2. La thématique dans l'oeuvre : les fondements
du pouvoir politique dans l'Afrique postcoloniale
La thématique dans En attendant le vote des
bêtes sauvages nous aide à déterminer les fondements
du pouvoir politique dans l'Afrique postcoloniale. Les thèmes que
Kourouma développement dans cette oeuvre nous renseignent, en effet, sur
la nature de la politique en Afrique au lendemain des indépendances.
Grâce aux travaux de J-P Weber68 et aux
recherches psychocritiques de Charles Mauron69, il est
démontré que, l'oeuvre de tout écrivain est le
déploiement privilégié d'un seul et unique thème.
Le thème fonctionne donc le noyau de l'oeuvre autour duquel s'articule
tout un système syntaxique, sémantique ou linguistique. Ainsi le
thème est-il l'idée fondatrice de l'oeuvre de l'écrivain,
l'idée qui assure son unité. C'est ce que souligne Tomachevski
dans un article consacré à la thématique :
67 Abbé Alexis KAGAME, « Le
sacré païen, le sacré chrétien » in
Aspects de la culture noire, pp. 135-136.
68 Jean-Paul WEBER, Domaines
thématiques, Paris, Gallimard, 1964.
69 Charles MAURON, Des métamorphoses
obsédantes au mythe personnel, Introduction à la
psychocritique, Paris, José Corti, 1970.
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« Au cours du processus artistique, des phrases
particulières se combinent entre elles selon leur sens et
réalisent une certaine construction dans laquelle elles se trouvent
unies par une idée ou un thème commun
»70.
Les thèmes dans le roman sont nombreux et divers, mais
restent toutefois liés à la représentation de la politique
dans l'Afrique postcoloniale. Nous pouvons dégager comme thème
central de ce roman la dictature. A cela s'ajoutent des thèmes
secondaires.
2.1. Le thème central : la dictature
Tout le récit du roman repose sur la
représentation de la dictature dans l'Afrique postcoloniale. Ce
thème est traité par l'auteur avec un art subtil et
aiguisé. Kourouma a entrepris de montrer la naissance de l'Etat africain
postcolonial marqué in extenso par le parti unique. En effet, dans
« l'Afrique aux mille dictateurs », le parti unique est une
règle d'or de politique. Tous les chefs d'Etat, Tiékoroni,
Nkoutigui, Bossouma, l'homme au totem léopard, l'homme au totem chacal,
sont en même temps des chefs redoutables de parti unique. Dans ces Etats
dictatoriaux, toutes les dérives politiques sont possibles.
Kourouma n'a pas manqué de toucher du doigt tous les
aspects saillants de la dictature à savoir la violence, la magie et la
sorcellerie, la corruption, le militarisme, la terreur milicienne, le culte de
la personnalité, la mégalomanie, les détournements de
deniers publics...etc.
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