III - LES LIMITES DE LA PRATIQUE REFLEXIVE
3.1/ De praticien
réflexif formé à praticien réflexif formateur
L'enjeu n'est pas simplement d'apprendre à
réfléchir. La formation réflexive n'est pas de l'ordre du
savoir mais du rapport au savoir, du regard sur l'action, de la
posture critique, de la compétence. Tout cela ne se développera
que si cette préoccupation traverse l'ensemble du programme de
formation. C'est le but des unités d'intégration (U.I.)
prévues au programme de formation infirmière. Les
étudiants apportent les situations vécues en stage (retranscrites
dans le portfolio) et contribuent à alimenter les débats autour
de l'analyse de pratiques et de situations. Les U.I., placées à
la fin de chaque semestre, ont été conçues de façon
à relier les unités d'enseignements et les stages
effectués avant et visent à l'acquisition progressive des
compétences prévues lors de ces semestres. Il est
nécessaire d'acquérir une compétence à la pratique
réflexive pour espérer devenir un praticien réflexif
quotidien. Cela laisse entrevoir les difficultés majeures des
accompagnateurs de cette démarche.
Perrenoud prétend qu'il serait injuste que les
institutions de formation initiale demandent aux soignants et autres formateurs
de terrain de développer une pratique réflexive chez leurs
stagiaires, alors que les formateurs se limiteraient à dispenser des
savoirs.
« Si l'on veut former des praticiens
réflexifs, mieux vaudrait que leurs conseillers pédagogiques ou
maîtres de stages se situent eux-mêmes dans cette orientation.
» (P. Perrenoud, 2001).
Ainsi, il faut envisager la formation des formateurs mais
également des tuteurs de stage pour espérer être efficace
dans la pratique réflexive de l'étudiant.
3.2/ Un sens
nécessaire
La pratique réflexive ne doit pas être
considérée comme contrainte institutionnelle (obligation de
valider les U.I.) mais comme processus interne contribuant au
développement professionnel. C'est en cela que l'étudiant peut
espérer trouver un sens à ses actions, principal moteur du
processus réflexif, nous l'avons vu.
3.3/ La prise en compte des
valeurs
Reste le problème des valeurs. Dans le monde
enseignant, pionniers de la pratique, les recherches ont montrées que
« les conflits qui apparaissent souvent dans l'enseignement et
auxquels doit faire face le praticien par sa capacité réflexive
sont souvent des problèmes de valeurs, or il s'agit de débats
publics qui concernent la société et pas seulement la
corporation » (F. Gomez, 2001, p. 186). La question des valeurs
ou de l'éthique est évidente en milieu hospitalier et dans les
conditions énoncées, l'exercice de la pratique réflexive
dans des milieux « fermés » seraient susceptibles de
ne pas résoudre ces problèmes de valeurs et limiterait
l'ouverture du praticien à ses propres conceptions. Je ne rentrerai pas
plus loin dans le débat mais c'est une discussion à entreprendre
entre partenaires.
|