Pour M. NAHIMANA83, la lenteur dans l'inscription
du site de la faille de Nyakazu et des chutes de Karera s'explique pour
quelques raisons. D'abord, le Burundi ne s'est pas intéressé a
faire inscrire ses biens sur la liste du patrimoine mondial dès
après son adhésion à la Convention concernant la
protection du patrimoine mondial, culturel et naturel le 19 mai 1982. C'est une
entreprise assez récente et le Burundi ne dispose pas d'experts
très qualifiés dans l'élaboration des dossiers de
proposition d'inscription d'un bien. Les seuls qui sont au Ministère de
la Jeunesse, Sports et Culture ont reçu une formation
accélérée et ont besoin d'un coup de main des experts
externes surtout ceux de l'UNESCO pour la confection d'un tel dossier. Un autre
hic concerne le budget qui n'est pas assez suffisant pour mener toutes les
tâches nécessaires à cette fin.
A ajouter qu'aujourd'hui, le processus d'inscription des
biens sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO est devenu plus complexe
qu'auparavant.
L'analyse détaillée de tous les dossiers
d'inscription des biens inscrits sur la Liste du patrimoine mondial
menée à la fin des années 1990 a
révélé une situation qui aurait pu mettre en péril
la crédibilité de la Convention. Des éléments aussi
essentiels que les limites du bien inscrit étaient souvent inconnus ou
imprécis. Les inscriptions étaient généralement
constituées de quelques pages contenant des données assez
générales. Avec une documentation aussi limitée, la
protection et la gestion mêmes du bien inscrit auraient pu être
compromises84.
Ces points faibles justifiaient un meilleur processus
d'inscription. En 1999, une vérification du caractère complet des
dossiers d'inscription fut entamée. Jusqu'alors, les inscriptions
étaient automatiquement transmises aux Organisations consultatives sans
vérification préalable de leur contenu par le Secrétariat.
En conséquence, un
83 Entretien avec Monsieur Ernest NAHIMANA, Chef de service
Musée, Sites historiques et Monuments au Ministère de la
Jeunesse, Sports et Culture (Burundi) le 28 août 2014
84 UNESCO / ICCROM / ICOMOS / UICN, Établir une
proposition d'inscription au patrimoine mondial, Deuxième Edition,
2011 ; p 2
32
grand nombre de dossiers d'inscription de biens inscrits entre
1978 et 1998 sont globalement insuffisants en termes de
conservation85.
Lorsqu'une version révisée des Orientations est
entrée en vigueur en 2005, le Comité du patrimoine mondial a
avalisé la vérification du caractère complet de chaque
dossier ainsi qu'un nouveau formulaire d'inscription plus
détaillé et annoté. Depuis 1999, l'amélioration
générale de la qualité des informations contenues dans les
dossiers a renforcé de façon significative le processus
d'inscription au patrimoine mondial. Cela a permis en outre de mettre en oeuvre
la Convention de façon encore plus précise, notamment en
développant et en facilitant le suivi de l'état de conservation
des biens inscrits86.
Comparativement au Canal du Midi (France), un bien a
été inscrit sur la Liste en 1996 au terme d'un travail de
préparation qui a duré deux ans (délais relativement
courts). Les principaux facteurs du retard dans le processus d'inscription de
la faille de Nyakazu et des chutes de Karera peuvent être les suivants
:
· un comité de pilotage et un comité
scientifique efficaces n'ont pas été constitués ;
· les experts burundais ne sont pas bien
préparés, sur le plan intellectuel et pratique, et à
même d'établir le dossier ;
· des tensions avec la population environnante du site
n'ont été totalement réglées;
· le budget pour le financement du processus n'est pas
suffisant;
· la bonne documentation de base est toujours en cours
d'élaboration.
En résumé, les études qui ont
été menées jusqu'ici penchent en faveur d'une valeur
universelle exceptionnelle du site de la faille de Nyakazu et des chutes de la
Karera, autrement connu comme le Massif sacré du Nkoma ou Monuments
Naturels de l'Est du Burundi.
85 Idem
86 UNESCO / ICCROM / ICOMOS / UICN, Établir une
proposition d'inscription au patrimoine mondial, Deuxième Edition,
2011 ; p 2
33
La suite devrait permettre de prouver combien l'inscription de
ce site sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO serait
bénéfique pour la protection de l'environnement de ces monuments
quoi qu'il reste encore des défis à relever afin de mener
à bien ce projet.