Section 2 : Le nécessaire
réaménagement du régime du nantissement du droit
d'auteur
L'ensemble des problèmes auxquelles est
confronté le droit d'auteur du fait de son harmonisation invite à
rechercher des moyens visant sinon à les éliminer, du moins
à les limiter à leur simple expression. C'est ce qui conduit
à réaménager le régime du nantissement. Pour
être efficace, ce réaménagement devra être
accentué sur le plan régional (A), puisque c'est celui qui nous
intéresse ici. On pourrait aussi se servir des législations
étrangères (B), et française notamment, pour combler les
lacunes éventuelles de notre propre droit régional.
154 STENGER (J.-P), « Le gage des droits de
propriété intellectuelle », RDPI, 1995, n°61,
p. 16 ; VIVANT M. « L'immatériel en sûreté», in
Mélanges Michel Cabrillac, Paris, Dalloz, Litec, 1999, n°
1, p. 405.
155 Le débiteur n'existant pas dans le cas du droit
d'auteur comme dans l'hypothèse d'un droit de créance.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
§ 1. Le réaménagement du droit
régional
Le réaménagement du droit régional
nécessite que l'on s'attarde sur un double aspect. Le premier aspect est
sans doute l'uniformisation du droit d'auteur (A), au même titre que
celui de la propriété industrielle. Le second aspect quant
à lui peut être considéré comme une
conséquence du premier, il s'agit de la nécessité de
clairement définir le contenu du nantissement des droits d'auteur
(B).
A- L'uniformisation du droit d'auteur
Pour le docteur NGOMBE156, le droit d'auteur dans
les Etats membres de l'OAPI a fait l'objet d'une uniformisation
inachevée. Pour cet auteur, les limites actuelles de l'harmonisation
concernent aussi bien les dispositions relatives à l'existence
même du droit, que les dispositions relatives à sa mise en oeuvre.
Par rapport au premier point, les limites se constatent autour du champ et du
contenu de la protection. Par rapport au second point, c'est-à-dire les
dispositions relatives à la mise en oeuvre du droit, les limites
concernent l'exploration des droits, la procédure et les sanctions.
L'auteur propose donc, pour améliorer cette situation, d'étendre
le champ matériel de l'harmonisation d'une part, et d'étendre le
champ géographique de l'harmonisation d'autre part.
Sans être retissant aux propositions de cet auteur, on
pourrait se permettre d'envisager une uniformisation du droit d'auteur. La
forme d'uniformisation qui aide davantage à atteindre une
uniformisation-résultat est la codification. Selon le professeur
GRIMALDI, celle-ci s'entend « d'un exposé rationnel et
cohérent du droit civil, d'un corpus qui, selon une heureuse expression,
« réunit» et « unit» [...] et qui établit
ainsi le droit commun »157. Cependant, en raison des nombreux
fondements qu'elle requiert en amont, la codification n'a jusqu'ici
été formellement utilisée qu'au sein d'entités
étatiques d'influence romano-germanique158.
Comme on peut le constater, l'unification et l'uniformisation
ne laissent guère de pouvoir substantiel aux différents acteurs
législatifs nationaux dans les domaines qu'ils entendent encadrer. C'est
cette exigence qui amoindrit leur portée pratique. Élaborer une
législation au contenu identique dans un ensemble d'entités
étatiques reviendrait à admettre que leurs
sociétés, du moins les diverses élites nationales, ont des
intérêts centripètes au moment de l'unification ou de
l'uniformisation. Or,
156 NGOMBE (L. Y.), « le droit d'auteur dans les Etats
membres de l'Organisation africaine de la propriété
intellectuelle (OAPI) : une harmonisation inachevée ? » e.Bulletin
du droit d'auteur, janvier - mars 2005.
157 GRIMALDI (M.), Codes et codifications : pour
souligner le dixième anniversaire de l'entrée en vigueur du
Code civil du Québec et le bicentenaire du Code
Napoléonien », [2005].
158 OPPETIT (B.), « De la codification », D.
chron. 1996, n°33-35.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
il semble bien que les intérêts et les valeurs
défendus par une société à une période
déterminée ne sont pas les mêmes que ceux approuvés
dans une autre société au cours de la même période.
Au surplus, dans une même société, les valeurs, les
intérêts varient notamment suivant les classes sociales,
l'éducation reçue, les tranches d'âges et les
catégories professionnelles. Il faut toutefois noter qu'à travers
la lex mercatoria et ses récents succédanés,
semble émerger un système normatif commun aux opérateurs
du commerce international.
En clair, l'uniformisation participe d'une approche moniste
qui, traditionnellement, suppose qu'un texte international dûment
ratifié par un État devienne une source directe de droit sans
qu'il soit nécessaire d'en reprendre les dispositions dans une loi
interne. Uniformiser les règles qui régissent le nantissement du
droit d'auteur reviendrait donc à faire disparaitre les
différentes lois nationales au profit d'une règle qui serait
communément applicable à l'ensemble des Etats membres de l'OHADA
et de l'OAPI. Une fois cette perspective accomplie, il reste important de
déterminer clairement le contenu du nantissement.
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