4.4.2. Suivi de la mise en
oeuvre des activités de l'exploitation
4.4.2.1. Producteurs et encadreurs
en T&V
A la question suivante `'Comment les producteurs
suivent-ils la mise en oeuvre de leurs activités agricoles ?'', la
réponse est qu'on s'inspire du calendrier agricole. Le calendrier
agricole est mis au point par les structures déconcentrées des
CeRPA. C'est sur la base de ce calendrier agricole donnant priorité au
coton et au maïs que les encadreurs peuvent suivre les activités
des producteurs. Le paradoxe ici est que seulement 20% de l'effectif des
producteurs en T&V de l'échantillon arrive à respecter les
prescriptions du calendrier. La majorité, les 80% quant
à elle n'a presque jamais comme objectif d'atteindre les performances
maximales de production. Pour cette raison elle ne se contraint pas au strict
respect des dates de sarclage, de fumure etc. Cette majorité constate
des anomalies telles que l'envahissement de champ de maïs ou de sorgho par
les mauvaises herbes et le retard dans le traitement d'un champ de coton. Dans
cette situation ces producteurs préfèrent faire d'abord le
traitement, puis ensuite reviennent sur le sarclage des céréales
parce qu'ils estiment avoir déjà trop investi dans le coton et en
attendent beaucoup pour ne pas s'en occuper.
« Quant aux céréales de toutes les
manières on trouvera toujours quelque chose à récolter et
dans les moments durs de pénurie nous nous soutenons pour joindre les
deux bouts. »
Le suivi de l'évolution des activités de
l'exploitation ne se fait donc pas en se fixant des objectifs ni en fonction
d'une périodicité, ni de respect des itinéraires
techniques. Ainsi, il est très rare que s'effectuent des
réajustements dans la mesure où la majorité des
décisions souvent d'ordre tactique sont prises au jour le jour.
Toujours est-il que le producteur ne dispose pas d'outils lui
permettant de suivre l'évolution des paramètres de son
exploitation tels que la main-d'oeuvre, les temps des travaux mis en oeuvre, et
les moyens. Il a une perception personnelle de sa situation et les indicateurs
de suivi de l'exploitation varient d'un chef d'exploitation à l'autre.
Il peut s'agir de la taille des feuilles, de leur couleur, leur morphologie et
dès qu'une anomalie est constatée, les producteurs ont recours
à l'encadreur.
Pour les encadreurs enquêtés, le suivi est la
chose la plus simple à faire. Elle concerne notamment la visite
d'exploitation où l'encadreur fait des constats sur l'état
d'entretien du champ et les dates de traitement. Les prescriptions sont
données par rapport aux écarts constatés entre les
démonstrations faites, les techniques et les dates
préconisées. Un autre objectif des encadreurs durant le suivi est
de collecter les informations relatives à l'exploitation afin de
rédiger le rapport d'activité. Très peu de producteurs
bénéficient d'un suivi réel des activités de leurs
exploitations. La minorité qui est suivie l'est exclusivement dans le
cadre de la production du coton. Puisque aucun objectif n'était
défini en commun c'est l'encadreur qui sait les éléments
qu'il vient suivre dans l'exploitation du producteur.
4.4.2.2. Producteurs et conseillers en CEF
Les producteurs en CEF disposent de plusieurs outils leur
permettant de suivre l'évolution des activités dans leurs
exploitations. Bien entendu, ce ne sont pas les outils qui sont importants mais
les analyses qu'ils permettent de faire. Ainsi, nous avons pu recenser quatre
différents outils qui interviennent dans le suivi des activités
de l'exploitation agricole familiale : le journal de caisse, la fiche de
stock, le cahier d'utilisation de la main d'oeuvre/intrants et la fiche de
conduite des cultures. Le tableau n°8 présente le pourcentage
d'utilisation de ces différents outils.
Tableau n°8 : Pourcentage de
producteurs CEF utilisant les outils de suivi.
Outils
|
Journal de caisse
|
Fiche de stock
|
Cahier d'utilisation de la main d'oeuvre
|
Fiche de conduite des cultures
|
pourcentage de producteurs l'utilisant
|
60
|
50
|
10
|
20
|
Source Données d'enquête Kandi
2008.
· Le journal de caisse cet outil est rempli
par 60% des producteurs CEF enquêtés. C'est un outil de suivi de
la trésorerie du ménage, il permet au producteur de suivre les
entrées et les sorties d'argent, les achats et les ventes relatifs aussi
bien à l'exploitation qu'au ménage. Le chef d'exploitation doit
aussi y noter les dons qu'il a reçus ou effectués. C'est un outil
qui est rempli tous les jours par le producteur (voir exemplaire en
annexe). Il permet à l'exploitant de tirer le solde journalier de
sa trésorerie afin de connaitre ses capacités financières.
Cet outil est effectivement rempli par les nouveaux adhérents en CEF
alpha et surtout par les femmes qui effectuent le petit commerce. Quant
aux producteurs CEF français, très peu d'entre eux
continuent à remplir ce document parce que trop contraignant. Ceux-ci
sont tout de même conscients des effets issus de l'analyse des
synthèses effectuées grâce à cet outil avec l'aide
des conseillers, effets sur lesquels nous reviendrons dans le chapitre 6 plus
amplement. Il permet au producteur de savoir si les estimations
effectuées dans son plan de campagne sont réalisables à un
moment donné de l'exécution de ses activités ; si non
il prend des dispositions pour revoir à la baisse soit les superficies
à emblaver, soit la main-d'oeuvre à utiliser.
· La fiche de stock 50% des producteurs en
CEF remplissent régulièrement cet outil, cette fiche permet
à l'exploitant de suivre l'évolution du stock de vivrier
conservé dans son grenier. Elle est aussi remplie par les producteurs
eux-mêmes et avec le concours de leurs femmes. Cet outil pose aux chefs
d'exploitation un certain nombre de difficultés dans son remplissage que
nous n'évoquerons pas dans ce chapitre. Les producteurs grâce
à cet outil ne sont plus surpris par les déficits alimentaires,
ils peuvent alors prendre des dispositions à temps pour remédier
à cela. Tous les producteurs CEF ne sont pas des modèles pour le
remplissage de cet outil mais tous s'accordent à dire qu'il leur permet
pour le peu de temps (généralement un à deux ans) qu'ils
l'aient rempli et aient eu le temps de l'analyser de savoir ce qui se passe
dans leur entreprise familiale (voir chapitre 6 pour les effets de cet
outil).
· Le cahier d'utilisation de la main
d'oeuvre/intrants c'est l'outil de suivi le moins rempli par les
producteurs (10%). Comme son nom l'indique il permet au producteur de suivre
l'évolution des intrants qu'il utilise dans son exploitation et dans
quelle parcelle il les utilise. De même il lui permet de suivre la
main-d'oeuvre qu'il utilise tant familiale, salariale, que provenant de
l'entraide. Cet outil au bout d'un mois lui permet de savoir dans quelle
opération il a utilisé la main d'oeuvre salariale, pendant
combien d'heure et ce que cela lui a coûté. De même il sait
parmi ses actifs familiaux et dépendants (main-d'oeuvre familiale) qui
est celui qui a le plus travaillé au champ et dans quelle
activité. Beaucoup de conséquences et de changements d'attitudes
ont été notés suite à l'utilisation de cet outil
mais une chose est sûre, c'est que le producteur y voit plus clair dans
le déroulement de ses activités.
· Fiche de conduite des cultures c'est un
outil où le producteur enregistre les différents
paramètres de l'évolution de ses différentes
spéculations, il s'agit de l'enregistrement des dates des
différentes opérations culturales et de constater les
écarts par rapport à celles prévues. Seulement 20% des
producteurs remplissent cet outil.
Il s'agit d'une présentation sommaire des outils
qu'utilisent les producteurs CEF pour le suivi des activités de leur
exploitation familiale. Il est clair qu'ici le producteur tout en suivant ces
paramètres de son exploitation et de sa famille, collecte un bon nombre
d'informations ou de données observées et enregistrées par
lui-même. Il est ici tout simplement amené par le conseiller
à faire dans la mesure de ses capacités, l'auto-analyse des
résultats obtenus, que ceux-ci soient bons ou mauvais.
Il est indispensable de souligner ici que le conseiller suit
tout aussi bien l'évolution des activités de l'exploitation en
effectuant des visites qui d'après ses dires lui permettent de
vérifier certaines données collectées par les
producteurs.
Un autre outil de suivi constitue les échanges entres
producteurs en salle en présence du conseiller. A contrario du premier
groupe, les objectifs des visites d'exploitation sont clairement
définis. Le contenu des visites d'exploitation sera abordé dans
le chapitre suivant.
Nous n'évoquerons pas ici les difficultés
rencontrées par les producteurs dans le remplissage et l'appropriation
de ces différents documents, ni la qualité ou la fiabilité
des données collectées car notre objectif n'est pas
celui-là, mais plutôt de pouvoir situer le producteur dans
l'approche à travers le rôle qu'il joue et la place qu'il y
occupe !
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