7. STRATEGIES DE MOBILISATION DE LA MAIN-D'OEUVRE
AGRICOLE ET DETERMINANTS SOCIO-ECONOMIQUES DE L'ALLOCATION DE LA MAIND'OEUVRE
SALARIEE
7.1. Stratégies de mobilisation de la main-d'oeuvre
agricole
7.1.1. Stratégies de type « marchand »
+ Avance sur rémunération des ouvriers
agricoles avant le processus de démarrage de la saison.
Cette stratégie est surtout utilisée par les
ménages âgés. Elle est développée par 11,11%
de notre échantillon. Les ménages âgés
représentent 80% tandis que les ménages jeunes
représentent 20%. Elle se présente sous deux formes. La
première est comparable à ce que Ouden (1997) assimile à
l'attraction des ouvriers endettés, et la seconde consiste à
l'établissement de réseaux de mobilisation des ouvriers
agricoles.
Compte tenu du poids financier des ménages
âgés, les ouvriers qui lors de la saison sèche ont des
problèmes financiers (enfants malades, tontines non payées,
décès d'un proche parent..), préfèrent se rendre
vers ceux-ci pour faire des emprunts. Ainsi s'établit un accord,
l'octroi de prêt par le producteur contre la force de travail de
l'ouvrier au démarrage de la saison. Cette stratégie
entraîne des conflits, car l'ouvrier n'honore pas toujours son
engagement. Par exemple, l'ouvrier disparaît et ne vient pas à la
saison pluvieuse pour faire le travail comme convenu ; ou encore l'ouvrier une
fois sur les lieux de travail n'est pas motivé. Il arrive avec des
membres de son ménage pour créer des dépenses
supplémentaires à l'employeur, puisqu'il doit les nourrir. Ceci
se justifie par le fait que l'ouvrier estime qu'il sera sur utilisé.
D'abord, lors du contrat, c'est le producteur qui fixe les clauses. Pour le
labour par exemple qui coûte 13.500F/ha, le producteur peut
décider de donner 8.000F/ha, profitant ainsi de la situation difficile
de l'ouvrier. Alors ce sentiment d'être mal payé amène
certainement des conflits. La gestion des conflits est difficile, dans la
mesure où la plupart du temps, ce sont les parents proches des
producteurs qui contractent ces dettes. Les liens de familiarité
obligent les producteurs à laisser tomber l'argent prêté.
Il s'agit là, d'une stratégie qui n'avantage guère les
producteurs et qui ne peut perdurer.
Selon Edja (1999), l'établissement et l'entretien des
réseaux de mobilisation d'ouvriers agricoles, est une stratégie
très importante ; car elle permet de rendre plus fidèles et plus
disponibles les ouvriers. A l'approche d'une saison, le producteur se rend dans
son village d'origine pour le recrutement des ouvriers. Des « courtiers
d'ouvriers » sont connus de tous dans ces milieux, il revient donc aux
courtiers, d'assurer le recrutement des ouvriers, au producteur à la
saison pluvieuse.
Au total, cette stratégie est plus utilisée par
les ménages âgés, car ces derniers ont plus de relation
avec les parents restés au village, contrairement aux jeunes qui n'en
disposent pas.
+ Contracter des prêts
Cette stratégie est développée par 46,67%
des producteurs du village de Dridji. On retrouve dans cette catégorie
de producteurs 36, 67% de ménages jeunes en début du cycle, et
10% de ménages au milieu du cycle. En début de cycle les
ménages n'ont pas suffisamment de moyens financiers pour recruter la
main-d'oeuvre salariée. Ils sont alors obligés de faire des
prêts. L'objectif ici est de pouvoir recruter assez de main-d'oeuvre
salariée, pour parer aussi bien à l'insuffisance de la
main-d'oeuvre familiale culturale, mais également pour tenir dans le
calendrier cultural.
Dans le village de Dridji existent des tontines informelles et
formelles. Dans leur désir de pérenniser la solidarité qui
existait entre leurs ancêtres, les paysans ont initié des tontines
pour venir en aide à ceux qui parmi eux, se trouvent en
difficulté. Loin de faire les tontines pour pallier aux besoins
immédiats d'argent face à une situation, les paysans
préfèrent investir dans le salariat, dans l'espoir d'en tirer un
maximum de profit lors de la vente de produits qui en résulterait.
Aujourd'hui certains d'entre eux, s'en détournent face
à l'incertitude climatique qui devient de plus en plus un frein à
l'agriculture tropicale. Il n'est pas rare d'entendre les paysans dire
« j'ai fait des emprunts pour le défrichement, le labour et
depuis j'attends la pluie pour semer. Si la récolte n'est pas bonne,
comment ferai-je pour rembourser les dettes ? ». Autant
d'incertitudes qui amènent ces paysans à préférer
uniquement la main-
d'oeuvre familiale (7,77%). De ce fait, ils
préfèrent réduire la superficie à emblaver pour
pallier à l'insuffisance de la main-d'oeuvre.
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