1. Les dispositifs sécuritaires de surveillance
policière issus du droit européen applicables sur les territoires
des Etats membres sur une filière de maintien
602. Dispositifs. De nombreux dispositifs
opérationnels sécuritaires de surveillance policière sont
disponibles entre les Etats membres : les patrouilles mixtes (a), les ECE (b),
les techniques spécifiques d'enquêtes (c). Ce sont des techniques
de coopération qu'il est possible d'utiliser pour localiser le
déplacement des trafiquants de faux documents d'identité.
a) Les patrouilles mixtes applicables aux filières
de maintien de faux documents d'identité
603. Législation européenne.
C'est le traité de Prüm qui offre la possibilité
aux forces de police de « constituer des patrouilles communes,
également appelées patrouilles mixtes »592, selon
l'article 24 du présent Traité.
604. Champ d'application : d'une mission
préventive à la saisie de contrefaçons. La
formation d'une patrouille mixte a lieu « en zone transfrontalière
»593. Elle est composée « d'agents de
différentes nationales patrouillant en zone frontalière
»594, qui ont une « mission essentiellement
préventive »595 revêtant « un
592 HERRAN (T.), Essai d'une entraide policière
internationale, préc., n° 66, p. 51.
593 Ibid., n° 77, p. 57. Ainsi, les patrouilles
mixtes rentrent dans le champ d'application d'une « coopération
opérationnelle ».
594 Ibid.
595 Ibid.
204
intérêt notamment en matière de saisie de
contrefaçons ou de stupéfiants ainsi que dans la
prévention de l'immigration clandestine »596.
605. Mission de surveillance franco-espagnole sur les
trafiquants de faux documents d'identité. Ainsi, dans cette
situation la relation établie entre les forces de police « est
directe et matérielle »597 en vue de «
prévenir des menaces pour l'ordre et la sécurité publics
»598, et assurer par-là même une « mission de
surveillance »599. En l'occurrence, un dispositif
franco-espagnol peut avoir été mis en place par la DDPAF de
Hendaye dans le but de saisir des faux documents appartenant à des
trafiquants de faux documents d'identité faisant partie d'une
filière d'immigration illégale.
606. Efficacité d'une coopération
transfrontalière directe. Dans une optique de
sécurité publique, une « coopération
transfrontalière directe en vue de prévenir des menaces pour
l'ordre et la sécurité publics, à lutter contre les
trafics illicites, et la délinquance dans la zone frontalière
ainsi qu'à assurer la surveillance de la frontière »600 se
montre très efficace.
607. D'autres mécanismes sécuritaires de
surveillance policière existent en la matière : les ECE.
b) Les ECE applicables aux filières de maintien de
faux documents d'identité
608. Pluri nationalité. Les ECE
consistent à « rassembler pour une période limitée et
dans un but bien défini, des enquêteurs de plusieurs Etats
membres. Il s'agit donc d'une équipe « plurinationale » mise
sur pied ponctuellement, pour effectuer des enquêtes pénales dans
un ou plusieurs Etats membres qui créent l'équipe
»601. Cette mesure est déclenchée par des
autorités judiciaires d'un Etat, après autorisation de
l'autorité publique selon l'article 695-2 du CPP alinéa
1er.
596 Ibid.
597 Ibid., n° 305, p. 164.
598 Ibid., n° 167, p. 99.
599 Ibid., n° 305, p. 164.
600 Ibid., n° 364, p. 192.
601 WEYEMBERGH (A)., « Coopération judiciaire
pénale », J.-Cl. Europe, 2009, p. 12.
609.
205
Conditions complexes de création. Plus
précisément, c'est avec l'accord préalable du ministre de
la justice et le consentement du ou des Etats membres de l'Union
européenne concernés que l'autorité judiciaire pourra
créer une ECE dans le cadre d'une procédure française sur
des enquêtes complexes impliquant la mobilisation d'importants moyens et
qui concernent d'autres Etats membres. En plus du consentement des
autorités compétentes qui peut être soit politique, soit
judiciaire, il faut préalablement la signature d'un protocole d'accord
entre ces autorités. Le protocole d'accord décrit les
infractions, la durée de l'enquête, et le plan d'action
opérationnel.
610. Application aux trafiquants de faux documents
d'identité se déplaçant sur le territoire de plusieurs
Etats membres. En l'espèce, si des trafiquants faisant partie
d'une filière de maintien se déplacent sur le territoire de
plusieurs Etats membres de l'Union européenne, et s'ils commettent par
exemple des infractions de faux et/ou d'usage de faux documents sur le
territoire français, les autorités françaises pourront
déclencher l'ouverture d'une procédure judiciaire à
l'encontre de ce groupe de trafiquants.
611. Prérogatives des agents étrangers
détachés. Les agents étrangers
détachés par d'autres Etats membres vont seconder les OPJ
français, sous les ordres de l'autorité judiciaire
française compétente. Leurs missions se limiteront le cas
échant à quatre prérogatives selon les articles 695-2
1° à 695-2 4° du CPP : constater les crimes ou les
délits par procès-verbal dans les formes prévues par le
droit de leur Etat, recevoir par procès-verbal tous renseignements
aidant à l'enquête, seconder les OPJ français pour
effectuer des actes opérationnels, procéder à des
surveillances.
612. Surveillances et infiltrations des
filières de maintien. Par conséquent, la technique des
ECE permet de procéder à des surveillances et à des
infiltrations au sein de filières de maintien expertes en fraude
documentaire, sous réserve d'une autorisation de l'autorité
française compétente, soit le procureur de la République,
soit le juge d'instruction, avec le consentement des Etats membres qui
détachent leurs équipes policières sur le territoire
français.
613. Il existe encore un mécanisme plus poussé
en matière de dispositif sécuritaire de surveillance
policière : les techniques spéciales transfrontalières
d'investigations.
206
c) Les techniques spéciales transfrontalières
d'investigation applicables aux filières de maintien de faux documents
d'identité
614. Investigations spéciales
transfrontalières. « Les techniques spéciales
transfrontalières d'investigation »602 font partie des
mécanismes de dispositifs de surveillance policière.
Effectivement, elles concernent les « livraisons surveillées et les
enquêtes discrètes »603. En ce sens, les agents de
police sont infiltrés ou surveillent sous les ordres de
l'autorité sur le territoire duquel l'opération est
effectuée604. « En outre, un nouvel article 706-80-1 du
CPP prévoit que dans le cadre d'une opération de surveillance,
les OPJ peuvent, avec l'autorisation du procureur de la République ou du
juge d'instruction, demander à tout fonctionnaire ou agent public de ne
pas procéder au contrôle et à l'interpellation de ces
personnes afin de ne pas compromettre la poursuite des investigations. Le
nouvel article 706-80-2 prévoit la même chose en matière de
livraison surveillée et cela est étendu pour les délits
douaniers avec un nouvel article 67 bis 4 du code des douanes
»605.
615. Opération discrète sur un groupe
organisé de trafiquants de faux documents d'identité.
Par exemple, lorsque l'opération discrète se passe sur
le territoire français, les agents étrangers sont placés
sous la direction des OPJ français après autorisation du
procureur de la République de Paris ou du juge d'instruction du
même ressort selon l'article 694-7 du CPP. Par conséquent, ce
dispositif sécuritaire de surveillance policière peut très
bien s'appliquer à un groupe organisé de trafiquants de faux
documents d'identité lié à une filière de maintien
d'immigration illégale se situant sur le territoire de la
République.
602 HERRAN (T.), Essai d'une entraide policière
internationale, préc., n° 338, p. 178.
603 Ibid.
604 Ibid.
605 FUCINI (S.), « Loi de réforme de la justice :
principales dispositions pénales : Cons. const. 21 mars 2019,
décis. N° 2019-778 DC L. n° 2019-222, 23 mars 2019, de
programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice », Dalloz
Actualité, 2 avril 2019. Le nouvel article 706-80-2 du CPP dispose
que « dans le cadre d'une opération de surveillance de
l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la
commission de l'une des infractions entrant dans le champ d'application des
articles 706-73, 706-73-1 ou 706-74 ou servant à les commettre, et
lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction
l'exigent, les OPJ et, sous leur autorité, les agents de police
judiciaire en charge des investigations peuvent, avec l'autorisation du
procureur de la République ou du juge d'instruction saisi des faits, qui
en avise préalablement le parquet, livrer ou délivrer à la
place des prestataires de services postaux et des opérateurs de fret ces
objets, biens ou produits, sans être pénalement responsables
».
616.
207
D'autres dispositifs sécuritaires se sont
développés à partir d'accords bilatéraux.
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