La participation du salarie au fonctionnement de la societe anonyme en droit ohada( Télécharger le fichier original )par Essoham Komlan ALAKI Université de Lomé - DESS Droit des affaires 2004 |
B- L'interdiction de porter atteinte au capital socialL'acquisition d'actions de la société en vue de leur attribution aux salariés ne doit pas avoir comme conséquence l'abaissement des capitaux propres de la société à un montant inférieur à celui du capital social augmenté des réserves non distribuables60(*). Il est important de cerner la notion de capitaux propres (1) avant de percevoir l'intérêt d'une telle exigence (2). 1- La notion de capitaux propres On entend par capitaux propres 61(*) l'ensemble des sommes qui reviendraient aux associés en cas de dissolution de la société. Ils regroupent l'ensemble des sommes investies par les détenteurs du capital. Les capitaux propres constituent les ressources stables que la société emploie pour le financement intégral de l'actif social composé de l'actif immobilisé (ensemble de toutes les immobilisations corporelles, incorporelles et financières) et de l'actif circulant. Quelle est alors la composition des capitaux propres ? Le droit comptable insiste sur la notion de «capitaux propres et ressources assimilées''62(*). D'abord, les capitaux propres sont formés du capital social (classe 10), des réserves constituées (classe 11) et du résultat net bénéficiaire ou déficitaire de l'exercice (classe 13). Ce sont des sommes investies par les actionnaires, par opposition aux sources extérieures de financement (emprunts). Les réserves dont s'agit ici ne peuvent être que des réserves légales et statutaires non disponibles. Ensuite, aux capitaux propres, on assimile un certain nombre de ressources que le droit comptable uniforme appelle « autres capitaux propres »63(*). C'est dans cette optique que les prêts participatifs sont souvent assimilés aux fonds propres, car ils sont mis à la disposition de la société d'une manière stable et ne sont remboursés qu'après les créanciers chirographaires. Néanmoins cette assimilation a été critiquée64(*) car malgré leur stabilité apparente, ces quasi fonds propres ne sont autre chose que des dettes. Par conséquent, on risque de tromper les autres créanciers en leur faisant prendre une dette pour un élément qui accroît la solvabilité de la société. Au demeurant, quel est l'intérêt d'une telle interdiction ? 2- L'intérêt de l'interdiction La fraction du capital social mise à la disposition des salariés ne doit pas abaisser les capitaux propres et les autres capitaux propres en dessous du montant du capital augmenté des réserves indisponibles. Cette interdiction présente un double intérêt. D'un côté, elle permet de sauvegarder le principe de la réalité du capital social qui est le gage minimum des créanciers sociaux. En effet, les actions acquises pour être attribuées aux salariés constituent une exception au principe de l'auto détention des actions par une société. Celle- ci pourra soutenir les cours de ses actions en se portant acquéreur ou les faire baisser en vendant les titres qu'elle détient en portefeuille. Or, cette auto détention qui est dans une certaine mesure un contrat de la société avec elle-même contribue à rendre le capital fictif et flottant, ce qui est catastrophique pour les épargnants65(*). D'un autre côté, l'interdiction est destinée à éviter que la satisfaction d'un intérêt catégoriel, en l'occurrence celui des salariés, ne mette en péril l'existence même de l'entreprise. En effet, la baisse des capitaux propres en dessous du capital augmenté des réserves non distribuables constitue une cause de dissolution anticipée des sociétés anonymes66(*). Bien sûr, la société dispose d'un délai pour régulariser la situation. Dans le cas contraire, et si la situation est préoccupante, voire irrémédiable, la société peut demander l'ouverture d'une procédure collective. En somme, la philosophie du législateur O.H.A.D.A est simple. La promotion de l'actionnaire salarié ne doit pas porter atteinte à l'intérêt des actionnaires et à la viabilité de l'entreprise, donc à la stabilité de l'emploi que l'on veut sauvegarder. Mais un autre problème surgit : celui de la libération des actions de la société dont l'acquisition a été faite au profit des salariés. * 60 Article 640 al 6 AUDSCGIE * 61 Ici, le législateur nous rappelle l'aspect comptable du capital social qui n'est le plus souvent envisagé que sous son seul aspect juridique. Ainsi, d'un point de vue comptable, le capital social se distingue de l'actif social et des fonds ou capitaux propres. * 62 Notamment le plan comptable SYSCOA * 63 Article 30 de l'Acte Uniforme relatif au Droit Comptable (AUDC) * 64 Y. Guyon préc. n°109, p. 614. * 65 J. Cl. COVIAUX, «L'achat par une société de ses propres actions» in Dix ans de droit de l'entreprise, Litec, 1978 p.187. * 66 Comp. avec l'article 664 AUDSCGIE |
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