B : Le rejet de la requête d'annulation pour non
respect de la règle d'absence de recours parallèle
La condition relative à l'absence de recours
parallèle a bien existé dans l'ordonnancement juridique jusqu'en
2008. Sa mise en oeuvre consiste à faire du REP, un recours subsidiaire.
Suivant cette condition, le REP introduit contre un acte administratif n'est
pas recevable si le requérant disposait d'une autre voie de recours
juridictionnel devant aboutir aux même résultats. Par ailleurs,
même lorsqu'elle était prévue, le juge de l'excès de
pouvoir ne l'appliquait toujours pas. C'est ainsi qu'il a déclaré
recevable le recours introduit par Babacar LÖ, agent non fonctionnaire,
contre un acte administratif détachable du contrat141 qui
relève en principe de la compétence du tribunal du travail. En
ignorant cette condition dans cette affaire alors que la loi la prévue,
le juge élargit sa compétence. Il devrait dès lors
contrôler sans gêne les actes administratifs litigieux qui
affectent la situation des administrés depuis que le
législateur
139 DUVERGER (Maurice), Eléments de droit public,
Presses universitaires de France, Thémis, 1957, p.352
140WALINE (Jean), Précis de droit
administratif, op. cit, p.377
141 CS, arrêt N°7 Babacar Lo et Abdou Salam Diallo C/
Etat du Sénégal, op. cit,
59
a supprimé cette condition142. Rien n'est
ainsi puisque le juge continue de l'appliquer. Dans un arrêt rendu en
date du 09 JUIN 2009143 le juge a déclaré irrecevable
le recours du requérant pour non respect de la condition d'absence de
recours parallèle. Le recours à cette théorie semble
logique dans cette affaire puisque la demande faite par le requérant
visant simultanément l'annulation et la réparation des dommages
et intérêts dépasse sans doute les pouvoirs du juge de
l'excès de pouvoir qui ne peut statuer qu'en annulation et non en
réparation des dommages et intérêts auxquels
l'administré aurait subi. Lorsque par ailleurs la demande du
requérant vise uniquement l'annulation d'un acte administratif
unilatéral illégal, il doit statuer sur sa requête sans se
soucier de la situation du requérant. Il continue d'appliquer cette
règle d'absence de recours parallèle dans des cas où il
peut admettre la recevabilité des requêtes. Par exemple dans
l'affaire MBAYE PAYE contre le Maire de la commune de HANN BEL AIR, le juge
s'est déclaré « incompétent pour connaitre du
litige né d'une décision de mise d'un agent non fonctionnaire
à la disposition de la direction des ressources humaines de la commune,
laquelle relève, en premier ressort, de la compétence des
tribunaux du travail »144 alors que le requérant ne
visait dans son recours qu'une annulation de l'acte. L'application de la
théorie d'absence de recours parallèle limite
considérablement la catégorie des actes administratifs
susceptibles de REP. Elle permet certainement de désengorger la
juridiction administrative mais les administrés peuvent s'abstenir de
saisir un autre juge lorsqu'ils estiment que cette saisine n'aboutirait pas
à de meilleurs résultats qu'une abstention.
Toutes ces limites affectant l'efficacité du REP ont un
trait commun en ce sens qu'elles vont affaiblir le développement de
l'Etat de droit et, partant de ce fait, de la démocratie. Il en ainsi de
la protection des droits et libertés des administrés qui demeure
affaiblie. Toutefois, elles n'en sont pas les seules puisque le REP connait
aussi des limites tenant à la portée de la décision du
juge de l'excès de pouvoir.
142 La condition d'absence de recours parallèle ne
figurait pas dans la loi de 2008 sur la cour suprême. Elle ne figure non
plus dans la loi organique de 2017 sur la cour suprême.
143 Arrêt N°15 du 9 juin 2009, Moussa BA contre
Etat du Sénégal, in Bulletin des arrêts de la cour
suprême, N°1, année judiciaire 2008-2009, p.107
144 Arrêt N°47 du 13 juillet 2017, MBAYE PAYE C/
Maire de la commune de HANN BEL AIR, B.A.C.S, N°13-14, année 2017,
p.240
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