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Le sort des droits de préemption dans les procédures collectives agricoles

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par Jérémy MAINGUY
Université de Poitiers - Master 2 Droit de l'activité agricole et de l'espace rural 2010
  

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LISTE DES ABRÉVIATIONS

Act. proc. coll. Actualités des procédures collectives

AJ Actualités juridiques

act. jurispr. Actualité jurisprudentielle

al. Alinéa

Ann. Loyers Annales des loyers (les)

AN Assemblée nationale

Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (chambres civiles)

BICC Bulletin d'information des arrêts de la Cour de cassation

CA Cour d'appel

Cass. Cour de cassation

ch. chambre

C. civ. Code civil

C. com. Code de commerce

C. rur. Code rural

coll. Collection

comm. Commentaire

concl. Conclusions

D. Dalloz (Recueil)

Dict. perm. Dictionnaire permanent (éditions législatives)

DEA Diplôme d'études approfondies

DPU Droit à paiement unique

doc. Document

éd. Edition

EARL Entreprise agricole à responsabilité limitée

Et. fonc. Etudes foncières

JOAN Q Journal officiel (Questions réponses) Sénat

J.-Cl. Juris-Classeur (Encyclopédies)

JCP E Juris-Classeur périodique- édition entreprise

JCP G Juris-Classeur périodique - édition générale

JCP N Juris-Classeur périodique - édition notariale et immobilière

LPA Les Petites Affiches

L. Loi

n° Numéro

obs. Observation

ord. Ordonnance

p. Page

RMI Revenu minimum d'insertion

RSA Revenu de solidarité active

RD banc. et bourse Revue de droit bancaire et bourse

RD rur. Revue de droit rural

Rev. proc. coll. Revue des procédures collectives

Rapp. Rapport

SAFER Société d'aménagement foncier et d'établissement rural

SARL Société à responsabilité limitée

SRU Solidarité et renouvellement urbain

soc. social

SAU surface agricole utile

TGI Tribunal de grande instance

T. com. Tribunal de commerce

V. Voir

INTRODUCTION

La loi n° 88-1102 du 30 décembre 1988 a généralisé l'application du droit des procédures collectives aux exploitation agricoles.

En effet, bien que certains agriculteurs étaient déjà soumis aux procédures collectives (agriculteur ayant la qualité de commerçant...), cette loi constitue un tournant.

Elle a pris en compte une situation existant depuis plusieurs décennies un certain nombre d'exploitations agricoles sont confrontées à une situation financière difficile :

- en 1992, 8 000 agriculteurs étaient bénéficiaires du RMI ;

- de 1988 à 1991, 3 500 exploitations agricoles ont cessées d'exister à cause de difficultés financières 1 ;

- plus récemment le revenu des agriculteurs a diminué de 34 % au cours de l'année 2009 et près de 75 000 agriculteurs seraient éligibles au RSA 2.

Cependant, cette loi a aussi créé un espace de confrontation entre le droit des procédures collectives et le droit rural.

Les procédures collectives ont pour effet d'assurer un règlement collectif des créanciers en supprimant le droit des créanciers d'exercer des poursuites individuelles.

Ce droit n'a jamais cessé d'évoluer afin de permettre une meilleure survie des débiteurs en difficulté. Cette priorité est inscrite dans l'article premier de la loi du 25 janvier 1985 qui fixe les objectifs des procédures collectives :

« La sauvegarde de l'entreprise, le maintient de l'activité, de l'emploi et l'apurement du passif ».

La loi n° 2005-45 du 26 juillet 2005 a créé la procédure de sauvegarde. Rompant avec les critères traditionnel, cette procédure peut être ouverte sans que le débiteur ne soit en état de cessation des paiements.

D'autres mécanismes se sont développés : la procédure de conciliation prévue à l'article L. 611-4 du Code de commerce, crée par la loi du 25 janvier 2005 en

1 F. Colson, A. Blogowski, B. Dorin, « Les exploitations agricoles en situation difficile », RD. rur.,

n° 220 février 1994, p. 49.

2 Le Monde, 2 mars 2010.

remplacement de la procédure de règlement amiable. Elle peut être ouverte bien que le débiteur soit déjà en état de cessation des paiements dans la limite de 45 jours.

Comme nous pouvons le constater, les différentes réformes montrent que l'objectif des procédures collectives se modifie. Le but n'est plus seulement d'assurer un règlement du passif mais de faire le nécessaire pour empêcher la disparition de l'entreprise.

La cause se trouvent principalement dans la lutte contre le chômage, objectif prioritaire des gouvernements français depuis la fin des Trente Glorieuses. La sauvegarder d'une entreprise permet d'éviter une hausse du taux de chômage et ainsi éviter une hausse des déficits publics.

L'application des procédures collectives aux agriculteurs a les mêmes causes, le traitement des difficultés d'une exploitation agricole par les procédures collectives est meilleure que si elle était confrontée à de multiples mesures d'exécutions individuelles (saisie conservatoire...) la dépossédant de tout son actif sans lui avoir laissé une chance de procéder à des réformes structurelles. Cependant cela n'est pas sans poser certains problèmes. L'activité agricole est une activité très encadrée par les pouvoirs publics, il suffit d'ouvrir le Code rural et de constater le nombre de dispositions d'ordre public dans le statut du fermage.

Le but de ces dispositions est de protéger l'activité agricole de pratiques nuisibles à l'équilibre économique des exploitations, citons comme exemple la prohibition de la cession du bail rural, érigée par l'article L. 411-35 du Code rural. Elle permet d'éviter une spéculation sur les baux ruraux. Cependant ces règles d'ordre public ne risquentelles- pas de rentrer en conflit avec les règles en matières de procédures collectives ?

Cette question est centrale dans ce mémoire lequel traite de la question du sort des droits de préemption dans les procédures collectives agricoles.

On peut les définir comme l'avantage qui est donné soit par la loi soit par une disposition contractuelle, de pouvoir se substituer à l'acquéreur d'un droit ou d'un bien pour en faire l'acquisition à sa place et dans les mêmes conditions que ce dernier.

Nous étudierions les deux droits de préemption légaux majeurs en droit agricole :

- le droit de préemption du preneur posé à l'article L. 412-1 et suivants du Code rural ;

- le droit de préemption de la SAFER posé à l'article L. 143-1 et suivants du Code rural.

Est soumis au droit de préemption du preneur en vertu de l'article L. 412-1 et suivants du Code rural les opérations d'aliénation à titre onéreux des biens loués en vertu d'un bail rural consenties à des personnes qui ne sont pas parentes ou alliées du bailleur jusqu'au 3° degré inclus, que la cession soit de gré à gré ou par adjudication est sans importance.

Peuvent donc être soumis à ce droit de préemption les opérations de vente ou d'échange d'un bien immobilier sur lequel a été consenti un bail rural. Cependant ce droit est neutralisé si la contrepartie n'est pas en argent. Les baux à nourriture, les apports en société ainsi que les échanges sont donc exclus des opérations soumises au droit de préemption.

Est soumis au droit de préemption de la SAFER en vertu de l'article L. 143-1 du Code rural les opérations d'aliénation à titre onéreux des biens immobiliers à usage agricole ainsi que leurs biens mobiliers accessoires et des biens immobiliers à usage d'habitation faisant partie d'une exploitation agricole à des personnes qui ne sont pas parentes ou alliées du propriétaire jusqu'au 4° degré inclus.

Le caractère volontaire ou forcée de la cession est indifférent. Il existe cependant des exceptions légales, d'une part celles énumérées précédemment pour le droit de préemption du preneur et d'autre part d'autres tenant à la nature du bien. En effet, le droit de préemption de la SAFER est neutralisé en cas de vente d'un bien ayant perdu sa vocation agricole.

Rappelons qu'en vertu de l'article R. 143-7 du Code rural le droit de préemption du preneur est prioritaire à celui de la SAFER sauf si le preneur en place exploite le bien concerné depuis moins de trois ans.

Il est possible que lors d'une procédure collective ouverte à l'encontre d'une exploitation agricole, il soit question de ces deux droits de préemption.

Tel peut être le cas d'un exploitant agricole céréalier en état de cessation des paiement qui a loué des prairies dont il est propriétaire par héritage à un éleveur de bovins. Afin de permettre la rentrée rapide de liquidités, l'administrateur judiciaire peut être tenté de vendre ce bien au cours de la période d'observation à un éleveur d'ovins qui ferait une offre intéressante.

La question est de savoir si les droits de préemption ruraux sont neutralisés ou non. La question n'est pas anodine. Si les droits de préemption ne sont pas neutralisés et que les droits de préemption ne sont pas purgés par le notaire, alors la vente commise en fraude de ces droits encourt l'annulation3.

Afin de répondre à cette question, nous étudierons le sort de des droits de préemption ruraux au cours des différentes étapes de la procédure collective.

3 C. rur, art. L. 412-10 et R. 143-20.

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