La participation du salarie au fonctionnement de la societe anonyme en droit ohada( Télécharger le fichier original )par Essoham Komlan ALAKI Université de Lomé - DESS Droit des affaires 2004 |
2- Les bénéficiaires de la souscriptionIl ne fait l'ombre d'aucun doute que les bénéficiaires de la souscription sont, ici, les salariés qui ont accepté les actions rachetées de leur société. A ce titre, ils ne sont pas de facto soumis à l'obligation de libérer les actions qui leur ont été attribuées. Cependant, cette obligation n'apparaît seulement qu'au jour de l'expiration du délai d'un an et après que les actions aient été virées du compte de la société au compte personnel des salariés bénéficiaires. La justification de cette obligation devra être recherchée dans le mode de cession des actions aux salariés, selon que cette cession est à titre gratuit ou à titre onéreux. Dans le cas d'une attribution gratuite assimilable à un complément de rémunération versée en nature, l'obligation mise à la charge des salariés apparaît excessive. Par contre, si l'attribution se fait à titre onéreux, la propriété des actions détenues temporairement par la société (au maximum 1 an) reste acquise aux salariés dès l'inscription des titres sur leur compte personnel. Ainsi, l'obligation de libération de ces actions leur incombe en tant que cessionnaires successifs68(*) , donc propriétaires. Dans la pratique, la société peut leur consentir des prêts en vue de la libération de ces actions ou leur accorder - ce qui revient au même - des délais raisonnables de règlement. Malgré ces nombreuses possibilités, il peut arriver que ces actions ne soient pas libérées. Quelles seront les conséquences pour les débiteurs de cette obligation ? B- La sanction attachée à la non libération des actions souscritesL'obligation de libérer les apports est une disposition impérative de l'AUDSCGIE dont la violation est susceptible de donner lieu à la nullité de la société69(*). Ainsi la sanction de la non libération des actions acquises ou souscrites en vue de l'attribution aux salariés trouve son fondement dans les articles 639, 738 et 740 AUDSCGIE auxquels renvoie expressément l'article 640 du même Acte. La nullité de la société prévue par ces dispositions engage la responsabilité solidaire des fondateurs, des membres du conseil d'administration ou de l'administrateur général selon le cas, et de la personne qui agit en son nom propre mais pour le compte de la société. A qui appartient l'action en responsabilité du fait de la nullité de la société ? L'action en responsabilité appartient à celui (ou ceux) qui subit personnellement le préjudice. C'est le cas des associés de la société dont l'intérêt légitime, sérieux et véritable n'est pas à démontrer. On se demande, en revanche, s'il est possible aux salariés d'agir en responsabilité dans la mesure où ces actions de la société n'ont été rachetées que pour leur être attribuées. Ont-ils un intérêt légitime, certain et actuel à agir pour le préjudice que leur causerait la nullité de la société résultant de la non libération des actions qui leur sont destinées ? Peut-on affirmer que le droit qu'ils revendiqueraient n'est qu'éventuel ou hypothétique, voire une simple expectative ? Il ne saurait en être ainsi. En principe, il est clair que l'intérêt des salariés existe surtout à compter de l'expiration du délai d'un an à partir de l'acquisition des actions70(*) . Ils sont censés être attributaires des actions souscrites et libérées. Ils ont donc un intérêt collectif certain, actuel et direct pour poursuivre la réparation du préjudice subi conformément au droit commun. Une action collective des salariés contre les débiteurs de l'obligation de libérer les actions rachetées est susceptible d'aboutir. Or, l'OHADA n'organise pas une participation collective des salariés aux instances de la société. En revanche, l'action individuelle des salariés ne saurait être fondée dans la mesure où même après l'expiration du délai prévu pour leur attribution, l'inscription des actions sur le compte personnel de chaque salarié n'est pas encore opérée. Il faut comprendre cette solution par rapport au mutisme et au flou des dispositions législatives qui ne précisent pas les critères d'attribution de ces actions rachetées. Ceci serait différent si les statuts prévoyaient expressément la qualité des attributaires ou encore si l'assemblée générale extraordinaire qui autorise l'opération déterminait le nombre et l'identité des salariés bénéficiaires. En définitive, on voit que le législateur OHADA reconnaît une place au salarié dans le fonctionnement de la SA à travers une participation qui, au regard de ce qui précède, apparaît comme embryonnaire et surtout restrictive. Dès lors, il importe de se livrer à une appréciation d'une telle participation. CHAPITRE II * 68 Consulter utilement l'arrêt de la Cour de Paris du 10 janvier 1991, Bull. Joly 1991, p. 301 n° 92 note Trassard. * 69 V. article 244 AUDSCGIE * 70 Article 640 alinéa 1 de l'AUDSCGIE in fine. |
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