DEUXIÈME PARTIE
Applicabilité de la législation
haïtienne
CHAPITRE III
SITUATION DES AUTEURS HAITIENS
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I-NON EXISTENCE DU DROIT D'AUTEUR
La protection du droit d'auteur en Haïti est plus que
séculaire. En effet, la première loi portant protection à
la création dans le pays dâte de 1864, sous le gouvernement de
Geffrard45. Cette loi ne couvrait pas tous les aspects du domaine et
une loi complémentaire a été publiée en 1885, sous
le gouvernement de Salomon46. Plus tard, les droits à
l'intégrité, à la paternité et le droit moral des
auteurs sont confirmés dans un décret sur la
propriété intellectuelle publié sous la présidence
de F. DUVALIER47 dans le Moniteur du 18 Janvier 196848.
Le dernier né de la série est le décret du 12 Octobre 2005
publié sous le gouvernement de transition de Me A. BONIFACE49
abrogeant tous les précédents textes tout en renforçant
leurs dispositions.
Ainsi, dans ce chapitre, il nous importe de questionner
l'efficacité de ce décret cinq ans après sa publication,
notamment avec l'évolution fulgurante des nouveaux moyens techniques
d'informations et de communications, le numérique et l'Internet par
exemple. Aussi y a-t-il l'apparition des moyens de reproduction peu
onéreux et d'accès facile.
Il faut reconnaitre qu'un effort sérieux a
été fait pour être à la hauteur de Nouvelles oeuvres
à protéger, nouveaux droits à reconnaître, nouvelles
conditions d'exploitations à réglementer survenues de
l'avènement des nouvelles technologies d'information, de communication
et plus particulièrement l'Internet. Cependant, il y a encore
nécessité d'apporter de nouvelles adaptations à la
législation haïtienne sur le droit d'auteur. Cette retouche
consisterait, à notre avis en la rédaction, à l'image
d'autres pays comme la France, le Canada, la Belgique
45 . Fabre Nicolas, GEFFRARD, op.cit.
Président de la République D'Haïti de 1859 à 1868.
46 . Lucius Félicite, SALOMON, op., cit.
Président de la République d'Haïti de 1879 à 1888.
47 .François DUVALIER Op., cit,
Président d'Haïti de 1957 à 1964 et devient président
à vie de 1964 à 1971.
48. Moniteur N042, Op., cit. P-au-P 1968
49. Boniface ALEXANDRE, Op., cit. Président provisoire de
la période de transition de 2004 à 2006.
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pour ne citer que ceux-là, d'un Code de
Propriété Intellectuelle (C.P.I) qui tienne compte de toutes
transformations survenues dans le domaine de la création et qui soit
capable de donner aux créateurs un niveau maximum de protection du point
de vue légal et pratique.
De plus, en présence de cette massification de
nouvelles technologies basées sur des données numériques,
les autorités ou les instances compétentes doivent agir d'une
manière beaucoup plus pratique que théorique.
Section 1.1-L'existence théorique du droit
d'auteur
La question du respect du droit d'auteur, que ce soit au plan
littéraire, artistique ou musical, est vu et étudié par
bien de spécialistes un peu partout dans le monde aussi bien qu'en
Haïti. Donc, à ce sujet, ce ne sont pas non plus de documents de
références qui font défaut. Pourtant, le
phénomène du piratage et de la contrefaçon ne cesse de
poursuivre sa voie.
Dans le contexte actuel, le droit d'auteur en Haïti a
connu certaines adaptations, cependant, les auteurs haïtiens continuent
à être des victimes passives des actes de pirateries. Certes, un
bon nombre d'auteurs sont au courant de l'existence de ce droit, mais sans
disposer de bonnes informations sur son contenu et sur les moyens légaux
de protection qui sont à leur disposition.
En grande partie, en Haïti, les auteurs produisent sans
même savoir le processus de légalisation des créations.
Dans cette perspective, nous tenons à retracer de façon
particulière pour les créatrices et créateurs d'oeuvres
intellectuelles, la procédure du dépôt légal. Elle
est ainsi retracée « Pour tout ouvrage publié en
Haïti, l'auteur ou le titulaire de ce droit, est astreint, avant son
exploitation à en déposer six exemplaires à la
Secrétairerie d'Etat de l'Intérieur et de la Défense
Nationale, à répartir dans les bibliothèques publiques par
les soins du chef de ce département. De plus, lorsqu'il s'agira
d'ouvrage à caractère didactique et de publication
intéressant la jeunesse, trois exemplaires
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supplémentaires devront être
déposés au Ministère de l'éducation nationale
». D'où, la procédure du dépôt légal.
Etant compris de cette manière, la notion de
dépôt joue un rôle pertinent. En cas de litige il est de
nature à servir de preuve de paternité. Dans ce contexte, le
titre de dépôt et d'enregistrement peut être
considéré, pour le tribunal, comme la preuve par écrit. Un
acte revêtant une si grande importance pour les créateurs
d'oeuvres de l'esprit, devrait être d'exécution facile,
c'est-à-dire, ceci ne devrait pas se heurter à une quelconque
difficulté pour le réaliser. Ne serait-il pas évident,
pour un auteur, d'effectuer le dépôt de sa création dans
l'idée de rendre beaucoup plus facile le processus de reconnaissance des
droits d'auteur, chez un notaire ou dans un bureau de droit d'auteur
créé à cet effet, dans chaque département et/ou
commune du pays ?
Partout dans le pays, il existe des services de reproductions
de toutes sortes qui ne sont soumis à aucune disposition légale.
Or, la reproduction peut n'être que partielle, rien n'interdit de ne
copier /coller qu'une partie du texte ou de l'oeuvre, pour l'insérer au
sein d'une autre. Chaque oeuvre est dénombrable en morceaux dont
l'utilisateur est libre de choisir la taille et libre de les réutiliser
par ailleurs comme il l'entend pour construire, à partir de ces
éléments, d'autre chose qui lui est soi-disant propre et
d'ailleurs, indécelable par tous. Donc, de tels actes font obstacle aux
droits économiques des créatrices et créateurs d'oeuvres
de l'esprit ; et peuvent contribuer à décourager ces
producteurs.
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