De la résolution des marchés publics de travaux en droit positif congolais( Télécharger le fichier original )par Prince KITENGIE MALANGU Université de Lubumbashi ( UNILU ) République démocratique du Congo - Licence en droit public 2006 |
Section III :CONDITIONS DE VALIDITE DU MARCHE DE TRAVAUX PUBLICSPour être valide, le marché public de travaux doit réunir certaines conditions de fonds et de forme. §1 conditions de fondsL'article 8 du code civil congolais livre III pose les conditions de validité de tout contrat à savoir le consentement, la capacité, la cause et l'objet illicites. C'est le droit commun des contrats. Le marché public de travaux ne fait pas exception mais seulement ces éléments sont adaptés aux réalités du droit administratif des contrats. Examinons quelques conditions. 1. Le consentementL'administration qui veut contracter pour exécuter un service de travaux demande à son génie civil d'étudier le projet et de l'évaluer. Elle rédige le cahier spécial des charges et y joint le mètre récapitulatif, des plans et épures, des modèles, échantillons calibres... L'administration lance un avis d'appel d'offre qui est une pollicitation, celle-ci peut être ouverte ou restreinte. Chaque entreprise intéressée vient se soumissionner. L'entreprise qui accepte de se soumissionner émet son consentement. L'administration elle émet son consentement quand le conseil d'adjudications décide de lui attribuer le marché c'est dire que la marché est parfait dès lors que l'administration décide d'attribuer à l'entreprise soumissionnaire. La soumission ne lie pas le soumissionnaire avant la séance publique d'ouverture des soumissions. Toutes fois le contrat commence à, produire ses effets à partir de la notification à l'adjudicataire de la décision d'attribution du marché 2. La capacité de contracterCette condition concerne à la fois l'administration et l'entrepreneur adjudicataire du marché. Elle concerne l'aptitude à passer le marché public de travaux et celle d'en être adjudicataire. Concernant l'administration, l'article 1er de l'ordonnance-loi n° 69/054 énumère les personnes publiques autorisées à passer les marchés publics de travaux notamment la République démocratique du Congo, la ville de Kinshasa, les zones urbaines, les collectivités rurales et des organismes de droit public qui exercent certaines mission revenant normalement à la république et sur lesquels celle-ci exerce un pouvoir de tutelle. Il ressort de cette disposition qui du reste est anachronique, que les communes, les districts, les chefferies ... ne peuvent pas initier les marchés de travaux publics sous peine de nullité. Cette restriction s'explique en droit financier et dans la notion de la décentralisation. Pour contracter il faut être une personne, or seules les entités décentralisées sont des personnes publiques et la République elle-même. Et en droit financier, seules les personnes publiques peuvent se doter d'un budget c.à.d. Avoir des ressources et engager les dépenses. A notre avis, nous pensons qu'aujourd'hui, les communes de Kinshasa comme celles de l'intérieur, les secteurs et chefferies peuvent passer les marchés publics de travaux car ayant été érigé en personnes de droit public par la constitution. Quid alors des marchés passés par les entités crées par les mouvements politico-militaires pendant la rébellion en République démocratique du Congo ? La réponse à cette question nous amène à aborder la question du fonctionnaire de fait. Pendant les circonstances exceptionnelles comme la belligérance qui ont eu lieu en République démocratique du Congo, les services publics doivent être assurés en vertu du principe de continuité. Les actes posés par l'autorité de fait sont valables jusqu'au retour de la situation normale si le fonctionnaire de fait avait l'effectivité du pouvoir. Lorsque l'autorité de fait construire par une entreprise un bâtiment administratif, une route, il y a notre avis, un marché de travaux publics pourvu que les critères de fonds soient réunis. Lorsque le RDC-Goma aménage un aéroport à Lodja par une entreprise ruandaise pour permettre les transactions entre sa province de « Kasaï » et la province de Nord-Kivu ou particulièrement Goma sa « capitale», il y a lieu de dire qu'il y a marché public de travaux car il avait effectivité du pouvoir. Concernant l'entrepreneur personne physique et l'entrepreneur société commerciale. Dans la première hypothèse, l'entrepreneur doit être âgé d'au moins 18 ans, non prodigue ni interdit sinon le marché peut être déclaré nul par le juge. Dans la deuxième hypothèse, l'entrepreneur doit d'abord réunir les conditions pour être une société commerciale. Si elle l'est, elle doit avoir comme objet social les travaux publics, être agréée soit à la division provinciale de travaux publics et infrastructures soit par le ministère selon le volume et l'importance de travaux. Examinons tour à tour ces conditions : 1. Etre une société commerciale ayant les travaux publics dans son objet social : Il est question ici de savoir si le soumissionnaire remplit les conditions pour être une société commerciale notamment prendre l'une des 5 formes prévues en République démocratique du Congo, la souscription du capital social, le consentement des associés, la rédaction d'acte spécial authentique ou sous-seing prévue selon le cas, la publicité... La condition relative à la forme ne se pose pas en cas des marchés publics internationaux c'est-à-dire ouvert même à la concurrence des entrepreneurs étrangers qui peuvent aussi se soumissionner à conditions qu'ils remplissent les conditions exigées dans leurs Etats. S'il est établit que l'entrepreneur en présence est une société commerciale, il restera à vérifier si ce dernier a les travaux publics dans son objet social. Il faut souligner qu'il s'agit de la société commerciale sur le plan de la forme et du fond car les travaux publics font partie des actes de commerce aux termes de l'activité 2 du décret 2 aout 1913 sur les commerçants et la preuve des engagements commerciaux. Qu'est ce qu'il faudra alors entendre alors par activités de travail public ? Pour René CHAPUS, comme nous l'avons souligné ci-haut il y a travail public, lorsqu'il y a travail de l'homme et non de la nature, portant sur un ouvrage immobilier et affecter à l'intérêt général32(*). Le droit Européen des marchés publics de travaux fournit la liste des activités professionnelles correspondant à la nomenclature des industries établies dans les communautés européennes (NICE) a savoir le bâtiment et le génie civil avec ce qui les compose à l'exception : - Des installations industrielles de nature mécanique, électrique et énergétique sauf la partie de ces installations relevant de la technique de construction immobilières - De la construction d'installations nucléaires de caractères scientifiques ou industriels - Des travaux d'excavation, de fonçage de puits, de dragage et d'évacuation des déblais effectués en vue de l'extraction des matières minérales (industries extractives)33(*). Paul RIGAUX distingue dans les travaux publics les gros et les menus ouvrages c'est par exemple la façade d'un bâtiment constitué de briques poreuses et gélives comme gros oeuvre et la cour et une terrasse dont les carrelages sont installées, si la stabilité n'est pas compromise.34(*) En principe, le marché public de travaux porte sur les gros oeuvres, toutes fois il peut aussi porter sur les petits ouvrages pourvu que le prix global de travaux atteigne plus ou moins le seuil légal et réunisse les critères d'un travail public. L'arrêté ministériel du...................................................... définissant les catégories et les sous catégories de travaux. Sont dans les catégories, les marchés complexes impliquant la réalisation de travaux de nature diverse et nécessitant la coordination des différentes techniques dans l'industrie de la construction, ou les travaux qui ne font pas l'objet d'une sous-catégorie spécifique. Sont rangés dans des sous catégories les travaux de spécialités ou les travaux constituant un élément des ouvrages rangés dans une catégorie quand ils sont adjugés séparément. Dans l'espace OHADA l'acte uniforme sur le droit commercial général en son article 3 ne cite pas les travaux publics parmi les actes de commerce contrairement à l'article 2 du décret du 02 aout 1913 sur les commerçants et la preuve des engagements commerciaux qui cite `expressis verbis' les travaux publics parmi les actes de commerce. Mais cette disposition de l'acte uniforme précise que tout acte effectué par une société commerciale est réputé acte de commerce. Il s'agit là d'un critère organique et non matériel. Quid lorsque un groupe d'entreprise (association momentanée) se soumissionne comme candidat à l'adjudication ou même une société de fait ? Généralement, on admet au groupement d'entreprises de se soumissionner. Une telle autorisation semble aller de soi35(*). En droit européen il existe des règles communes sur la participation qui reconnaissent la capacité aux groupements d'entreprises de passer un marché de travaux publics36(*). Dans l'espace OHADA, l'acte uniforme du 1er janvier 2000 prévoit les règles de fonctionnement des groupes d'intérêts économiques qui ont été généralisés. On peut alors déduire que ces derniers peuvent se soumissionner et être adjudicataires s'ils ont été agréés conformément à la législation interne de l'Etat membre de l'OHADA qui veut passer un marché de travaux publics.37(*) Le droit des marchés publics de travaux reconnait aux associations d'entrepreneurs la capacité à contracter marché de travaux publics dans la mesure où l'article 26 du cahier général des échanges pose à son alinéa 4 «Lorsque l'entreprise est adjugée à une association d'entrepreneurs ou à une personne morale ayant plus d'un gérant, les adjudicataires doivent choisir l'un d'eux pour les représenter avec pleins pouvoirs ... » ; l'article 15 de l'ordonnance du 05 décembre 1969 qui considère leur engagement solidaire et indivisible. Cette capacité de passer les marchés publics de travaux en droit congolais se parfait par l'enregistrement au ministère de travaux publics et infrastructures qui délivre à l'entreprise de travaux publics une certificat selon la catégorie qu'elle mérite. On peut citer à titre indicatif EGMF (Entreprise Générale MALTA FORREST), SAFRICAS, BM Trading, MCK Trucks company,... c'est le sens de l'article 13 paragraphe 2, litera C de l'ordonnance n°69/279 du 05 décembre 1969. L'agréation se fait sur le principe du double classement, l'un de travaux selon leur nature et leur importance financière et l'autre des entrepreneurs selon leur spécialité et leur capacité financière.38(*) L'entreprise exclue du circuit des marchés publics de travaux ne peut être admise à se soumissionner et devenir adjudicataire sous peine de nullité du marché. Contrairement au droit belge en droit congolais, les ASBL font l'objet d'une agréation spéciale, il en est de même de personnes physiques sauf l'association d'entrepreneurs. Mais la pratique révèle qu'une autorisation même tacite de l'autorité adjudicatrice est nécessaire pour passer le marché. * 32 CHAPUS René, Droit administratif général, tome 2, 12ème édition, collection DOMAT DROIT PUBLIC, Montchrestien, PARIS, p.537-538 * 33 Lire avec attention la directive du conseil des communautés européennes du 26 juillet 1971, n°71/304 en article 2 litera et son annexe (JOCE du 16/08/1971). * 34 RIGAUX Paul, Droit de l'architecte, larcier Bruxelles 1993, p.390-391 * 35 FLAMME et Alii op cit, p.53 * 36 Idem * 37 ISSA-SAYEGH, OHADA : Traités et actes uniformes, commentés et annotés, juriscop-PARIS, 2002, p.109 * 38 FLAMME et Alii op cit, n°554, p.1025 |
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