Contribution à l'étude des origines de la poésie mallarméenne( Télécharger le fichier original )par Mohamed Dr Sellam Université de Bordeaux - Doctorat 1981 |
VIIIMallarmé était-il prophète ou mage ?Avant de clore ce chapitre,on est en droit de s'interroger :Maalarmé était-il prophète ou mage ?Naturellement il ne l'était ni l'un ni l'autre ; ; !Car s'il l'était effectivement,la poésie mallarméenne aurait été tout autre,une poésie moins raffinée,moins exaltante,moins euphorique et surtout moins pure,de la pureté d'un ciel sans nuages ou celle d'une plaine fleurie,parsemée gaiement de rosées étincelantes ; ; Toutfois,la poésie mallarméenne renferme en son sein le sens d'une prophétie et cette prophétie réside en effet dans le choix qu'il avait fait peut-être d'instinct de cette nouvelle percée dans le monde de la poésie,un choix juste,dû à une inspiration divine..Car la rectitude,l'exactitude rigoureuse de cette nouvelle poétique n'a pas été le fait du hasard...c'est un choix basé en premier lieu sur des facteurs concrets et solides,sur sa capacité de voir plus loin et sa perspicacité de percer les secrets de l'avenir.. Aucun poéte français,depuis la Renaissance jusqu'à nos jours,n'avait senti en lui cette faculté mystérieuse , pour prévoir et sonder intelligemment et intellectuellement le futur proche et lointain.. Cette faculté mystérieuse,siége de toutes les visions et de tous les augures,s'affirme de jour en jour,pour devenir chez Mallarmé,une vraie puissance,tendant à réformer et à purifier l'humanité de ses maux,de toutes ses impuretés infectes,de toutes ses deviations tortueuses,afin de la transformer en une humanité plus humaine,au sens propre du mot,plus pure et plus radieuse,jouissant pleinement du bonheur terrestre sans faiblesse.. D'un autre côté,Mallarmé,en s'attachant à réformer l'humanité par la poésie,aussi bien que par l'art,stigmatisant tous les phénomènes religieux,qui,selon lui,surchargent,obstruent et entravent les facultés humaines,prone en revanche l'amour sans contrainte,surtout l'abus des contraintes religieuses et morales,qui sont à ses yeux d'une nocivité effrayante,car au lieu d'affermir les âmes,de les orienter vers le Bien et le Beau,détruisent au contraire toutes aspirations vers l'idéal,provoquent des conflits internes et par là sapent tout altruisme humanitaire...Victor cousin rejoint dans ce sens le maître du symbolisme,lorsqu'il affirme en connaissance de cause que toutes les doctrines,de quelque nature qu'elles soient,ne sont efficaces qu'en elles-mêmes et pour elles-mêmes.«De la religion pour la religion,de la morale pour la morale,de l'art pour l'art. »Rien en effet ne pouvait être utile à l'humanité..Tout n'est utile que pour soi et cela s'applique aussi bien pour la race humaine que pour les doctrines contemporaines.. Mais,Mallarmé en tant que poéte très conscient de sa haute mission,ne se laissa pas faillir à son ultime devoir,qui est de permettre à l'humanité de vivre dans une ambiance universelle pure et confortable,grâce à la floraison d'une poésie pas tout à fait utilitaire au sens pratique du terme,mais une poésie spirituelle,intellectuelle,psychique,capable de relever l 'humanité de son accablement perpétuel.«O que j'aime bien mieux la poésie pure,les cris de l'âme et les élans soudains et puis les profonds soupirs,les voix de l'âme et les pensées du coeur. » G.Flaubert,qui n'avait pas autant que Mallarmé cette force sublime,qui vous pousse malgré vous à instaurer le régne du bonheur et de l'amour,par le moyen d'une poésie intelligente et suprêmement humaine,se résigna à contempler de loin l'essor de cette oeuvre infiniment riche et exaltante.. Ainsi pour qu'il parvînt à concrétiser cet objectif fondamental,à savoir la réalisation d'une poésie de bonheur et de merveille éternels,Mallarmé s'occupa même de l'alchimie et de l'occultisme,qu'il avait considérés comme des sciences,susceptibles de résoudre certains problèmes métaphysiques49(*) attachés à la condition humaine.. Il est allé jusqu'à faire état,dans quelques-uns de ses fameux poémes,du mythe du soleil50(*) : Car j'installe, par la science, l'hymne des coeurs spirituels, Et l'oeuvre de ma patience, Atlas,herbiers et rituels... * 49 -cf.La remarquable étude de Charles Mauron : «Introduction à la psychanalyse de Mallarmé. »Neuchâtel.La Baconnière.1950. * 50 cf.L'intelligente analyse de Davies Gardner :Mallarmé et le drame solaire.Corti 1959. |
|