La participation du salarie au fonctionnement de la societe anonyme en droit ohada( Télécharger le fichier original )par Essoham Komlan ALAKI Université de Lomé - DESS Droit des affaires 2004 |
B - L'imprécision des modalités d'attribution des actions aux salariésQui, parmi les salariés, peut détenir les actions de la société ? Comment organiser l'attribution des actions entre les salariés si le rachat a été décidé par l'assemblée générale des actionnaires ? Ce sont ces interrogations qui découlent de la participation organisée par l'Acte Uniforme. En principe, les actions rachetées sont des «actions de salariés»111(*) ou actions de personnel. Dans cette optique, toute personne titulaire d'un contrat de travail effectif doit en bénéficier. Dès lors, toutes les catégories de salariés sont concernées : les administrateurs titulaires d'un contrat de travail au sens des articles 417 et 426 AUDSCGIE, les cadres, les ingénieurs, les agents de maîtrise, les employés, les ouvriers. Cette idée, renforcée par l'indisponibilité attachée aux actions, ne devrait tomber qu'en cas de refus exprès d'un salarié de ne pas participer à l'actionnariat. Au cas où tous les salariés consentent, la répartition des actions rachetées devrait prendre en compte certains critères objectifs tels que le sérieux, l'assiduité, la compétence managériale ou encore le critère d'ancienneté du salarié. Bien sûr, la prise en compte de ces critères peut aggraver les difficultés résultant de l'indétermination du législateur. Le mutisme de l'article 640 AUDSCGIE est susceptible de laisser la voie ouverte à toutes les combinaisons fondées sur des critères subjectifs tels que le degré d'allégeance du salarié au chef d'entreprise. En l'absence d'interdiction expresse, rien ne s'oppose à ce que les actions rachetées soient réservées à un petit nombre de personnes, voire même, comme cela se pratique aux Etats-Unis, à une seule personne112(*). Il en résulte que l'imprécision des modalités d'attribution des actions aux salariés confirme l'idée selon laquelle la place du salarié dans la société relève du bon vouloir des détenteurs du capital qui apparaissent comme les véritables propriétaires. Sans nul doute, si on reconnaît au législateur OHADA le mérite de trancher le conflit immémorial entre le capital et le travail en faveur du capital, il n'en demeure pas moins vrai que le renouveau du droit des sociétés exige la reconnaissance d'intérêts catégoriels au sein de la société à côté de celui des actionnaires. En définitive, il faut retenir que la participation du salarié telle qu'organisée par l'Acte Uniforme n'est pas consistante. D'un côté, il donne l'occasion aux salariés d'exercer sans grande efficacité une cogestion minoritaire au sein des organes de gestion de la SA. D'un autre côté, s'il prévoit résiduellement la participation du salarié par la détention d'une fraction du capital social, il ne lui reconnaît pas de droits correspondants. Pourquoi ne pas alors promouvoir une véritable participation financière qui permettra aux salariés non seulement d'accéder aux instances suprêmes de la société sans restriction, mais de contrôler la gestion de celle-ci afin de partager ainsi les responsabilités découlant de cette qualité ? DEUXIEME PARTIE POUR LA PROMOTION D'UNE VERITABLE PARTICIPATION FINANCIERE DES SALARIES DANS LA SOCIETE ANONYME La participation des travailleurs à l'entreprise qui était apparue pendant longtemps comme une idée propre aux entreprises des pays occidentaux, a maintenant acquis droit de cité dans la législation communautaire des pays de l'espace OHADA. Dans les sociétés anonymes du droit uniforme, il existe une participation minoritaire et facultative des salariés. Du facultatif à l'obligatoire, du minoritaire au paritaire, il reste une foule d'obstacles à franchir sur la voie de la cogestion pour qu'elle prenne quelque consistance1(*). On doit alors trouver dans la participation financière rénovée un tremplin à la gestion participative des salariés dans la SA. La promotion de ce type de participation qui consiste à dépasser les clivages traditionnels entre capital- travail, est souvent qualifiée d'actionnariat ouvrier 2(*) ou d'actionnariat salarié. L'actionnariat salarié qui apparaît, dans ces conditions, comme l'instrument le plus significatif de la participation financière permet de privilégier des modèles participatifs optionnels dont la mise en oeuvre implique une concertation des divers partenaires sociaux de la société anonyme (Chapitre I). Il en résulte que le salarié qui détient directement ou indirectement les titres de sa société subit une profonde mutation dans son statut juridique et social originel. Dans cette perspective, l'idéal est que le salarié qui le désire, doit partager les responsabilités et les risques inhérents à la gestion de la société en tant que co-entrepreneur (Chapitre II). CHAPITRE I LE DEVELOPPEMENT DE L'ACTIONNARIAT SALARIE COMME INSTRUMENT DE LA PARTICIPATIONL'actionnariat salarié peut être défini comme le fait pour un salarié d'acquérir une part du capital de la société qui l'emploie, c'est-à-dire le fait de participer au capital et au risque de sa société. Cette notion de participation financière se double d'une notion plus vaste de participation dans les instances décisionnelles de la société, ce qui souligne l'aspect le plus intéressant de cette question. Mais, l'objectif de ce travail n'est pas de faire une monographie technique de l'actionnariat salarié. Il s'agit de mettre cette question en perspective dans celle plus vaste de la participation en adoptant deux approches temporelles distinctes et complémentaires. Il semble donc important de situer l'actionnariat salarié dans son contexte afin de montrer que cette conception est inscrite dans l'épaisseur du temps historique et enracinée dans une certaine philosophie du contrat social au sein de l'entreprise. Il en résulte qu'une incitation des divers partenaires sociaux aux opérations d'actionnariat salarié devra être renforcée par l'aisance de leur mise en oeuvre dans une logique volontariste. Il convient donc d'étudier, en premier lieu, les fondements de l'actionnariat salarié qui se révèle être une question d'actualité (Section I) avant d'examiner, en second lieu, les éléments destinés à attraire aussi bien les salariés que les dirigeants sociaux de l'espace OHADA vers les opérations d'actionnariat (Section II). * 111 Car elles n'ont été rachetées que pour être attribuées aux salariés (article 640 AUDSCGIE). * 112 Barthélemy MERCADAL, Philippe JANIN, Droit des Affaires : Sociétés Commerciales, FRANCIS LEFEBVRE, Paris 2003, n° 18774, p. 972. * 1 Yves SAINT-JOURS, « L'entreprise et la démocratie », D. 1993, chr. p. 14. * 2 Jean CHERIOUX, L'actionnariat salarié : vers un véritable partenariat dans l'entreprise, Rapport d'information 500 (98-99). Commission des Affaires Sociales du Sénat français, www.senat..fr. |
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