La participation du salarie au fonctionnement de la societe anonyme en droit ohada( Télécharger le fichier original )par Essoham Komlan ALAKI Université de Lomé - DESS Droit des affaires 2004 |
B- L'exigence de conditions implicitesIl ne fait pas de doute que l'article 426 AUDSCGIE réglementant la participation des salariés au destin de la société par le biais du cumul a été inspiré par le célèbre article 93 de la loi française du 24 juillet 1966. Ce dernier exige outre les conditions énumérées, d'autres conditions qu'on estime être en latence dans l'exigence du législateur OHADA : la limitation du nombre de salariés participants (1) et la condition désormais abolie d'une antériorité biennale (2). 1- Le numerus clausus La disposition de l'article 426 AUDSCGIE semble faire penser que l'OHADA permet l'entrée d'un nombre illimité de salariés d'une SA au Conseil d'Administration. Cela suffit-il à affirmer que l'OHADA consacre une large participation du salarié à la direction et à la gestion de la SA ? Une réponse affirmative serait imprudente. Car, l'article 426 A.U.D.S.C.G.I.E doit être lu en combinaison avec l'article 417 du même Acte34(*) qui s'applique bien aux salariés car dans la plupart des cas, ils ne sont pas actionnaires. Le numerus clausus est, en l'espèce, la stipulation relative à la limitation quantitative des salariés à la fonction d'administrateur fixée au tiers. Il en résulte que le législateur O.H.A.D.A a entendu utiliser la «règle du tiers»35(*) pour limiter la participation des salariés dans les instances dirigeantes. Ainsi, il a entendu instaurer une participation minoritaire du salarié qui, lorsque les statuts le prévoient, ne pourrait pas peser d'une manière décisive sur les délibérations, faisant ainsi concurrence aux représentants des détenteurs du capital. Pour déterminer cette limite, on devrait tenir compte du Président du Conseil d'Administration, du Directeur Général s'il est administrateur et des représentants permanents des personnes morales administrateurs. Peu importe la nature, subalterne ou de direction, de l'emploi salarié c'est- à- dire, employé, agent de maîtrise ou cadre. Ainsi, un Conseil d'Administration de trois membres peut comprendre un Président, un Directeur Général, et un salarié administrateur. Curieusement, le législateur semble ne pas prévoir de sanction en cas de violation de cette règle du tiers ; il se borne à annuler les délibérations d'un Conseil d'Administration irrégulièrement constitué (article 428 A.U.D.S.C.G.I.E) sans se prononcer expressément sur la nomination qui est à l'origine de la violation. A notre avis, l'analyse de l'article 242 A.U.D.S.C.G.I.E auquel renvoie l'article 428 du même Acte permet d'annuler la nomination en ce qu'elle viole une disposition impérative de l'Acte Uniforme. La majorité des auteurs estime qu'il est souhaitable d'admettre, dans le silence des textes, que les administrateurs dont la situation est irrégulière soient décomptés pour la détermination du quorum et de la majorité36(*). La possibilité du cumul, donc de la participation, a été renforcée par la suppression d'une condition de durée attachée à la situation de salarié. 2- La survie d'une condition abolie Elle est relative à l'ancienneté de 2 ans de contrat du salarié candidat au poste d'administrateur37(*). Elle signifie que le salarié devait posséder un contrat de travail vieux de deux ans avant son entrée au Conseil d' Administration. Ce délai considéré comme un minimum était destiné à éviter la fraude. Il court à partir de la date de conclusion du contrat. Cette condition a été jugée excessive par la doctrine française qui l'a qualifiée «d'un juridisme confinant l'absurde ». Ce qui a motivé le législateur français à l'abolir en 1994. C'est aussi cette même solution qu'a adoptée le législateur OHADA. Mais la suppression de la durée de deux ans emporte-t-elle suppression de la condition d'antériorité elle-même ? L'on ne saurait l'affirmer car cette condition d'antériorité survit et reste accentuée par l'exigence d'un travail effectif. Pour le juge, cette antériorité biennale demeure toujours une référence symbolique non obligatoire dans la recherche des preuves du caractère effectif du contrat de travail pour valider le cumul. Autrement dit, le juge OHADA utilisera un faisceau d'indices pour établir l'effectivité de l'emploi et rien ne s'oppose à ce qu'il se réfère à la condition légale désormais abolie car le caractère réel et sérieux du contrat peut aussi découler de sa consolidation par le temps. Somme toute, lorsque le salarié arrive à participer à l'organe de gestion et de direction qu'est le Conseil d'Administration par l'intermédiaire du cumul, un autre problème apparaît ; celui de l'incidence des nouvelles fonctions sur la survie de son contrat de travail. * 34 « Le Conseil d'administration peut comprendre des membres qui ne sont pas actionnaires de la société dans la limite du tiers des membres du Conseil. » * 35 La règle du tiers est celle qui exige que le nombre des salariés participant à l'organe de gestion ne dépasse pas le tiers des autres membres du conseil d'administration. * 36 Michelle PETOT- FONTAINE, La Société Anonyme, Dix études de Cas, Collect. L.G.D.J 1979, p.42 ; M. DESLANDES, « Réflexions sur le cumul d'un mandat social et d'un contrat de travail », D.1982, chr, p. 25. * 37 L'antériorité biennale du contrat de travail existait en tant qu'une condition nécessaire jusqu'à la Loi Madelin du 11 février 1994. |
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