Le nantissement des droits de propriété intellectuelle.( Télécharger le fichier original )par Franklin Kennedy ASSONJI FONGUE Univesité de Ngaoudéré (Cameroun) - Master 2014 |
B- La nécessité de clairement définir le contenu du nantissementDéfinir clairement le contenu du nantissement, constitue une autre étape non moins importante, du processus d'amélioration à mettre en place. En effet il s'avère nécessaire de savoir précisément quels seront les droits qui pourront faire l'objet du nantissement. L'intérêt d'une telle approche réside dans la multiplicité des droits qui sont liés à l'auteur. En effet, il est connu que l'auteur a, sur sa création, des droits moraux qui sont inaliénables, et des droits patrimoniaux sur lesquelles il peut exercer bon nombre d'actes, parmi lesquels, le nantissement. Par ailleurs il faut noter qu'il existe une certaine complication tenant au nantissement des droits d'auteur. Cette complication est précisément liée à l'oeuvre elle-même. Le problème qui se pose ici est celui de la séparation de l'oeuvre et du support. A ce propos précisément, La propriété incorporelle de l'oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet matériel qui en est le support. Comme nous le fait remarquer la Cour de Cassation française159, la remise de l'objet matériel à un tiers n'implique pas la divulgation de cette oeuvre. Dans la plupart des cas, des litiges peuvent opposer le propriétaire de l'objet matériel et le titulaire des droits d'auteur, en particulier, l'exercice du droit patrimonial. Le droit romain distinguait les notions d'opus et d'opéra. L'opus désignait la chose matérielle, la copie ou le manuscrit dont la 159 Cass. 1ere, 29 novembre 2005, www.atoute.org. Inédit. Le nantissement des droits de propriété intellectuelle possession peut être transférée, tandis qu'opéra désigne un discours, c'est-à-dire une « affaire » que l'éditeur ne peut conduire qu'au nom de l'auteur. L'exemplaire d'après lequel l'éditeur fait imprimer un ouvrage de l'auteur (opus) et appartient entièrement à l'éditeur après que celui-ci l'a acquis sous forme de manuscrit ou d'imprimé pour en faire tout ce qu'il veut et ce qui peut être fait en son nom. Mais l'usage qu'il ne peut en faire qu'au nom d'un autre (c'est-à-dire l'auteur) est une affaire (opéra) que cet autre effectue. Selon la loi camerounaise160en son article 21 alinéa 1er : « La propriété d'une oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet matériel. Sauf stipulation contraire, l'acquéreur de l'original ou d'un exemplaire d'une n'est investi, du fait de cette acquisition, d'aucun des droits d'auteur prévus par la présente loi. Ces droits subsistent en la personne du premier titulaire du droit d'auteur ou de ses ayants-cause qui ne pourront toutefois exiger de l'acquéreur la mise à leur disposition dudit objet. » Cet article traduit effectivement de la dichotomie entre d'une part, les droits intellectuels rattachés à l'oeuvre161 et les droits corporels sur l'oeuvre. Le législateur français va dans le même sens et cela à travers l'article L.111-3 du Code de la Propriété Intellectuelle162. En effet, on semble être en présence de deux droits autonomes. Ainsi, la propriété d'une oeuvre ne suit pas celle de son support. La difficulté viendra le plus souvent de ce que le comportement du propriétaire est susceptible de troubler les droits moraux de l'auteur. Les finalités du droit moral et du droit de propriété ne sont pas à mettre sur le même plan. Le droit de propriété veut assurer l'emprise privative, absolue d'un sujet sur l'objet. Le droit moral offre à l'auteur le droit au respect de son oeuvre, le droit de l'utiliser comme il le conçoit163. En prenant l'exemple d'un logiciel, il faut préciser que celui-ci ne doit pas être confondu avec son support. De même, l'oeuvre d'art ne saurait se réduire à son support matériel, ni s'identifier à lui. Il est donc aisé de constater que lorsque le logiciel ou toute autre oeuvre de l'esprit fait l'objet d'un contrat de nantissement, cela pourrait provoquer des mésententes entre le constituant et le créancier. En tout état de cause, il doit être rappelé dans tout contrat de nantissement des droits d'auteur que ledit contrat porte sur les biens incorporels et non sur l'objet corporel. La dépossession d'un tableau ou d'une sculpture n'emportera pas ipso facto nantissement du bien incorporel. De plus, la 160 Loi du 19 décembre 2000 sur le droit d'auteur, op.cit. 161 En effet, une partie peut être cédée. 162 L'alinéa 1er fait ressortir que la propriété incorporelle définie par l'article L.111-1 est indépendante de la propriété de l'objet matériel. Il énonce en ces termes que: « L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que les attributs d'ordre patrimonial. ». 163 C'est la distinction entre le droit « introverti» et le droit «extraverti ». Le nantissement des droits de propriété intellectuelle dépossession du support matériel ne saurait faire obstacle à l'exercice du droit d'auteur164. Il s'avère que ce contrat de nantissement se limite aux droits patrimoniaux accordés à l'auteur. Il va à présent falloir examiner le réaménagement inspiré des législations étrangères. |
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