinction est faite entre les approches dites a
priori (démarche préventive en identifiant et
évaluant les mesures déjà en place) et celles dites
a posteriori (démarche réactive après
survenue d'évènements indésirables), en soulignant la
complémentarité étroite des deux démarches.
14
Un schéma type d'analyse de la situation à risque
est exprimé dans l'ordre suivant14:
· Identifier les situations à
risque (a priori).
· Analyser la situation et identifier les
risques.
· Évaluer et hiérarchiser
les risques (déterminer leur criticité : gravité,
fréquence, mesures préventives existantes).
· Identifier les actions à
mener.
· Traiter les risques (mettre en oeuvre
des actions susceptibles d'empêcher la survenue des EI redoutés ou
d'en limiter les conséquences).
· Suivre et évaluer les
résultats (pour apprécier au mieux les risques
résiduels).
Le tout doit être ramené sous forme de retour
d'expérience (ex: CREX, RMM, etc.) afin de mettre en oeuvre des actions
correctrices puis de mesurer leur impact à l'aide d'indicateurs. Pour
cela, cette démarche va même plus loin. Dans la brochure parue en
décembre 2010 par l'HAS15, elle y développe
l'idée d'évaluer les professionnels avec des
méthodes16: quantitatives (ex: questionnaires individuels),
ou qualitatives (ex: des entretiens collectifs ou individuels). L'objectif
étant « d'appréhender » les différents aspects
de la culture de sécurité (psychologiques, comportementaux et
organisationnels).
Ainsi, les professionnels développent une conscience
qui s'articule autour de ce concept. Maîtriser les risques c'est
prévenir, apprendre de ses erreurs c'est guérir. Ils deviennent
acteurs, prennent des décisions et participent à la
création de solution. « L'importance de la culture de
sécurité pour la sécurité des soins réside
dans ce qu'elle participe à l'élaboration d'un ensemble
cohérent et intégré de comportements des professionnels,
et donc aux performances des organisations de santé (...) Au travers de
l'évaluation et du développement d'une culture de
sécurité des soins, il s'agit de faire de la
sécurité une priorité de tous, des professionnels de
terrain comme des managers17 ».
14 La sécurité des patients - Mettre en
oeuvre la gestion des risques associés aux soins en établissement
de santé: Des concepts à, la pratique. Haute Autorité de
Santé, Mars 2012
15 La culture de sécurité des soins: du
concept à la pratique. HAS, décembre 2010.
16 Health and Safety Executive (HSE). A review of
safety culture and safety climate literature for the development of the safety
culture inspection toolkit. Research report 367, 2005, UK.
17 La culture de sécurité des soins: du
concept à la pratique. HAS, décembre 2010.
15
La notion de risque est définie, selon le dictionnaire
Larousse, comme: « la possibilité ou la
probabilité d'un fait ou d'un évènement qui pourrait
apporter un avantage mais qui comporte l'éventualité d'un danger
». L'anesthésie fait face à de nombreuses
situations à risques18.
Au niveau du bloc opératoire, la maîtrise des
risques est d'autant plus effective et proportionnelle à l'exigence de
la spécificité du service. « Le bloc
opératoire est un système complexe or, plus la complexité
est grande, plus le risque de défaut et de non-détection est
important si ce système n'est pas
maîtrisé19 ». C'est aussi une
structure avec de nombreux intervenants.
« La gestion des risques requiert
l'implication de l'ensemble des acteurs: management de l'établissement,
encadrement du bloc, équipes du bloc et coordination avec les services
en interface avec le bloc20 ».
L'IADE est, au quotidien, confronté aux risques dans
sa pratique professionnelle. Il est essentiel d'identifier ces risques afin de
les prévenir21. Ces risques peuvent intervenir à
n'importe quel moment dans le processus de prise en charge d'un patient, de son
admission au bloc jusqu'à sa sortie de SSPI.
Comme détailler plus haut, le but dans la gestion des
risques est donc de prévenir, de repérer et de réduire la
survenue d'évènements indésirables graves (EIG).
Intervenir avant qu'ils ne surviennent. C'est la gestion du risque
à priori. Elle doit permettre de mettre en place des
actions préventives et/ou correctives s'il y a eu dysfonctionnement
(EIG) et de suivre leur efficacité22.
Les différents types de risques rencontrés au
Bloc Opératoire (BO) sont variables. Ils peuvent-êtres humains,
organisationnels, environnementaux, techniques, biologiques, toxiques et/ou
chimiques.
Ils existent 3 phases ou l'on peut identifier des risques au
BO. Certains sont directement liés au rôle et aux
compétences de l'IADE.
18 SABY Sandrine & al. - Qualité des
soins: Rôle IADE dans la prévention des erreurs
médicamenteuses. 2016.
19 BAUDRIN Dominique & al. médecin
coordinateur pour le groupe de travail - Risques au bloc opératoire:
cartographie et gestion - DRASS Midi-Pyrénées, Commission de
Coordination Régionale des Vigilances (CCRV), janvier 2007.
20 Certification des établissements de
santé - Ce qu'il faut savoir sur l'évaluation de la
démarche qualité et gestion des risques au bloc
opératoire. Haute Autorité de Santé, mars 2015.
21 TURPIN Murielle, cadre de santé IADE, cours
sur la cartographie des risques au bloc opératoire. IRIADE - promotion
2017/2019.
22 Aymeric LAPP, cadre de santé promotion
2016-2017 - TFE - La cartographie des risques a priori, un outil
managérial pour le cadre de santé. Institut Lorrain de formation
des cadres de santé, université de Lorraine ESM - IAE Metz, juin
2017.
16
Dans la phase pré-opératoire,
nous pouvons identifier des risques liés à la check-list
d'ouverture de salle par exemple, liés au contrôle des
stupéfiants dans la pharmacie du BO ou encore liés à
l'accueil du patient avec la vérification du dossier
d'anesthésie. Cela concerne également la consultation
anesthésique et la Visite Pré Anesthésique (VPA)
effectuées par le MAR.
Dans la phase per-opératoire, il
existe des risques liés à l'installation du patient, à
l'induction ou encore liés à la check-list HAS (champage, lavage
des mains, préparation de la table, etc.).
Enfin dans la phase post-opératoire,
cela concerne des risques liés à l'accueil en SSPI, au
réveil du patient et à la surveillance post-op. L'identification
des risques est donc une nécessité majeure et doit s'effectuer
à chaque étape du processus.
La cartographie des risques constitue un point clé
dans la stratégie des gestions des risques, car elle répertorie
les possibles dysfonctionnements identifiés au préalable dans le
système de soin. Elle est mise en oeuvre par les organisations afin
d'appréhender l'ensemble des facteurs susceptibles d'affecter leurs
activités et leur performance, dans l'objectif de se prémunir
contre les conséquences juridiques, humaines, économiques et
financières que pourrait générer une vigilance
insuffisante. Selon Aymeric LAPP, cadre de santé : « Il
permet de recenser les risques pour le patient afin de mieux les anticiper, les
hiérarchiser et les traiter ». En cartographiant les
risques, les organisations créent les conditions d'une plus grande
connaissance et donc d'une meilleure maîtrise de ces
risques23.
Par définition: « La cartographie des
risques se définit comme la démarche d'identification,
d'évaluation, de hiérarchisation et de gestion des risques
inhérents aux activités de l'organisation
».
A partir de la cartographie, il est alors possible de
dégager et d'évaluer la criticité d'un risque. Elle repose
sur l'interaction entre la fréquence d'un risque et sa gravité.
Elle permet ainsi de prioriser les actions à mettre en oeuvre pour
prévenir la survenue d'évènements indésirables.
23 Recommandations cartographie - Agence
Française Anticorruption -
https://www.economie.gouv.fr
, Ministère de l'action et des comptes publics, octobre 2017