I- Le rôle du manager
Cette partie s'intéresse au rôle
prépondérant que joue le manager dans une démarche
d'innovation totale. Le terme sera ici utilisé dans son sens le plus
large à savoir : toute personne exerçant une
autorité hiérarchique sur d'autres et possédant le pouvoir
de permettre et d'interdire.
Charles Albano (1974), distingue cinq styles de direction, en
se référant aux grands principes de l'analyse
transactionnelle81(*).
- Le manager parent critique (fortement motivé par son
travail, traite ses collaborateurs comme des enfants, ne donne que peu de
signes de reconnaissances positifs),
- Le manager parent nourricier (accorde de nombreux signes de
reconnaissances positifs à ses collaborateurs ce qui favorise leur
développement mais sa grande tolérance tolère des
performances médiocres),
- Le manager enfant adapté (doute de ses
capacités, manque d'initiative et cherche à se faire valoir de
tous ce qui détourne son énergie de tout oeuvre réellement
innovatrice),
- Le manager enfant naturel (faiblement impliqué
socialement, son comportement provoque de nombreuses dissonances avec ses
collaborateurs et supérieurs avec qui il maintient une distance
aléatoire),
- Le manager adulte (donne des signes de reconnaissances
à ses collaborateurs, son aisance sociale lui permet de traiter avec
différentes personnalités de façon harmonieuse).
Bien que le manager adulte soit donné comme
supérieur aux autres styles présentés ci-haut, le recours
à un management autoritaire ou conciliant est toujours fonction d'un
contexte donné auquel le manager doit s'adapter en fonction de sa propre
personnalité. Il n'existe pas de style de management universellement
meilleur que les autres (Jaoui, 2003).
La gestion optimale de la créativité repose sur
sa capacité à osciller adroitement entre le chaos (qui favorise
la créativité) et la discipline (qui favorise l'efficience). Le
rôle du manager est donc prépondérant. Il est souvent
assimiler à un chef d'orchestre qui impulse la démarche, la
coordonne au niveau organisationnel, mesure et communique les résultats.
Le manager doit imposer une contrainte souple (Le Loarne & Blanco, 2009),
où il consulte le créatif, le soutien dans ses phases de doutes
et lui apporte une reconnaissance l'incitant à poursuivre ses efforts.
Ce que Thierry Weil (2003) explicite du point de vu de la R&D en
déclarant : « La population des chercheurs est
très sensible au regard qu'on porte sur elle et sa gestion demande un
tact particulier. Un chercheur dont on s'enquiert trop souvent des
résultats a le sentiment qu'on ne lui fait pas confiance ou qu'on le
croit paresseux. Un autre qu'on laisse en paix souffre de ce qu'il ressent
comme un manque d'intérêt pour ses travaux ».
Le manager doit aussi responsabiliser l'individu
créatif et garantir son autonomie. Vincent Boly (2004) estime que
l'indépendance intellectuelle et matérielle est
étroitement liée à la capacité créative des
individus. Il doit aussi valoriser le processus plus que le résultat
(approche anti-téléologique). Ce système garanti la
tolérance de l'échec et permet ainsi de lever une crainte
très fréquemment citée82(*) comme frein à la créativité.
Enfin, le manager doit impulser parmi ses équipes de
travail un esprit d'entreprise transcendant la discipline organisationnelle.
Bien sûr le manager est le dernier maillon d'une
chaîne systémique très complexe dont l'harmonie
réside dans l'association minutieuse de plusieurs éléments
stratégiques que nous venons de détailler tout au long de ce
chapitre. Le rôle du manager bien que purement opérationnel n'en
demeure pas moins essentiel au bon déroulement des projets d'innovation
dont il est l'un des principaux artisans. Son activité quotidienne
permet de faire surgir la créativité du plexus organisationnel
dans lequel elle puise sa source infinie.
* 81 L'analyse transactionnelle
est une théorie de la personnalité et de la communication. Elle
postule des "états du Moi" (parent, adulte, enfant), et étudie
les phénomènes intrapsychiques à travers les
échanges relationnels, appelés "transactions".
* 82 Une étude
menée en 2004 par Jim McCormick dans un laboratoire de R&D sur 45
chercheurs conclue que la peur de l'échec est la première cause
d'hésitation chez les participants qui choisissent en conséquence
de ne pas prendre d'initiatives (www.leader-values.com &
www.takerisks.com.).
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