IV
Le régne et l'influence dominante du
Parnasse;
Le Parnasse,comme je l'ai souligné à maintes
reprises dans les pages précédentes,est issu,d'une part de
l'oeuvre maitresse de Th.Gautier « Emaux et Camées »
dans laquelle généralement les poétes du temps avaient
largement puisé la technique rigide de la structure du vers ainsi que
le goût pour une thématique exotique,liée plus
particulièrement à l'univers physique et d'autre part de
Baudelaire et spécialement de son chef-d'oeuvre les « Fleurs
du Mal »,oeuvre qui a profondément marqué cette jeune
génération,d'ailleurs toujours en quête du sublime et du
spectaculaire...
Or,ce qui a le plus particulièrement séduit les
futurs parnassiens dans l'oeuvre baudelairienne,c'est ce raffinement
harmonieux,cette luxuriance verbale,ce déluge houleux d'un monde
d'idées fantastiques et universelles..
Les emprunts multiples qu'ils avaient faits alors tant dans
l'oeuvre de Th.Gautier que dans dans celle de Baudelaire et leur combinaison
parfaite,ont conféré à l'oeuvre parnassienne une haute
valeur intellectuelle et pratique,qui lui assuré la reconnaissance de
la postérité..
Après le déclin du prestique romantique,qui fut
accéléré par les frasques et les fades galimatias de
quelques imitateurs maladroits de Lamartine et de Musset,l'essor de l'Ecole
Parnassienne semblait à coup sûr assuré,tant par la
présence sur la scène de grands poétes philosophes,tels
que Leconte de Lisle lui-même,Sully Prudhomme et François
Coppée,que par d'autres poétes de moindre importance,mais qui
étaient néanmoins très soucieux de la
perfectibilité et de la rigueur de la discipline métrique..
Ainsi,cette expansion de la poésie
parnassienne,n'était pas,comme on a pu le voir,le fait du hasard,elle
était au contraire munitieusement préparée et la
transition entre un romantisme en décrépitude et une
poésie parnassienne vivifiante et vivace,fut achevée sans trop
d'accrocs ou de pénibles controverses,car l'état désuet et
moribond du romantisme a rendu plus aisée cette transition qui fut
d'ailleurs irréversible pour toute une génération de
poéte..Mais la grandeur et la décadence du classicisme,qui
continua cependant,telle une âpre obsession,à péser de tout
son poids sur l'esprit de cette génération,à tel point
que,nourris qu'ils étaient des valeurs impérissables de cette
culture et de ces traditions immémoriales,ils restèrent
fidélement attachés à l'essentiel des principes de de
leur jeunesse,de ces principes qui avaient éclairé l'histoire de
la France depuis des siécles et qu'ils avaient eux- mêmes
défendus énergiquement contre l'incursion de nouvelles habitudes
et de nouveaux dogmes qu'ils jugeaient comme étrangers et nuisibles
à l'esprit français..
C'est en effet pour concilier les deux pôles :la
préservation des principes séculaires et l'enrichisement
continuel de ces principes ;que les parnassiens avaient fondu dans leurs
vers l'essentiel des idées classiques ; ;
Les parnassiens étaient certains que leur oeuvre de
réforme et de rénovation séduirait le public
intellectuel,lequel,de par sa formation,était souvent sujet à
cette nostalgie du passé glorieux de la France
littéraire ; ;et si l'on va encore plus loin dans notre
analyse,nous remarquons que cette fusion-et dans ce cas du moins les
parnassiens ne s'étaient pas trompés-a constitué la
garantie fondamentale de leur renommée et de leur survie pendant plus
d'une décennie tout au long de laquelle ils avaient joui d'un prestige
éblouissant...
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