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L'ours des Pyrénées : variabilité des images, place dans le territoire et implications socio-politiques de sa réintroduction.

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par Elise LABYE
Université de Toulouse-Le-Mirail - Master 2 Anthropologie Sociale et Historique 2010
  

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III Deux portraits plutôt atypiques et significatifs.

A : Jérôme

Agé d'environ trente-cinq ans, Jérôme est accompagnateur en montagne et agent territorial à mi-temps, de plus il possède des chevaux qui montent en estive avec les autres troupeaux du village. Ayant grandi à l'autre bout de la France, il est revenu vivre et travailler dans le village où son grand-père avait grandi, mais qu'il avait quitté pour faire carrière ailleurs. Ses différentes occupations l'amène à avoir des activités quotidiennes diversifiées et à côtoyer différents groupes sociaux ayant chacun des sensibilités diverses. Au départ, de par sa « sensibilité naturaliste », comme il l'exprime lui-même, il était très favorable au projet de restauration d'une population viable d'ours et enthousiaste de constater que certains des ours réintroduits s'étaient installé à proximité, dénotant par là que le biotope leur était favorable. Il estime que l'ours ne représente pas à priori un danger pour ceux qui fréquentent la montagne, ce qu'il explique au gens qu'il emmène en montagne ; et pour lui l'ours des Pyrénées n'existe pas, il y a simplement l'espèce « ours brun », et donc les ours réintroduits, ne sont pas différents. Mais, « en tant que montagnard », (il appelle montagnards ceux qui vivent au-delà de 900m dans de petits villages ou bien « les ruraux de la montagne ») il se dit désormais un peu circonspect par rapport au programme de réintroduction. Il n'y voit pas d'avantages particuliers pour le tourisme liés à l'attractivité ou à la notoriété due à la présence des ours. Il

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est très critique sur la façon dont cela a été mis en oeuvre et estime finalement que c'est un choix politique qui a été imposé à ceux qui vivent en montagne.

S'il ne pense pas que la présence de l'ours remette en cause directement l'élevage, il déplore néanmoins que l'on n'ait pas mis en place les conditions pour permettre que le pastoralisme soit véritablement pérenne. Pour lui, la présence des ours est très problématique pour le pastoralisme tel qu'il est pratiqué dans les Pyrénées centrales. Il aurait fallu selon lui que « les équilibres de la montagne soient considérés plus globalement », ce qui l'amène à penser que ce projet est « une espèce de délire un peu écologiste ». Il regrette que cela n'est pas été mieux pensé et préparé afin que la cohabitation soit possible entre les activités d'élevage et la présence des ours, il pense que c'est désormais trop tard, que les opposants ne changeront plus d'avis.

Parallèlement à la question de la biodiversité, il considère l'activité humaine dans les zones de montagne, constate les difficultés existantes pour que les gens continuent à y vivre, notamment les éleveurs et en arrive finalement à dire qu'il n'a pas d'avis sur la réintroduction, que du moins il n'est pas contre. Dans le contexte actuel, qu'il estime aussi être du à une mauvaise façon de procéder de la part de l'État et qui a conduit à une sorte de « reflexe communautaire » au sein d'une certaine population pyrénéenne, il se demande si l'ours a encore sa place ou s'il ne l'a plus du tout. Et, pour lui la « résistance passive » qui anime les gens, notamment au sein de l'Aspap, il en est sympathisant même si il n'adhère pas aux positionnements les plus « extrêmes ». Il constate qu'avec le temps, le débat a pris une dimension plus large, il concerne désormais ce choix, qu'il estime imposé, de sanctuariser la montagne et de ne plus laisser sa place à l'homme ; mais aussi la condition des ruraux de la montagne qui fait qu'il est très difficile de vivre au dessus de 1000m d'altitude dans les Pyrénées; la disparition progressive des services publics, notamment les écoles, et le fait que désormais ce soit l'axe européen qu'on privilégie l'amène à penser qu'ils sont un peu comme des laissés-pour-compte. Dans ce contexte, il pense que l'ours joue effectivement le rôle du bouc-émissaire, mais selon lui, c'est plus à raison qu'à tort.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault