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Genre & mobilisations sociales: étude de genre des mobilisations féministes radicales et LGBT à  Istanbul

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par Adèle PRUVOST
Université Rennes 1 - Master 2 Sciences Politiques 2011
  

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Section 1 : LE GENRE DANS LA RECHERCHE EN SCIENCE SOCIALE

I) Pourquoi utiliser l'analyse par le genre dans l'étude des mobilisations sociales ?

A) Théories traditionnelles des mobilisations sociales et critiques

Qu'est ce qu'un mouvement social ?

On définit traditionnellement un mouvement social comme une action collective en faveur d'une cause matérielle ou immatérielle et visant a transformer l'ordre social existant. Le mouvement des femmes en Turquie, peut être considéré comme rejoignant plus globalement le mouvement féministe international même si le contexte et les revendications sont parfois différents. Les mouvements des femmes et/ ou féministes en Turquie ont un double objectifs améliorer le droit des femmes, notamment l'accès au travail, et réduire l'impunité des violences faites aux femmes notamment domestiques. Mais aussi dans le changement des mentalités et dans la modification des rapports entre les deux sexes, en vue d'atteindre l'égalité totale entre les hommes et les femmes, sans domination des uns sur les autres. Le projet est donc bien une transformation en profondeur de la société, les mouvements féministes, et/ou de femmes sont donc bien des mouvements sociaux. Il apparaît donc logique d'étudier des mouvements féministes avec l'appui des études théoriques des mouvements sociaux.

Mais « Un mouvement social c'est aussi d'abord, une mobilisations de femmes et d'hommes, autour d'espoirs, d'émotions, et d'intérêts. C'est aussi une occasion privilégiée de mettre en discussion des enjeux sociaux » selon Eric Neveu4. Dans cette définition donnée par Eric Neveu, le plus important est dit. Un mouvement social c'est aussi «des espoirs, des émotions, des intérêts » semble t-il souligner en rapport avec les théories classiques du mouvement social qui semblaient oublier cette dimension.

Il est utile de reprendre ici brièvement les théories du mouvement social, leurs points
forts, leurs faiblesses, et ensuite en quoi le genre peut être une catégorie analytique
indispensable dans la compréhension des émergences, des développements des

4 Erik NEVEU, Sociologie des Mouvements sociaux, Collection Repères, La Découverte

mouvements sociaux, de leurs structures organisationnelles mais aussi du point de vue des vécus et des expériences des militants et militantes.

Les théories du comportement collectif & l'apport du concept de « frustration »

Les premières théories sont les théories du comportement collectif. Elles émergent pendant l'entre deux guerres, avec l'Ecole de Chicago et Park et Blumer, et donnent particulièrement d'importance au comportement collectif. Des chercheurs comme Smelser, fonctionnaliste, et d'autres plus proches des psychosociologies comme Gurr, contribuent à ces travaux. La psychologie des foules de LeBon est remplacée par une logique de convergence, la naissance des comportements collectifs vient de la synchronisation entre les croyances et les frustrations des individus. Gurr invente la notion de « frustration relative », les individus espèrent quelque chose en fonction de leur perception de leur statut social, qu'ils considèrent en dessous de ce qu'ils estiment être en droit d'attendre. Cette théorie peut être critiquée car si les mobilisations émergent la plupart du temps à cause de frustrations, il est difficile d'évaluer une frustration, et il serait dangereux de prouver qu'il y a frustration parce qu'il y a mobilisation.

Dans les années 1970, surgit le Paradoxe d'Olson. Olson donc souligne le fait que si plusieurs membres souhaitent la même finalité, selon les rationalités individuelles de chacun, il peut y avoir action collective ou non. Il va donc apporter les approches de la rationalité individuelles, qui seront reprises plus tard dans les années 80 avec les théories de l'Action rationnelle, oü la tendance est d'appliquer le modèle de l'Homo Oeconmicus à tous les faits sociaux. C'est-à-dire que tout individu serait rationnel et serait pousser dans toute action par un calcul coûts/avantages. Le risque de ces théories est qu'il y est un écart entre théories « objectives » et les motivations subjectives des agents sociaux.

Les théories des mobilisations des ressources & la focale sur les structures organisationnelles

Dans les années 70, émergent les théories des mobilisations ressources, gagnant ensuite leurs essors dans les années 80. Les auteurs sont Obershall, Gamson, Tilly, McCarthy et Zald. Au lieu de se demander pourquoi les groupes se mobilisent ils se demandent comment les mobilisations émergent, se développent et s'organisent. Ils s'intéressent donc surtout aux organisations, et notamment a leur rapport avec le politique et l'Etat. Mac Carthy et Zald analysent les organisations de mobilisations comme des entreprises, « des structures d'offre répondant a des préférences diffuses sur le marché ». Au sein des membres actifs ils distingueraient les « bénéficiaires potentiels ~ censés tirés un bénéfice personnel de l'action collective et les « militants moraux ~ qui agirait dans l'action collectif sans espérer en tirer parti. Mais les théories

ne disent pas pourquoi les « militants moraux ~ s'engageraient si ce n'est pas par bénéfice personnel. Oberschall insiste sur les notions de structurations sociales, et sur les réseaux de sociabilité dans l'émergence des actions collectives.

Les théories des NMS, et les théories identitaires ou le rapprochement avec les militants

Les théories les plus récentes sont les théories des nouveaux mouvements sociaux (NMS) qui sont assez controversées. Elles éclairent le fait que dans les années 60-70, de nouveaux types de mouvements sociaux auraient émergés et qu'ils témoigneraient d'un changement de la société devenue postindustrielle. Les besoins économiques et vitaux des individus seraient comblés, de nouveaux types de revendications apparaitraient. Les NMS seraient identifiables aux formes d'organisations et aux répertoires d'actions. Les structures y seraient décentralisées, de type autonome, Les types d'action seraient nouveaux, peu institutionnels voire ludiques. Les revendications aussi ne seraient les mêmes, elles mettraient l'accent sur la résistance au contrôle social, et sur l'affirmation de styles de vie ou d'identités. Le rapport au politique change lui aussi, il s'agit de construire des espaces d'autonomies contre lui. Et enfin les identités des acteurs n'est plus seulement fondés sur les rapports de classe, mais sur d'autres principes identitaires. Les NMS seraient critiqués car certains traits seraient déjà dans les « anciens » mouvements entre autres. Ils ont néanmoins le mérite de prendre ses distances avec l'objectivisme des théories plus anciennes, et de réhabiliter les valeurs, les identités et les émotions des militants.

Enfin Gaxie, dans les années 80, est l'un des premiers a esquisser une théorie des pratiques militantes, qui étudie les coûts et rétributions de l'engagement des militants. Il parle notamment de dimension d'intégration sociale, d'émotions et de convivialité qui sont des aspects attractifs de l'engagement militant. Il développe aussi le concept de « l'effet surrégénérateur », repris par Hirschman « le bénéfice individuel de l'action collective n'est pas la différence entre le résultat qu'espère le militant et l'effort fourni, mais la somme de ces deux grandeurs ».

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