3.4.2 - La communication
Infirmier étant un métier de communication, il
ne semble pas étonnant du tout que les étudiants en Soins
Infirmiers parlent tous autour de cette-communication utilisant par la
même ce qu'ils considèrent comme son mode privilégié
au sein de la profession à laquelle ils aspirent : le langage.
Lorsque nous connaissons la difficulté que représente la
concordance des Arrière-Plans de chacun au sens de Searle (1985) afin de
réussir à se comprendre dans l'utilisation de mots, nous pouvons
facilement imaginer que cette communication langagière peut
représenter un obstacle même au sein d'une communauté qui
pratique la relation au quotidien.
Ce qui est le plus difficile pour les étudiants parait
donc être en toute logique l'absence de communication que nous avons
nommée ici « indifférence », comme nous
l'annonce « tout de go » Anne-Lise :
« J'ai très mal vécu ce stage par rapport à
une infirmière (ma référente) qui ne m'adressait
pratiquement pas la parole ». Ce manque de parole est repris par
Eric lorsqu'il nous écrit : « je fus confronté
à son silence, silence que je rencontrerais souvent par la suite,
puisque je n'ai jamais réussi à établir de réel
dialogue avec elle ». Ainsi, tout porte à croire que
l'importance du relationnel est ici déjà intégrée
et que c'est à travers cette valeur professionnelle que les
étudiants expriment leur ressenti, ne comprenant pas qu'il n'y ait
« aucune explication malgré mes
questionnements » une situation aussi vécue par Rose qui
a « très mal vécu lors d'un stage dans un
hôpital quand une infirmière (...) ne voulait pas répondre
à (ses) mes questions ».
Pour ces étudiants, le silence témoigne d'un
manque de considération et Arnaud exprime très bien la
portée de ce problème, avec ce point de vue :
« Je pense qu'il est important de considérer
l'étudiant infirmier (...) La façon de nous parler, la
façon de nous faire des remarques, le peu d'intérêt
porté lorsque nous disons quelque chose ». Il y a une
recherche réelle de compréhension qui ne semble pas toujours
être apportée par les professionnels comme en témoigne
l'infirmière rencontrée par Glawdys :
« Elle a préparé son
matériel sans m'expliquer le « pourquoi du
comment. » On est arrivé dans la chambre, elle a
préparé son matériel toujours sans explication. J'essayais
de ne rater aucune étape pour bien comprendre le soin.
Je l'ai observée, manipulant le
matériel(...)... et à mes questions (...), elle répondait
que c'était parce que j'étais là qu'elle faisait comme
ça mais que d'habitude elle faisait différemment...
(c'était logique !)
Nous sommes ressorties de la chambre, j'avais rien compris
aux étapes du soin car il n'y avait eu aucune logique, aucune
explication malgré mes questionnements...
(...) elle n'expliquait rien, ne faisait aucun lien pour
nous éclairer... »
De manière sans doute incitée par le poids des
responsabilités inhérentes au métier d'infirmier, il
parait se créer parfois un fossé entre les étudiants qui
souhaitent comprendre pour minimiser leurs angoisses et les professionnels qui
utilisent peut-être d'autres moyens que le langage pour transmettre leurs
savoirs. Certains messages passent néanmoins puisque Cassandra pense que
certains professionnels « ne souhaitent pas
encadrer » alors qu'« aucun ne le dit
directement ». Tout se passe ici comme si les paroles
échangées participaient à une certaine
considération pour l'étudiant, en lui signifiant une
intégration au sein de l'équipe, comme l'illustre Anne-Lise en
parlant des référents qu'elle a appréciés :
« Elles n'ont pas hésité (...), à m'inclure
dans les conversations, à me présenter ».
Allant plus loin en terme de défaillance de la part des
professionnels, Eric souhaite « l'apprentissage des techniques du
dialogue interprofessionnel » au sein de la formation
infirmière alors que l'on retrouve des unités d'enseignements,
in texto, dans le référentiel de formation en relation
avec la compétence 6 qui est : « Communiquer et conduire une
relation dans un contexte de soins » en place et lieu de trois
unités d'enseignement (UE) : UE 4.2.S2, S3 et S5 concernant
les soins relationnels. De la même manière, dans chacun des
semestres, une unité d'intégration concoure
à l'acquisition d'une ou plusieurs compétences. Ainsi sont
combinés et mobilisés les ressources, savoirs et savoir-faire,
acquis dans les UE du semestre en cours puis, progressivement, des semestres
précédents avec, au semestre trois : UE 5.3.S3 communication et
conduite de projet.
Il semblerait donc que la formation ne soit pas mise en
défaut, mais alors qu'est ce qui empêche professionnels et
étudiants de communiquer « vrai » ?
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