4.3. Planification des
activités de l'exploitation
4.3.1. Cas
des producteurs en T&V
Les analyses faites sur les deux premières parties
à savoir les objectifs visés et le choix des spéculations
nous en disent déjà long sur la planification des
activités faites par les producteurs en T&V.
Une bonne planification nécessite la définition
claire d'objectifs et des moyens permettant d'atteindre ces objectifs. Mais si,
comme cela est le cas, les objectifs en début de campagne ne sont pas
clairement définis en raison de la difficulté d'une
identification des besoins et d'une vision au jour le jour, il serait
très difficile de réaliser une planification des
activités. Ainsi la détermination de la période de semis
est quasi impossible chez cette catégorie de producteurs pour qui la
date de semis relève des compétences de l'encadreur pour les
cultures de rente et de la faveur des pluies pour les autres cultures. Chez les
producteurs en T&V, les quantités de semence nécessaire ne
sont mal estimées et aucune des opérations culturales n'est
planifiée. Les surfaces céréalières ne sont pas
définies à l'avance. Elles varient progressivement en fonction du
climat, de la disponibilité en main d'oeuvre et en intrant. Il est donc
malheureusement quasi impossible de prévoir la main d'oeuvre qui sera
nécessaire à l'exécution des opérations culturales.
J'en veux pour preuve, les propos suivants tenus par un producteur pour
justifier le fait qu'il ne planifie pas ses activités de façon
rigoureuse
« Si je dis je vais semer dans une semaine par
exemple, avant cette date je ne trouve pas de bête pour préparer
le sol, ensuite par exemple il ne pleut pas, ou encore comme je suis malade ou
l`un de mes enfants l'est, c'est à cause de ces différents
éléments qui arrivent chaque fois qu'on attend quand les
conditions sont favorables pour effectuer nos
activités »
Ce genre de raisonnement caractérise les producteurs en
T&V. Finalement ce n'est pas que ces producteurs ne font pas de la
planification, bien au contraire ils tiennent compte des
évènements aléatoires. Cette souplesse de la planification
est donc due à ce que j'appelle « la planification de
l'aléatoire ». Cette planification de l'aléatoire
consiste à tenir compte des événements aléatoires
pour justifier le fait de ne pas planifier.
Il est alors évident que les décisions prises
par ces producteurs le sont au jour le jour. Il s'agit là de
décisions presque toujours tactiques qui correspondent
à des ajustements de plan tout au long de la campagne, en s'adaptant
à tel ou tel autre événement aléatoire. La
finalité est qu'il n'y a plus de plan et que le producteur se contente
des dires de l'encadreur relatifs aux dates et aux doses.
Par contre, pour ce qui est de la quantité d'intrants
chimiques nécessaires et de pesticides, les quantités
nécessaires sont estimées par ces producteurs pour qu'elles
soient communiquées aux secrétaires des Groupements Villageois.
Beaucoup de producteurs se plaignent que leurs estimations sont revues à
la baisse. Donc pour avoir les quantités voulues ils font une
surestimation de leurs besoins.
« Si tu mets les quantités exactes dont
tu as besoin, cela paraît petit et quand les intrants ne suffisent pas,
les secrétaires diminuent ce que tu espères. C'est pour cela que
nous ne mettons pas les quantités exactes. »
Est- ce la vraie raison de cette manoeuvre, nous ne saurions
nous prononcer ; mais une fois encore, ces producteurs manquent de
crédibilité dans la planification de leurs besoins et
activités. Quant aux dates d'applications de ces intrants, elles sont
déterminées par l'encadreur. Mais les superficies
emblavées sont aussi parfois fonctions de la quantité d'intrants
disponibles, ce qui est tout à fait contraire à la logique du
planificateur.
« Si je trouve les quantités d'engrais et de
pesticide demandées je vais peut-être augmenter ma superficie de
maïs, mais pour le moment je ne sais pas encore»
Nous avons pu constater qu'aucun outil et qu'aucune condition
favorable ne pourrait permettre à un producteur en
T&V de faire une planification acceptable de ses activités. De
même il reste dépendant de l'encadreur et de la
nature en ce qui concerne les dates des différentes opérations
culturales. Ses capacités et son pouvoir de planification sont faibles
ce qui le conduit à un modèle d'actions dynamiques par des
décisions tactiques prises au jour le jour.
4.3.2. Cas des producteurs en
CEF
Pour tous les producteurs CEF, il est indispensable de faire
une planification des activités. Mais en réalité, 76% de
ces producteurs font une planification de leurs activités. Cette
planification est faite à l'aide d'un outil d'aide à la
décision qu'est le plan de campagne. Les 24% restants, les plus anciens
prétendent faire cette planification mais en tête. Ce plan
renferme les objectifs définis précédemment et le
programme des activités à exécuter ainsi que leur
coût. Il permet, grâce à un certain nombre d'outils de
suivis de l'exploitation de la campagne passée, de prévoir les
dépenses, les besoins en travail, les résultats souhaités
pour les campagnes futures. Ces prévisions sont fonctions des
hypothèses élaborées par la famille, relatives aux
cultures à retenir, aux rendements espérés, aux
assolements et aux niveaux d'intrants adaptés aux cultures retenues,
à la fertilité des sols et aux ressources en trésorerie.
Cet outil est mis au point par l'exploitant lui même avec ou sans l'appui
du conseiller.
« Quand j'ai débuté avec le conseil de
gestion en 2003, j'ai surtout appris à prévoir. J'avais pour
objectif d'augmenter ma superficie emblavée cette campagne là
parce que j'avais des terres non cultivées. Malheureusement je n'avais
ni la charrue ni les bêtes ; j'ai donc mis l'achat de ma
première bête comme objectif dans mon plan de campagne en 2004, en
2005 j'ai fait pareil, en 2006 j'ai mis l'achat d'une charrue, la campagne
passée j'ai augmenté ma superficie de coton de 2 ha et celle de
maïs d'un ha. Mon souhait de 2003 je l'ai atteint en
2007 »
Ici encore, c'est le producteur qui fait sa planification
grâce aux outils que lui apporte le conseiller CEF et avec son appui.
Cette planification lui permet de prendre des décisions
stratégiques pour la trajectoire qu'il veut donner à son
exploitation.
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