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Ecriture et politique dans "en attendant le vote des bêtes sauvages " d'Ahmadou Kourouma

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par Kossi Wonouvo GNAGNON
Université de Lomé Togo - Maà®trise en lettres 2009
  

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2.3. De la politisation de l'écriture à l'engagement politique de l'écrivain

Parlant de la problématique de l'engagement de l'écrivain dans son époque et du destin social de son art, l'un des théoriciens de la littérature institutionnelle, Jean- Paul Sartre écrit :

« Nous voilà conduits par la main jusqu'au moment où il faut abandonner la littérature de l'exis pour inaugurer celle de la praxis. La praxis comme action dans l'histoire et sur l'histoire, c'est-à-dire comme synthèse de la relativité historique et de l'absolu moral et métaphysique, avec ce monde hostile et amical, terrible et dérisoire qu'elle nous révèle, voilà notre sujet. Je ne dis pas que nous ayons choisi ces chemins austères, et il en est sûrement parmi nous qui portaient en eux quelque roman d'amour charmant et désolé qui ne verra jamais le jour. Qu'y pouvons-nous ? Il ne s'agit pas de choisir son époque mais de se choisir en elle. »37

Si l'exis, en grec, est l'état ou la manière d'être, et que la praxis est l'action, Jean-Paul Sartre appelle à la fusion de la littérature et de l'action débouchant directement sur l'engagement politique de l'écrivain. A cet effet, l'écriture institutionnelle n'est plus qu'une écriture de l'action, donc orientée, codée, conventionnelle. Qu'il s'agisse de l' « écriture bourgeoise » ou de l' « écriture de la Négritude », l'écriture n'est plus neutre, sans classe, ou tout simplement perçue comme un acte politique ; mais, elle devient l'expression d'une intention politique qui n'est déjà plus celle du langage littéraire, d'autant plus qu' « elle [l'écriture] est alors chargée de joindre d'un seul trait la réalité des actes et l'idéalité des fins »38. Ce qui fait que le mot devient un prétexte à l'écrivain qui choisit d'intimider ou de glorifier, de condamner ou de justifier, une idéologie. De nature politique, l'écriture peut jouer aussi un rôle politique.

36 « Léopold Sédar Senghor par lui-même », Propos recueillis par Edouard J. MAUNICK, in Notre Librairie, « 1250 nouveaux titres de littérature d'Afrique noire » Revue des littératures du Sud, n° 147 janvier-mars 2002, p.9.

37 J-P SARTRE, Qu'est-ce que la littérature ? IV, Situation de l'écrivain en 1947 (Librairie Gallimard, éditeur)

38 Roland BARTHES, Le degré zéro de l'écriture, Paris, Edition du Seuil, 1953, p. 22.

Tout compte fait, il est possible de lire dans le destin même des écritures, les mutations politiques, et

« L'écriture étant la forme spectaculairement engagée de la parole, contient à la fois, par une ambiguïté précieuse, l'être et le paraître du pouvoir, ce qu'il est et ce qu'il voudrait qu'on croie : une histoire des écritures politiques constituerait donc la meilleure des phénoménologies sociales »39.

La politique est donc le domaine de définition de l'écriture. Alors, il est possible de parler de la politicité et de la politisation de l'écriture. C'est fondamentalement ces deux problématiques que nous entreprenons d'expliquer dans En attendant le vote des bêtes sauvages d'Ahmadou Kourouma. Mais avant cela, nous allons montrer que le roman africain postcolonial dévoile une écriture idéologique et politique.

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39 Ibid., op. cit., p.24.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault