La notion de licenciement pour motif économique est
vaste et comprend plusieurs aspects énumérés par le code
du travail. Au titre des hypothèses de motif économique,
l'article L-16-7 al. 2 du code du travail prévoit les difficultés
économiques de nature à compromettre l'activité et
l'équilibre financier de l'entreprise. Ce sont ces difficultés
économiques liés à la cessation des paiements et au souci
de redressement de l'entreprise qui vont justifier les licenciements.
Ainsi, les problèmes financiers qu'il rencontre et son
incapacité à maintenir le nombreux personnel sont des motifs
économiques de licenciement par le syndic. En effet, la poursuite de
l'activité implique souvent des aménagements. Certains
salariés sont "sacrifiés" au profit de l'entreprise, lorsque les
fonds ne suffisent pas à les payer et à assurer la continuation
de l'exploitation.
La cour d'appel de Paris 83a jugé que le
déficit avéré et persistant de l'exploitation et la mise
en liquidation judiciaire constituent des motifs légitimes de
licenciement du personnel". Selon cette juridiction, s'il apparaît que
l'entreprise est déficitaire et que ce déficit s'aggrave et
perdure, le syndic peut, sur le fondement de ces difficultés,
procéder à certains licenciements.
83 C. A., Paris, 4ème Chambre, 14
Déc., 1954, J. C. P., 1955. 11. 8559
B - Renforcement des mesures par le projet OHADA :
le licenciement doit être urgent et indispensable
Le projet OHADA en son article 110 stipule que les licenciements
pour motifs économiques doivent présenter un caractère
urgent et indispensable.
Cela signifie que les difficultés économiques
de l'entreprise doivent être telles qu'il soit urgent et indispensable
pour elle de licencier le personnel si elle ne veut pas compromettre le
redressement ou l'équilibre financier de l'entreprise.
Il s'agit en réalité de ne rompre les contrats que
dans des hypothèses très strictement définies.
L'accumulation de ces adjectifs est significative. Elle
dénote le souhait des initiatives du projet de réforme de montrer
qu'à ce stade, les compressions d'effectifs ne doivent être
décidées que si la survie de l'entreprise impose de façon
manifeste un allégement immédiat de ses charges en
personnel84. Ces garanties importantes permettent de s'assurer du
sérieux de la mesure de licenciement envisagée.
84 HENRY BLAISE: La sauvegarde des
intérêts des salariés dans les entreprises en
difficultés, D., S., Juin 1985, page 449
TITRE I : NECESSITE DE GARANTIR LES CREANCES
NEES
DE L'EXPLOITATION
La poursuite de l'exploitation génère de
nouvelles dettes, donc de nouveaux créanciers 85qui viennent
s'ajouter à la liste des créanciers antérieurs au jugement
déclaratif de faillite ou de liquidation judiciaire. Cette superposition
des créanciers a posé le problème de leur ordre de
paiement.
Dans le but de favoriser la poursuite de l'exploitation, un
traitement privilégié est accordé aux créanciers
postérieurs au jugement déclaratif. Ce traitement
privilégié s'apprécie par rapport aux créanciers
antérieurs86, à l'égard desquels il se traduit
par une priorité de paiement (CHAPITRE I).
Cependant, cette priorité de paiement n'est pas
absolue car certains créanciers quoiqu'antérieurs au jugement
déclaratif de faillite ou de liquidation judiciaire vont primer ces
créanciers postérieurs (CHAPITRE II).
85 Nous citerons en exemple, les fournisseurs de
l'entreprise, le bailleur de fonds et les salariés
86 ll s'apprécie également entre les
créanciers postérieurs. Entre eux, le paiement se fera selon un
ordre précis. Les créanciers postérieurs titulaires de
sûretés réelles spéciales viendront en rang
favorable et seront payés avant les créanciers chirographaires
postérieurs au jugement. En principe, ces créanciers seront
payés intégralement et au marc-le -franc au cas où l'actif
restant serait insuffisant pour les désintéresser totalement .Cet
ordre de paiement est commun à celui qui est en vigueur en droit commun
des procédures collectives. C'est pourquoi il ne sera pas repris dans ce
mémoire.
CHAPITRE I : PRINCIPE DE LA PRIORITE DE PAIEMENT
DES
CREANCES POSTERIEURES AU JUGEMENT DECLARATIF
La doctrine et la jurisprudence française qui vont
élaborer ce principe. En effet, la cour de cassation française
87 dans un arrêt qui mettait en rapport un bailleur
(créancier postérieur) et les autres créanciers va
décider que le bailleur est fondé à réclamer le
paiement de dommages et intérêts, par préférence
à tous les autres créanciers du failli. Que ce dernier n'est pas
réduit au privilège que lui reconnaît la loi sur les objets
garnissant les lieux loués. La cour de cassation annonçait ainsi
le principe de la priorité des créanciers postérieurs au
jugement déclaratif qui a été adopté, sinon
confirmé par de nombreuses juridictions et auteurs88.
Ainsi, dans les procédures collectives de faillite ou
de liquidation judiciaire, ce principe signifie-t-il que les créanciers
qui ont contracté régulièrement après l'ouverture
de la procédure, sont payés par prélèvement sur
l'actif avant les créanciers antérieurs au jugement d'ouverture.
On justifie cette différence en disant qu'il existe une masse seulement
pour les créanciers antérieurs au jugement déclaratif. Ces
créanciers sont des créanciers dans la masse89. Ils
sont payés sur l'actif de cette masse sans venir en concours avec
87 Cass., civ., 7 Avril 1857, D., P., 1857, 1, 171
88
Cass. com. 16 mars 1965. D. 1966, 63 voir
aussi A. HONORAT : La situation des créanciers de la masse dans la
faillite . rep. Commaille 1962. 465
89 La distinction créanciers de la masse -
créanciers dans la masse, a été à l'origine d'un
débat doctrinal.Certains auteurs ont contesté la notion de
créanciers de la masse. Pour DURAND et ROBLOT , les créanciers de
la masse seraient de simples créanciers du failli. En fait, ils estiment
que la masse n'a pas de patrimoine parce qu'elle n'a pas de biens effectivement
appropriés. N'ayant pas de patrimoine, elle ne peut avoir un actif ou un
passif indépendants de ceux du débiteur.
A cette
question. la cour de cassation
française dans un arrêt de principe, a répondu que la masse
des créanciers constitue une personne morale distincte de la personne
des créanciers qui la composent. Ce qui implique qu'elle a un patrimoine
propre distinct de celui du débiteur. J.C.P. 1956, II, 9601 note
GRANGER, Dalloz 1956, 265, note HOUIN.
les créanciers postérieurs, créanciers
personnels du débiteur90.
La notion de créances de la masse est juridiquement
inexacte puisque ces créanciers dits de la masse sont en
réalité des créanciers du failli; les biens de ce dernier
constituent leur seul gage. Cette situation privilégiée est
fondée sur l'idée que ces créanciers ont conservé
et accru l'actif de la faillite ou encore, sur l'idée de risque
commercial qu'ils ont pris en contractant avec un débiteur en faillite
ou en liquidation. Ce privilège est alors un moyen d'assurer leur
sécurité91.
Toutefois, la justification la plus solide du traitement de
faveur des créanciers postérieurs est d'ordre pratique. Elle est
particulièrement impérieuse selon le mot de RIPERT et ROBLOT
92 pendant la phase de continuation. L'activité doit
être poursuivie, elle ne peut l'être que si les créances qui
naissent en cette occasion bénéficient d'une garantie de
paiement.
La mise en oeuvre de ce principe suppose que les créances
en question présentent un certain nombre de caractères.
90 Yves GUYON : Droit des affaires, Entreprises en
difficulté, T. 2, éd., Economica, Paris, 1989
91 Guy LAMBERT, J.C.P. 1961.1.1643 La personnalité
juridique de la masse (la condition juridique de la masse et la
consécration de la personnalité juridique de ce groupement. La
reconnaissance de la personnalité juridique de la masse a donnée
naissance à un nouveau fondement : la masse sans garantir
personnellement le règlement des dettes postérieures, aurait
accepté qu'elles fussent payées en priorité sur l'actif du
débiteur.
92 RIPERT et ROBLOT, Traité de droit
commercial, T. 2, 13 ème ed., L.G.D.J., Paris, 1992, P. 1022
SECTION I : CARACTERISTIQES DES CREANCES
PRIORITAIRES
Pour qu'une créance soit prioritaire, elle doit
être née après le jugement d'ouverture, résulter
d'une continuation de l'activité et être régulière.
Ces caractéristiques sont déduites du principe de la
priorité des créances postérieures, élaborée
par la jurisprudence. Le projet OHADA en son article 117 va codifier ces
critères d'origine jurisprudentielle.
Paragraphe I - Naissance postérieure de la
créance après le jugement d'ouverture
La doctrine et la jurisprudence admettent que les
créanciers dont la créance est née du chef de
l'activité du syndic ou du débiteur assisté après
le jugement déclaratif doivent être payés avant les
créanciers dans la masse (c'est à dire, ceux dont la
créance est née antérieurement au jugement
déclaratif).
La détermination de la date de naissance de la
créance n'est pas toujours aisée car, il peut se poser des
problèmes relatifs à la postdate et aux créances reconnues
postérieurement au jugement déclaratif mais, nées d'une
cause antérieure.
A - Détermination de la date de naissance de
la créance La détermination de cette date
revêt une importance certaine.
Pour la connaître, il suffit en principe, de comparer
la date du jugement d'ouverture qui est connue et la date de la créance.
La situation est simple pour les créances qui naissent d'actes de
commerce, dont la date peut être établie par tous moyens.
S'il s'avère que la créance a une date
postérieure au jugement déclaratif, elle sera
considérée a priori comme créance postérieure au
jugement déclaratif, elle sera considérée à priori
comme une créance postérieure. Dans le cas contraire, elle
sera
considérée comme une créance
extérieure et exclue du domaine du principe de la priorité.
Ainsi, les personnes qui passent un contrat avec le
débiteur assisté ou le syndic agissant dans
l'intérêt de la masse deviennent des créanciers de la
masse, lorsque la preuve de la postériorité de leur
créance est rapportée.