Paragraphe II- La décision sur la prise d'effet de
l'engagement.
L'Exécutif dispose d'une double compétence
discrétionnaire pour décider de parfaire la conclusion des
accords sous la seule condition d'avoir obtenu l'autorisation préalable
du Parlement (A) et pour publier les conventions ainsi conclues et permettre de
la sorte leur application dans le for interne (B).
A- La compétence discrétionnaire de
parfaire la conclusion.
« Le Parlement participe à la conclusion de
l'accord, mais en aucun cas, il n'engage l'Etat »39. Ces
mots de Jean Dhommeaux résument bien l'effet de la loi de ratification
sur la naissance effective de l'engagement. En effet, l'analyse classique
déduit des compétences de l'Exécutif la compétence
limitée de l'organe parlementaire d'où elle fait découler
la nature juridique spéciale de la loi autorisant la conclusion
définitive de certains engagements. Cette loi, selon la
présentation qui en est généralement faite, doit
être considérée comme une pure « formalité
habilitante », comme une simple autorisation donnée « en forme
de loi » ou « dans les formes législatives
»40. Formellement législatif, l'acte du Parlement
n'aurait « en aucune manière une nature matériellement
législative »41, car selon une description suggestive
employée notamment par le professeur Charles Rousseau et reprise en
plusieurs occasions par le gouvernement français, il ne s'agirait que
d'une autorisation solennelle donnée en forme législative
à l'Exécutif d'exercer des prérogatives qui,
constitutionnellement, lui appartiennent en propre42. En substance,
cet acte
38 Ces réponses assez curieuses peuvent laisser penser
d'une part que le Gouvernement a adopté et signé des conventions
sans les comprendre et sans en connaître toutes les implications en
renvoyant cette tâche au moment de la ratification tout en estimant que
les députés dont l'autorisation est requise à un mois de
la limite fixée par l'AIEA ont besoin de beaucoup moins de temps pour
comprendre la Convention ou pire n'ont pas besoin de la comprendre pour donner
leur autorisation, d'autre part que « les larges concertations » et
« la sensibilité » du sujet excluaient le Parlement qui ne
doit intervenir qu'à une phase terminale après que la
décision soit prise.
39 Jean Dhommeaux « La conclusion des engagements
internationaux en Droit français : Dix sept ans de pratique »,
AFDI, 1975, vol 21, p. 834.
40 Niboyet, Gervais puis Duverger cités par Luc Saïdj
Le Parlement et les traités, Paris, 1979, LGDJ, p. 45.
41 Dehaussy cité par Luc Saïdj Op. Cit. p. 46.
42 Luc Saïdj Op. Cit. p. 46.
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parlementaire n'a pas de caractère obligatoire et c'est
bien seul le président de la République qui ratifie les
traités selon les termes de l'article 46 de la Constitution.
Ainsi, le Parlement ne ratifie pas lui-même les
traités. Il se contente d'autoriser à l'avance un acte qui est de
la compétence exclusive du président de la République,
ainsi qu'en témoignent à la fois les dispositions
constitutionnelles et le libellé même des lois relatives à
la ratification. Cette « approbation en forme législative » ne
rend même pas obligatoire l'intervention de l'acte présidentiel,
car en votant la loi d'autorisation, le Parlement ne lie pas le Cameroun et
n'oblige pas le président de la République à ratifier ; il
ne lui ouvre qu'une faculté. En effet, l'Assemblée nationale
n'est pas saisie d'un projet de loi ratifiant le traité, mais d'un
simple projet de loi autorisant une éventuelle ratification à la
discrétion de l'Exécutif. Sur le plan international, la
compétence discrétionnaire de l'Exécutif pour parfaire la
conclusion du traité et engager définitivement l'Etat se
manifeste par le fait que le vote du Parlement ne lie pas l'Etat, n'oblige
même pas à lier l'Etat et n'empêche pas plus de
délier ultérieurement l'Etat43.
Cette compétence discrétionnaire du
président de la République de parfaire ou non l'engagement
international de l'Etat du Cameroun une fois l'autorisation du Parlement
acquise, se reflète à l'interne par une décision
discrétionnaire d'incorporer l'accord dans l'ordre juridique interne
à travers la publication.
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