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Les déterminants du faible taux de référence des CSI (centre de santé intégré) ruraux vers le CHD (centre hospitalier départemental), dans le district sanitaire de Tahoua, zone d'intervention du projet ALAFIA/GTZ au Niger.

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par Idrissa CHEIFOU
Université Abdou Moumouni de Niamey Niger - Maà®trise en sociologie 2003
  

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3.2.4 L'utilisation des SPT et de la PCIME pour diriger la décision de référer un patient

Dix sept infirmiers sur les 21 sont persuadés que le respect des SPT amène à une hausse importante du nombre de références.

« Les SPT ne tiennent pas compte des spécificités des zones. Un CSI éloigné ne peut pas référer comme un CSI urbain. Certains schémas thérapeutiques échouent alors qu'il suffit de tenter autre chose pour guérir le malade »

Dix-huit infirmiers sur 21 respectent souvent les références selon le guide SPT et deux ne les respectent jamais. Seulement 6 sur 21 (24 %) indiquent qu'ils respectent les SPT par rapport aux références. La PCIME est en général plus acceptée, ce qui est contradictoire parce que la plupart des infirmiers ne sont pas formés pour la PCIME et objectivement la PCIME prévoit plus de références que les SPT. Douze sur 21 affirment que selon eux, les SPT exigent des références qui vont contre leur prestige.

L'attitude plutôt négative des infirmiers envers les références est illustrée par leur opinion sur les SPT :

« S'il faut suivre les SPT, 50% des patients seront référés »

« 90 % des enfants en CN montrent des signes de malnutrition alors qu'on ne peut pas les référer tous »

« Les SPT empêchent aux gens de réfléchir »

« Si on respectait les SPT, l'hôpital sera débordé »

« En respectant les SPT, on sera un simple service d'aiguillage. »

« En respectant les SPT, nous allons perdre notre crédibilité aux yeux des patients. »

« En respectant les SPT, on a le sentiment de ne rien valoir »

« Si nous décidons de respecter rigoureusement les SPT, la population va bouder »

« Les SPT, c'est de la merde »

« Les SPT sont faites uniquement pour diminuer le coût des soins »

« Les SPT diminuent la fréquentation car elles proposent des comprimés alors que la population a plus confiance aux injectables »

« Les SPT diminuent notre prestige »

Les idées des infirmiers sur les SPT sont colorées émotionnellement. Les SPT ont au Niger fait objet de plusieurs études qui prouvent le contraire de la plupart des critiques formulées ici. Les agents de santé expriment ici leur crainte de perdre leur prestige en référant des patients (ne rien valoir, service d'aiguillage, crédibilité aux yeux des patients).

Les SPT diminuent le prestige des infirmiers en ce sens qu'ils parlent souvent « d'expérience personnelle, de bon sens, de tenter autre chose », qui sont pour eux une alternative à la référence.

Selon la thèse de doctorat de Dr Jaharou (Jaharou, 2000), les SPT actuelles, si elles étaient correctement appliquées, élèveraient la référence à un taux de 20%° des nouveaux cas (dont un quart d'urgences), ce qui est tout à fait raisonnable comparé avec des taux de référence retrouvés dans la littérature.

Les remarques ouvertement hostiles aux SPT doivent être pondérées aussi avec les observations sur le terrain des hospitalisations réalisées au niveau du CSI (voir plus loin).

Certaines réflexions témoignent d'une analyse plus fondée :

« Pour un cas de pneumonie, même si on réfère, ils ne vont pas observer la référence ; donc souvent c'est même dangereux de référer car le patient va se résigner et ne rien tenter »

Une référence non respectée par le patient peut évidemment affecter sa santé . Une référence non fondée pourrait mettre en danger la vie du patient en cas de refus, puisque le patient ne poursuivrait plus son traitement au CSI non plus.

« Les SPT augmentent le nombre de références justifiées seulement » a été mentionné huit fois pour les urgences et 7 fois pour les références à froid. « Les SPT diminuent le nombre de références » cité trois fois.

Quelques infirmiers ont une attitude positive vis-à-vis des SPT :

« Sans les SPT les gens bricolent » ; « Les SPT nous aident beaucoup ». Les réactions positives proviennent clairement des infirmiers les plus formés dans la matière.

Plusieurs observations directes peuvent illustrer la réticence des agents de santé à référer des patients et le non-respect des SPT. Les cas montrent souvent que les soins continus et/ou intensifs ne peuvent pas être assurés au niveau du CSI, bien que tous les produits pharmaceutiques soient disponibles.

Exemple 6 :

Lors d'une supervision dans le CSI, les superviseurs observent l'hospitalisation depuis 3 jours, d'un patient qui souffre de la méningite. La personne était correctement traitée avec le chloramphénicol huileux.

Le patient était sévèrement déshydraté, il avait fait des convulsions pendant la nuit sans traitement supplémentaire et malgré sa fièvre très élevée, le chloramphénicol huileux n'était pas répété.

Exemple 7 :

Lors d'une supervision au CSI, les superviseurs ont rencontré le cas d'un enfant sévèrement malnutri et déshydraté avec une forte fièvre (palu présumé) et avec la conscience sérieusement baissée.

Bien que le CSI se trouve à peine à 20 km de l'hôpital, que l'ambulance et la radio soient en bon état et que -par coïncidence- une voiture de supervision soit disponible, l'infirmier n'a pas eu le réflexe de référer l'enfant.

L'infirmier qui a vainement essayé de replacer à deux reprises la perfusion intraveineuse, a toutefois conclut que « ça ira aussi par voie orale (avec les génériques) ».

Exemple 8 :

Pendant le monitorage de la recherche, un homme ictérique avec une fièvre de 40° est mis en observation dans le CSI pendant 4 jours.

Finalement l'homme est référé au CHD, où il meurt après 48 heures.

Exemple 9 :

Une femme est admise au CHD pour hyperthermie et diarrhée, avec dans son carnet : mise en observation avec cotrimoxazole 2X2 comp. et Quinimax 0.6 inj pendant 6 jours au CSI.

Le femme est décédée au CHD la nuit de son arrivée avec la GE ++++.

Exemple 10 :

Lors du monitorage de la présente enquête, le médecin rencontre au CSI une femme avec une hémorragie post-partum, mise en observation avec une prescription de fer-foldine.

Puisque le médecin était présent, l'infirmier lui a demandé d'examiner la patiente.

Une référence d'urgence était demandée et à l'admission au CHD, la femme avait une hématocrite à 10 %. Un curettage a pu la sauver.

Exemple 11 :

Lors d'une formation en malnutrition, un médecin observe qu'il avait demandé ce jour-là la référence de deux enfants sévèrement malnutris du CSI urbain au CHD à 1 km de distance. Les agents de santé n'ont jamais proposé la référence aux mères.

Pendant les discussions, les infirmiers ont confirmé qu'ils ne réfèreraient jamais de tels cas, parce que « ça ne vaut pas la peine et l'hôpital serait submergé ».

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