5) Conclusions, hypothèses,
préconisations et recommandations
Les données exploitées ici pour arriver à
des conclusions et émettre des hypothèses sont tirées des
derniers questionnaires auto-administrés. Il a été
intéressant, pour la rédaction de ce mémoire et pour des
études ultérieures, de bien séparer les messages des
apprenants par groupes (G1, G2, G3) et par tuteurs (T1, T2, T3)78
afin de comparer les résultats de chaque groupe, ainsi que la possible
incidence des modalités d'intervention tutorales (MiT) de chaque
enseignant chez les apprenants.
5.1- Bilan: impressions et recommandations
postérieures des apprenants et tuteurs.
Dans la mesure où, la situation étant toujours
nouvelle dans le contexte d'enseignement-apprentissage cubain et de l'Alliance
française, les attentes des acteurs impliqués (l'AF, les
apprenants inscrits, les trois tuteurs) semblent nettement dépasser
celles que ce dispositif de formation à distance a pu en
réalité leur offrir79. On peut donc conclure à
une certaine inadéquation du dispositif par rapport à l'attente
des apprenants et même des professeurs. Voici les réponses des
apprenants concernant les profits tirés de cette formation par rapport
à un cours de langues « traditionnel »80.
71
Figure 5-1 :
Questionnaire2-apprenants, Q15 : impressions en
aval
En effet, certains apprenants ont la capacité de
travailler de manière autonome mais d'autres n'ont pas cette aptitude,
et c'est fondamentalement dans ces cas-là qui s'avère
nécessaire l'accompagnement tutoral81.
Pour comprendre les problèmes de décrochage
(67%) ou de persistance (33%), il faut analyser les exigences des apprenants en
examinant leurs profils, leurs motivations et leur niveau d'autonomie
(réponses données au dernier questionnaire82. La
plupart des apprenants qui ont répondu à ce dernier questionnaire
étaient professionnellement actifs (38%), avaient entre 20 et 39 ans
(80%), étaient des femmes (71%), étaient
78 Trois groupes (G1, G2, G3) et trois tuteurs (T1, T2, T3).
79 Les 67% ayant abandonné le cours.
80 Voir Annexe 21, Q.15-c et d
81 Voir Annexe 11 : Questionnaire initial, les
représentations des apprenants avant de commencer le cours.
82 Voir Annexe 19
72
Gestion des interactions dans un
dispositif hybride : rôles et stratégies des tuteurs. Le cas du
présentiel réduit de l'Alliance française de La
Havane.
fondamentalement associes aux Sciences Humaines ou au monde de
l'entreprise 83(18%). Cela nous amène à conclure
qu'ils (elles !) ont un agenda chargé auquel on doit ajouter la
surcharge du travail domestique. Les enseignants devraient accorder plus
d'importance au profil de leurs apprenants, car les MiT des tuteurs et leurs
rôles propres sont modulables et doivent être mis en oeuvre en
fonction des profils/besoins des apprenants et du contexte d'enseignement
apprentissage dans lequel ils sont immergés (voir 1.1.4, page14 -
Quintin 2008 ; 1.2.3 page16).
À la différence de ce qu'ils avaient
déclaré avant la formation84, la majorité des
apprenants a exprimé que le problème essentiel qui les avait
poussés à abandonner le cours était que les apprenants
n'avaient ni assez de temps de connexion ni accès à d'autres
éléments techniques85, et qu'ils se voyaient donc
empêchés de suivre le cours avec le rythme
souhaité/proposé par le calendrier du cours86. La
moyenne du nombre d'heures passées en ligne par les apprenants (entre 1
et 5h, 5h moins de ce
qu'ils espéraient avant le début de la
formation)87, surtout pour ceux Figure 5-2 :
Questionnaire2-apprenants, qui n'ont pas décroché,
serait raisonnable avec une connexion haut- Q5 : temps
consacré
débit, mais elle est certainement insuffisante dans le
contexte cubain. Le processus d'inscription au cours doit continuer à
être très rigoureux dans la sélections d'étudiants,
en ce qui concerne le prérequis (avoir un ordi, pouvoir se connecter au
moins 5 heures par semaine, avoir les logiciels et les accessoires
nécessaires pour le bon déroulement du cours, à savoir :
des casques, un micro, ...). Le dispositif en place à l'AF doit donc
leur offrir plus de possibilités de connexion, de
téléchargement et d'accès à des ordinateurs, en
dehors des séances présentielles.
Malgré les efforts de l'AF pour rendre le cours plus
communicatif et actionnel, 69% apprenants ont choisi la section Grammaire, en
1ère ou 2e option, comme la rubrique à laquelle ils ont
accordé le plus de temps88. Ce résultat est en
adéquation avec le choix des apprenants lors du 1er
questionnaire (voir Chapitre 4 : page 45) ce qui révèle leur
culture d'enseignement-apprentissage et sa persistance à la fin de la
formation. Ils ont d'ailleurs signalé les sections Prononciation et
Communication comme les plus difficiles à travailler en autonomie, et
comme celles ayant le degré de difficulté technologique le plus
élevé89. La Grammaire qui est pour eux la section la
plus simple en termes de compétences techniques requises et de vitesse
de connexion nécessaire ne leur munissait pas les outils essentiels pour
être en mesure d'accomplir les tâches demandées, pour faire
les activités communicatives, ni pour interagir dans les forums
d'échanges. Nous en concluons que :
- les tuteurs doivent travailler fondamentalement sur la
communication et la prononciation pendant les séances
présentielles (au laboratoire ou dans une salle de classe) ;
83 Voir Annexe 19
84 Voir le Chapitre 4 : Figure 4-3 : Profil des
apprenants, page 46
85 Voir Annexe 21, Q12.1
86 Voir Annexe 4
87 Voir le Chapitre 4 : Figure 4-1 Profil de tuteurs,
page 45
88 Voir Annexe 20, Q6
89 Voir Annexe 20, Q7et 8
73
Gestion des interactions dans un
dispositif hybride : rôles et stratégies des tuteurs. Le cas du
présentiel réduit de l'Alliance française de La
Havane.
- les tuteurs devraient « étayer » davantage
les apprenants, soit en synchronie soit de façon asynchrone, lors du
travail à distance avec ces sections ;
-un changement dans la structure (linéale) du cours
supporté par la plateforme devra être envisagé : l'ordre
des sections (toujours Communication, puis Grammaire, après Lexique,
ensuite Prononciation et en dernier lieu Tâches) pourrait changer afin
d'inciter les apprenants à travailler davantage sur d'autres sections et
à ne plus voir les Taches comme « les cerises du gâteau
» (1- Communication, 2-Tâches, 3-Prononciation, 4-Grammaire,
5-Lexique...) ;
-il serait pertinent d'envisager, au moins à long
terme, l'insertion de matériel audiovisuel-communicatif dans la propre
section Grammaire, en plus de ce qu'a déjà été
rajouté dans Communication et Tâches finales (étant
donné que, fruit de la culture d'apprentissage, les apprenants ont
tendance à consacrer plus de temps à la rubrique Grammaire) ;
-des feuilles de route pourraient être prévues
par les tuteurs ou par des professeurs concepteurs pour doser le travail dans
les sections, à l'intérieur de chaque leçon, ou bien pour
baliser le passage d'une section à l'autre dans chacune des
leçons.
Par ailleurs, d'autres facteurs peuvent également avoir
eu une influence90. Ainsi peut-il s'agir de facteurs
institutionnels, culturels (sexe, professions, habitudes, l'appréhension
des certaines femmes à la technologie - public majoritaire de cette
formation- ...), motivationnels (voir Chapitre 4, Figure 4-4, page 46), ou
concernant la MiT (voir Chapitre 2 : 1.2.3, page 16).
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