B : La mise oeuvre de la procédure de
référé liberté
Dépourvu de référent dans l'ancienne
législation relative à la cour suprême, le
référé liberté regorge néanmoins une
importance indéniable. Son institution dans l'ordonnancement juridique
sénégalais justifie ô combien le législateur accorde
de l'intérêt aux libertés, notamment celles fondamentales.
Il est prévu à l'article 85 de la loi organique sur la cour
suprême de 2017. Cet article dispose que : « saisi d'une demande
justifiée par l'urgence, le juge des référés peut
ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une
liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit
public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un
service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ces pouvoirs, une
atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des
référés se prononce dans un délai de quarante-huit
heures »61. Pour enclencher la procédure de
référé liberté le requérant doit justifier
l'existence d'une urgence à sauvegarder une liberté fondamentale
dont l'acte administratif aurait porté gravement atteinte. Pour le juge,
rappelle le professeur Mouhamadou Moustapha AIDARA, « l'urgence
résulte nécessairement d'une atteinte grave et manifestement
illégale à une liberté fondamentale »62.
Il renchérit à ce propos que : « c'est l'existence ou
l'absence d'atteinte de nature grave et manifestement illégale à
une liberté fondamentale qui constitue l'indice déterminant
d'appréciation de l'urgence »63. L'examen de l'urgence
est un véritable casse-tête pour le juge des
référés qui doit déterminer si la liberté
dont il est appelé à protéger a un caractère
fondamental ou pas puisque le législateur sénégalais n'a
pas précisé la signification. Toutefois, lorsque le juge estime
après examen de la requête que les conditions relatives au
référé liberté sont remplies, il peut ordonner
toutes mesures utiles à la sauvegarde de la liberté fondamentale.
L'intérêt est que le juge des référés dispose
d'importants pouvoirs pour faire cesser l'atteinte à la liberté
fondamentale. En sus, il doit se prononcer dans les délais de
quarante-huit (48) heures.
61 Article 85 de la loi organique N° 2017-09
du 17 janvier 2017 abrogeant et remplaçant la loi organique
N°2008-35 du 08 Août 2008 sur la cour suprême, op.cit.
62 AIDARA (Mouhamadou Moustapha), «
Référé administratif et unité de juridiction au
Sénégal », op. Cit, p.20
63 Idem
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Ce délai est donc raisonnable eu égard au moment
durant lequel le juge est censé statuer.
Malgré les prescriptions légales, le juge des
référés peine à respecter ce délai de
quarante huit heure. Mais force est de reconnaitre qu'il fait parfois des
efforts pour rendre sa décision dans un délai raisonnable
même s'il n'arrive pas à respecter le délai de
quarante-huit heure prévu. Il en est ainsi dans l'affaire Abdoul
MBAYE64 où il a rendu sa décision une semaine
après la demande en référé liberté.
Après l'intervention du juge des référés, celui de
l'excès de pouvoir saisi aux fins d'annulation doit à l'aide des
preuves qu'il dispose annuler ou rejeter l'acte. En principe, la charge de la
preuve incombe au demandeur. Mais, il arrive parfois que le juge allège
la charge de la preuve.
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